Une nouvelle étude a révélé que le COVID-19 peut endommager les vaisseaux sanguins dans le cerveau, ce qui nuit aux fonctions cognitives. L’étude, menée par des scientifiques d’Allemagne, de France et d’Espagne, révèle que le COVID-19 peut tuer des cellules du cerveau appelées cellules endothéliales. Des résultats qui interrogent sur les conséquences à long terme de la maladie.
Dans le cadre d’une collaboration internationale, des chercheurs de l’Inserm et du CNRS, ont identifié pour la première fois un effet direct du SARS-CoV-2 sur les vaisseaux sanguins du cerveau. Certaines cellules, les cellules endothéliales vasculaires cérébrales, composantes essentielles de la barrière hémato-encéphalique qui protège le cerveau, sont affectées par un phénomène de mort cellulaire. Ces résultats, qui font l’objet d’une publication de 21 octobre dans la revue Nature Neuroscience, interrogent notamment sur les conséquences à long terme de la maladie.
Des études ont précédemment révélé que jusqu’à 84 % des patients atteints de COVID-19 souffraient de symptômes neurologiques, d’anosmie (perte du sens du goût ou de l’odorat), de crises d’épilepsie, d’accidents vasculaires cérébraux, de perte de conscience et de confusion, et ceci pourrait expliquer pourquoi.
L’étude publiée dans Nature Neurosciences a été menée en scannant les cerveaux de personnes décédées du COVID-19. Les résultats de la recherche ont montré des vaisseaux filiformes, une cellule morte qui ne peut pas permettre au sang de circuler, et qui est un signe de déficience cognitive, et comporte un certain nombre de risques médicaux, y compris des micro-accidents vasculaires cérébraux.
Vaisseaux fantômes
Le cerveau des patients atteints du COVID-19 présente des vaisseaux sanguins endommagés (davantage de vaisseaux dits » fantômes » représentant des restes de capillaires perdus) ; le SRAS-CoV-2 infecte les cellules endothéliales du cerveau entraînant une pathologie microvasculaire.
En conséquence, ces cellules essentielles ne pourraient plus assurer leur fonction au niveau de la barrière hémato-encéphalique. La fonction principale de la BHE est d’isoler le système nerveux central de la circulation sanguine, empêchant ainsi que des substances étrangères ou molécules potentiellement toxiques ne pénètrent dans le cerveau et la moelle épinière, tout en permettant le transfert de nutriments essentiels à leur activité. Participant à cet effort, les cellules endothéliales vasculaires du cerveau jouent donc un rôle primordial dans la bonne irrigation sanguine du cerveau et leur survie est essentielle à son bon fonctionnement.
Comment cette mort des cellules endothéliales survient-elle ? Quels sont les mécanismes impliqués ? Les chercheurs ont mis en oeuvre des techniques de pointes, telles que la transgénèse, le séquençage de l’ARN en cellule unique, la spectrométrie de masse et la microscopie à super-résolution. L’équipe a ainsi découvert que le SARS-CoV-2 fait fabriquer, à partir de son propre matériel génétique, des ciseaux moléculaires par les cellules endothéliales qu’il infecte. Ces ciseaux vont couper une protéine appelée NEMO, indispensable à la survie des cellules endothéliales qui vont donc mourir.
Pour les scientifiques, la mort des cellules endothéliales vasculaires du cerveau peut entrainer deux conséquences majeures : une rupture temporaire de la barrière hémato-encéphalique provoquant des microhémorragies dans des régions où le sang n’est pas censé accéder librement, d’une part, et d’autre part, une hypoperfusion de certaines régions du cerveau (due à la présence de vaisseaux fantômes non fonctionnels), c’est-à-dire une diminution du débit sanguin pouvant entrainer le décès des patients dans les cas les plus graves.
Selon les chercheurs, il y a toutefois un espoir que cette nouvelle facette de COVID-19 puisse être réversible. « Nous avons vu que chez les hamsters, qui développent des formes très mineures de COVID-19, le phénomène est apparemment réversible, donc nous pouvons espérer qu’il pourrait également être réversible chez l’homme », a déclaré à RFI news un coauteur de l’article, Vincent Prévot, directeur de recherche Inserm à Lille. Toutefois, les scientifiques s’interrogent sur les conséquences à long-terme de cette phase de vulnérabilité au cours de laquelle le cerveau des patients est moins irrigué. Selon eux, même si cette hypothèse reste encore à vérifier, cette fenêtre de temps pourrait prédisposer certaines personnes ayant contracté la maladie à développer des troubles cognitifs, neurodégénératifs, voire des démences.
« Cette prise de conscience de la gravité de l’infection par le SARS-CoV2 et ses conséquences pour le bon fonctionnement de notre cerveau est capitale pour permettre la meilleure prise en charge possible des patients ayant été infectés dans les années à venir », conclut Vincent Prévot.
Source Nature, Inserm
Image d’en-tête : Image fluorescente d’un tissu cérébral humain post-mortem montrant des noyaux cellulaires (bleu) mettant en évidence un vaisseau sanguin dans lequel les cellules endothéliales vasculaires expriment le matériel génétique du SARS-CoV2 (rouge). © Vincent Prévot/Inserm