BILLET D’HUMEUR
Les signaux faibles d’une tentation autoritariste ne cessent de s’accumuler. Nos sociétés hyperconnectées et éruptives voient se lézarder les protections gagnées de haute lutte des libertés individuelles. Ce phénomène n’est pas l’apanage des États totalitaires ou de ceux qui ont pour habitude de bafouer les droits humains. On le trouve aujourd’hui dans nos contrées.
L’article 3 du projet de loi Justice a été adopté par le Sénat ; il vient d’être approuvé par les députés. Le texte valide le renforcement des moyens de surveillance de la police : géolocalisation, caméra et microphone nichés dans nos smartphones pourront être activés à distance et en toute discrétion par les autorités.
Les procureurs et juges d’instruction pourront ainsi demander « l’activation à distance d’un appareil électronique, à l’insu ou sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur, aux seules fins de procéder à sa localisation en temps réel ». De plus, l’autorisation d’activer à distance le microphone ou la caméra d’un appareil électronique pour enregistrer images et sons, sera permise toujours après validation par le juge des libertés et de la détention.
Le projet de loi présenté par le garde des Sceaux précisant que ces moyens de surveillance par les smartphones seraient limités aux enquêtes visant « un crime ou un délit puni d’au moins 5 ans d’emprisonnement ». Le Sénat a adopté le texte en élevant le niveau de peine à 10 ans. L’Assemblée nationale a ramené ce niveau à 5 ans. La pente est entamée : rien n’interdit de penser que le niveau de peine soit dans le futur, ou dans d’autres situations politiques, encore abaissé et l’application de l’article de loi étendu à d’autres infractions.
Cela signifie que les personnes susceptibles de voir leur smartphone se transformer en parfait mouchard ne sont pas seulement des figures du grand banditisme ou du terrorisme international. D’ores et déjà, les militant écologistes s’inquiètent d’être dans le collimateur de cette loi mais plus largement, tout citoyen devrait s’interroger sur cette dérive sécuritaire. Quasiment tout le monde possède un smartphone, cet objet privé désormais susceptible de servir à des fins d’espionnage policier. Cela pose une sérieuse question éthique.
Les premières générations de téléphones portables ont contribué à la disparition des cabines téléphoniques et aux emplois qu’elle nécessitaient pour leur entretien. Les gens n’ont rien compris, j’ai pour ma part balancé à ce moment mon portable. Puis sont arrivées les 4 et 5G avec leur GPS intégré, les applications téléchargeables capables de révéler à quiconque de malveillant une bonne partie de l’emploi du temps des personnes surveillées. Le déclenchement à distance des micros et caméras n’est qu’une suite de ce qui était prévisible depuis une dizaine d’années. Que voulez-vous ? L’addiction des gens à ces chers gadgets, hyper-polluants et… Lire la suite »