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Ce 7ème continent qui met en danger la biodiversité des océans

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Les chercheurs de l’équipe « Expédition 7ème continent » viennent de démontrer pour la première fois au monde que les micro plastiques se fragmentent pour devenir des nano particules. Aucun océan n’est préservé par la présence massive de plastiques qui véhiculent perturbateurs endocriniens, métaux lourds, polluants et qui sont autant de pièges pour la biodiversité, avec un impact probable sur la santé humaine. Il est grand temps de comprendre, d’expliquer et d’agir contre ce continent de 3,5 millions de km2grand comme six fois la France.
 
En 1997, le capitaine Charles Moore, accompagné de Patrick Deixonne, fondateur et chef de la mission 7ème continent, a été le premier à découvrir une zone immense de plastique flottant dans le Pacifique : au moins 750 000 débris par km2, composé de plastiques à 90 % dont 80 % de déchets provenant de la terre via les fleuves et 267 espèces marines affectées.
Depuis cette découverte, plusieurs expéditions se sont lancé en direction des différentes zones de déchets, dont celle de l’explorateur Patrick Deixonne mise en place en mai 2015 vers l’Atlantique Nord, accompagné de scientifiques du Centre National d’Etudes Spatiales (CNES), de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) pour cartographier les zones et du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique, Université Paul Sabatier) pour analyser les déchets. Des déchets plastiques qui représenteraient 30 à 40.000 tonnes sur l’ensemble des océans du globe. Sur l’Atlantique nord, ce sont 1000 tonnes de plastique qui sont répandues sur une surface grande comme l’Europe. 80% de ces déchets proviennent des continents et 6 millions de tonnes de débris sont rejetées chaque année par les navires, dont 10.000 containers.
 
Selon l’ONG Surfrider Foundation (1), les déchets plastiques provoquent chaque année, par ingestion ou enchevêtrement, la mort de 1 million d’animaux marins.
 

 
Patrick Deixonne et Alexandra Ter Halle, responsable scientifique de l’association, présentent une première étude scientifique « Marine Plastic Litters : the unanalyzed nano fraction »  publiée dans la revue Environmental Science, Nano de la « Royal Society of chemistry ». Etude réalisée par Julien Gigault, chercheur au CNRS Bordeaux, en collaboration avec Boris Pedrono, Benoit Maxit (Cordouan Technologies) et Alexandra Ter Halle, chercheur au CNRS IMRCP de Toulouse, qui montre l’urgence à préserver nos océans.

Un 7ème continent en formation constante

Le septième continent se forme actuellement entre les côtes du japon et de l’Amérique du Nord, à partir de millions de tonnes de détritus plastiques charriés par les courants océaniques. Dans cette région du globe, les courants tournent dans le sens des aiguilles d’une montre et créent une spirale interminable, un puissant vortex qui fait tourbillonner les déchets en plastique tout comme le vent le ferait avec des papiers dans le recoin d’une place. Le tourbillon subtropical du Pacifique Nord accumule depuis des années des déchets plastiques venus des côtes et des fleuves, les entraîne dans sa rotation et, par la force centripète, les ramène progressivement vers son centre, une zone de faible énergie cinétique de 3,43 millions de kilomètres carrés, soit un tiers de l’Europe et plus de six fois la France. Étant donné que la mer de déchets est translucide et se situe juste sous la surface de l’eau, elle n’est pas détectable sur les photographies prises par des satellites. Elle est seulement visible du pont des bateaux.
 
 
Sur l’essentiel de sa superficie, la couche de plastique de ce tourbillon d’ordures atteint une épaisseur pouvant aller jusqu’à 30 mètres.
Bien que représentant une importante superficie de l’océan, c’est une zone peu fréquentée par la navigation. Par définition, dans les eaux internationales, nul n’est contraint à s’engager dans une quelconque forme de dépollution : c’est là une explication possible de l’absence quasi-totale d’initiatives publiques consacrées à la question des macro déchets en pleine mer.

Le 7ème continent : micro et nano particules de déchets plastique 

Ce que montre l’étude de l’expédition 7ème continent c’est qu’après deux années de recherches en Atlantique Nord, nous savons que ce 7ème continent est une soupe de plastique composée de plusieurs millions de micro débris de plastique. Ces débris ne font pas plus d’un demi-centimètre. 

LIRE AUSSI DANS UP’ : Microplastiques dans l’océan : de véritables continents poubelles 

 
Une étude récente (M. Eriksen, PlosOne 2014) estime qu’au total cinq mille milliards de particules flottent dans nos océans. Des chercheurs ont également estimé (Jambeck, Science 2015) que sur les 300 millions de tonnes de plastique produites dans le monde chaque année, 8 millions de tonnes finissent piégées dans les gyres sub-tropicaux (tourbillons où les courants contribuent à concentrer les débris rejetés dans les eaux).  Sous l’effet de ces gyres océaniques, les déchets des quatre coins du monde s’accumulent en cinq principaux endroits du globe, dont la spectaculaire Grande plaque de déchets du Pacifique. « À l’image d’un puissant siphon marin, le vortex attirerait vers lui tous les résidus de notre société », vulgarise le site notre-planete.info. Avec des conséquences désastreuses pour les écosystèmes présents : « Dans cette zone la plupart des morceaux de plastique sont très petits. […] En fait ils ont la même taille que le plancton dont se nourrissent les poissons. Pire encore, en 2025 ce chiffre sera multiplié par 10 ; soit 80 millions de tonnes de plastique déversées chaque année dans les océans. »
 
Les débris de déchets plastiques de près d’un demi-centimètre, appelés micro plastiques, ont le plus attiré l’attention des chercheurs ces dernières années. Les micro plastiques résultent de la fragmentation des déchets plus gros. 
 
