Tous les jardiniers, même ceux du dimanche, le savent : pour obtenir de belles fleurs, il faut de temps en temps nettoyer ses plantes et éliminer tiges, feuilles et bourgeons fanés. Eh bien, c’est un peu la même chose pour le corps humain. Des chercheurs de l’Université Erasmus Medical Center aux Pays-Bas ont en effet démontré que le corps accumule au fil de l’âge des cellules sénescentes (cellules dormantes) qui ne sont pas toutes éliminées. Jusqu’à présent ces déchets semblaient bien inoffensifs. En réalité, leur accumulation accélère le vieillissement et les problèmes qui y sont liés. En se débarrassant de ces déchets encombrants, l’organisme rajeunit et vit plus longtemps en bonne santé.
Photo : « Mamika » de Sacha Golberger
Supprimer les cellules sénescentes, celles qui se détériorent parce que leur ADN est abimé, pourrait-il contribuer à prolonger la vie ? C’est le pari de ces chercheurs, non pas en quête de l’éternelle jeunesse, mais d’une thérapie qui pourrait aider à vivre plus vieux, en bonne santé.
Les scientifiques ont d’abord travaillé sur des souris. Ils leur ont administré une substance destinée à supprimer les cellules qui sont entrées dans un état dormant à cause de dommages sur leur ADN. Les souris choisies, qui étaient plutôt mal en point, atones, perdant leur fourrure, et montrant des symptômes évident de grand âge, se mirent à gambader deux fois plus loin que leurs congénères, à améliorer leur fonction rénale, à reprendre du poil de la bête au sens propre comme au sens figuré. Bref, elles affichaient tous les attributs d’une seconde jeunesse.
Que s’est-il donc passé ? En vieillissant, nos cellules accumulent des dommages liés à leur ADN défaillant et, passé un certain seuil, ne peuvent se réparer. A ce stade, les cellules peuvent soit devenir cancéreuses, soit s’autodétruire, soit entrer dans un demi-sommeil, la sénescence. Les médecins ont toujours pensé que ces dernières cellules n’avaient aucun apport biologique utile et étaient inoffensives. Il y a une quinzaine d’années, cette idée a commencé à évoluer. En effet, les chercheurs ont constaté que ces cellules secrétaient des déchets et qu’elles n’étaient pas si inoffensives que cela. Le docteur De Keizer qui a mené l’étude emprunte une analogie : « Ces cellules ont un comportement toxique de même nature que celui d’un élève perturbateur dans une classe qui compromet les performances scolaires de ses voisins ».
Il existe désormais des preuves qui soulignent le rôle de ces cellules sénescentes dans les maladies liées à l’âge. On en trouve abondamment dans les articulations arthritiques, la cataracte et les plaques qui se forment dans les artères.
Déjà l’année dernière, une étude avait montré que la suppression de ces cellules avait permis à des souris de gagner 20 % d’espérance de vie. Mais une nouvelle étude tend à montrer pour la première fois que le vieillissement n’est pas seulement retardé en éliminant les cellules sénescentes ; il est potentiellement inversé.
La dernière étude publiée dans la revue Cell décrit le rajeunissement spectaculaire de souris soumises au « lavage » de leurs cellules sénescentes. Pour les auteurs de cette recherche, ces résultats laissent augurer de futures thérapies qui débarrasseraient le corps des cellules sénescentes et le protégeraient des ravages de la vieillesse. Pierre de Keiser, le scientifique qui a dirigé les travaux à l’université Erasmus Medical Center aux Pays-Bas, se prend à prophétiser au quotidien britannique The Guardian : « Peut-être que quand vous atteindrez vos 65 ans, vous irez tous les cinq ans dans une clinique pour effectuer le grand nettoyage de vos cellules sénescentes. Une cure de rajeunissement en quelque sorte ».
Des essais cliniques sur l’homme sont envisagés, d’abord sur des personnes souffrant d’une forme agressive de tumeur cérébrale dans laquelle les cellules présentent une grande similarité avec des cellules sénescentes. Si les essais cliniques s’avéraient concluants sur une grande échelle, on pourra alors dire que les scientifiques sont parvenus à vaincre la vieillesse. Le rêve faustien semble vraiment maintenant à portée de main.
Source : The Guardian
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