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Des chercheurs viennent d’identifier 1016 gènes spécifiques associés à l’intelligence, dont une grande majorité étaient inconnus de la science. Cette découverte élargit considérablement notre compréhension des bases génétiques de la fonction cognitive. Elle remet en scène le débat infini entre intelligence innée ou acquise.
Dirigés par la généticienne Danielle Posthuma de la Vrije Universiteit Amsterdam aux Pays-Bas, des chercheurs ont réalisé une étude massive d’association à l’échelle du génome (GWAS) de près de 270 000 personnes issues de 14 cohortes indépendantes d’ascendance européenne. Les résultats de ces études fournissent certaines des premières « preuves tangibles des nombreux gènes et voies d’accès » qui travaillent ensemble de manière complexe pour construire des cerveaux intelligents et les maintenir en équilibre. C’est ce que déclare à la revue Science, le généticien Peter Visscher du Queensland Brain Institute de l’Université du Queensland à Brisbane, en Australie, dont le jugement est objectif puisqu’il ne faisait pas partie de l’équipe recherche.
Ce travail est également l’un des premiers à identifier les types de cellules spécifiques et les voies génétiques liées à l’intelligence et à la santé mentale, ouvrant potentiellement la voie à de nouvelles façons d’améliorer l’éducation ou les thérapies pour traiter le comportement névrotique.
Les résultats de la première et deuxième étude sont publiées dans la revue scientifique Nature Genetics.
Les chercheurs savent depuis longtemps que nous héritons souvent de l’intelligence et de certains troubles de la personnalité de nos parents. Certes, les facteurs environnementaux comme l’éducation et le stress façonnent aussi profondément l’intelligence et la santé mentale. Mais, jusqu’à présent, les généticiens ont eu du mal à identifier plus qu’une poignée de gènes associés à l’intelligence. L’an dernier, les chercheurs ont utilisé de nouvelles méthodes statistiques qui permettent de détecter de fortes associations entre les gènes et des traits spécifiques pour analyser les dossiers de santé et les dossiers génétiques dans des ensembles de données énormes. Cela a conduit à la découverte de 52 gènes liés à l’intelligence chez 80 000 personnes.
Aujourd’hui, la même équipe a ajouté près de 1000 gènes à cette liste. Les chercheurs de l’équipe de Danielle Posthuma ont fouillé 14 bases de données sur la santé et les dossiers génétiques pour identifier 939 nouveaux gènes associés à l’intelligence chez 250 000 individus. Ces ensembles de données mesuraient l’intelligence avec des scores aux tests d’aptitudes comme les mathématiques, la recherche de synonymes et la logique. De nombreuses variantes de gènes associés à une intelligence supérieure sont apparues chez des personnes qui vivaient plus longtemps et qui n’avaient pas la maladie d’Alzheimer, le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité ou la schizophrénie, rapporte l’équipe dans Nature Genetics, suggérant que l’intelligence protège contre ces troubles. En revanche, les gènes associés à l’intelligence sont corrélés à un risque plus élevé d’autisme.
Être intelligent serait donc une épée à double tranchant. Les personnes intelligentes semblent vivre plus longtemps, mais de nombreux gènes derrière l’intelligence peuvent aussi conduire à l’autisme, à l’anxiété et à la dépression.
En effet, dans une étude distincte également publiée aujourd’hui dans Nature Genetics, Posthuma et ses collègues ont identifié 500 gènes associés à des traits névrotiques, comme l’anxiété et la dépression, en consultant les dossiers de santé et génétiques de 449 400 individus dans de grandes bases de données, comme la UK Biobank, un dépôt d’information sur la génétique, la santé et le bien-être de 500 000 volontaires britanniques, et 23andMe, une entreprise de génomique personnelle à Mountain View, en Californie, avec des données génétiques et de santé sur 5 millions de clients. Ils ont également constaté que les personnes anxieuses avaient hérité de gènes différents de ceux qui étaient plus susceptibles d’être déprimés, ce qui suggère qu’il existe des voies génétiques sous-jacentes différentes pour ces affections.
Dans les deux études, les chercheurs ont utilisé une nouvelle méthode statistique appelée MAGMA pour rechercher rapidement des données génétiques afin d’identifier des types spécifiques de cellules et de tissus où les gènes étaient exprimés. De nombreux gènes de l’intelligence ont été exprimés dans les « medium spiny neurons – neurones épineux moyens » qui font partie des ganglions basaux, amas de neurones profonds dans le cerveau, et qui sont connus pour être impliqués dans l’apprentissage, la cognition et l’émotion.
« Nos résultats indiquent un chevauchement des processus génétiques impliqués à la fois dans le fonctionnement cognitif et les traits neurologiques et psychiatriques et fournissent des preuves suggestives des associations causales qui peuvent conduire à ces corrélations », écrivent les chercheurs. « Ces résultats sont importants pour comprendre les fondements biologiques du fonctionnement cognitif et contribuent à la compréhension des troubles neurologiques et psychiatriques connexes » ajoutent-ils.
Pour aller plus loin :
– Livre « Le génie des gènes » de Laurianne Geffroy, Pierre Tambourin avec la collaboration de Jedan-François Prud’homme – Préface d’Hervé Chneiweiss – Edition Cherche-midi, novembre 2017
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