Micro plastiques – Crédit photo : Expédition 7èmeContinent VinciSato
 

En mer, les déchets en plastique se cassent sous l’effet du rayonnement solaire et de l’abrasion par les vagues. On ignorait dans quelle mesure ce processus de fragmentation se poursuivait car la fragmentation des micro plastiques conduit à des particules microscopiques qui sont extrêmement difficiles à collecter, à identifier et comptabiliser.
Après les récentes informations sur les micro particules de plastique constituant le 7ème continent, une nouvelle étude prouve la forte capacité de fragmentation des déchets plastiques en partiocules nano métriques.
Les chercheurs ont soumis les échantillons de micro plastiques collectés en Atlantique Nord par Expédition 7e Continent à un rayonnement solaire artificiel et ont rapidement observé une fragmentation des particules micrométriques en particules nano métriques. 
 
Les micro particules de plastique trouvées dans le 7e Continent se dégraderaient en nano particules 30 000 fois plus petites que l’épaisseur d’un cheveu.
Les chercheurs prouvent ainsi que la soupe de plastique du 7e Continent ne disparaît pas, mais qu’elle se fragmente. Ces nanoparticules sont plus mobiles que les plus gros fragments et seraient plus accessibles aux organismes.
De plus, les résultats de cette étude confirment la complexité des projets de ramassage en mer et l’importance de se mobiliser à terre pour changer les comportements afin d’éviter que ces déchets de plastique ne se trouvent dans la nature. 
 
L’enjeu de ces nano plastiques est lié à leur surface spécifique. En partant du postulat qu’une particule de plastique de quelques millimètres se fragmente en nano particules, une seule particule millimétrique peut former 1000 milliards de nano particules. Ainsi la surface totale de cette particule est multipliée par plusieurs dizaines de milliers. 
 
En sachant que la répartition des déchets plastiques dans l’océan est évaluée à plusieurs millions de km2, et considérant l’échelle nanométrique, cette surface spécifique s’élève à plusieurs milliards de km2, recouvrant ainsi en équivalence plus que la totalité de la surface de l’océan.
 
Une étape dans le devenir des plastiques en mer est franchie, ouvrant la porte à l’étude des impacts que peuvent avoir ces particules sur l’ensemble du monde marin. Il est important de poursuivre les travaux pour évaluer l’impact de ces particules sur les organismes vivants.
Mais pour Alexandra Ter Halle,  chercheur IMRCP-CNRS, responsable scientifique de l’expédition 7ème continent, « Ces particules peuvent affecter les animaux situés au sommet de la chaîne alimentaire. Les HAP sont toxiques pour les organismes aquatiques et cancérigènes pour les mammifères. Ce qui soulève une foule de questions. D’où viennent-ils ? Quels impacts peuvent-ils avoir sur le milieu marin ? Quelle est leur accumulation dans la chaîne alimentaire ? Nous n’en sommes qu’au début de ces recherches. Parallèlement aux études des composés chimiques, une biologiste étudie en laboratoire les bactéries qui vivent sur les paillettes. Cela rejoint les constatations de nos collègues américains l’an dernier sur ce qu’ils appellent «la plastique sphère». Chaque morceau de plastique est colonisé par du vivant, même des particules plus petites que le plancton, et nous ignorons tout de leur impact sur le milieu et pour l’espèce humaine ». 
 
Selon Julien Gigault, Chercheur CNRS au laboratoire EPOV, auteur de l’étude,  » Les nanoparticules, fer de lance des nanotechnologies, sont souvent étudiées et encensées pour leurs propriétés extraordinaires et la révolution technologique qu’elles représentent. Elles repoussent nos connaissances sur le fonctionnement de la matière et de notre environnement. Néanmoins les nanoparticules peuvent également être produites de manière non-intensionnelle par l’Homme et ses activités dont les rejets plastiques font malheureusement partie. Comme pour tout objet qui se dégrade, notre intuition nous a amenés à se demander si ces débris peuvent également produire des nano-débris. Nous nous sommes alors confrontés au challenge de la détection et de la caractérisation de nanoparticules directement dans le milieu d’étude. Nous avons donc décidé de relever le défi en développant, en partenariat avec la PME Cordouan Technologies, un réacteur permettant de mettre en évidence l’apparition de nano-plastiques sous rayonnement solaire. »
 
Pour Alexandra Ter Halle, « Il n’avait encore jamais été mis en évidence la présence de nano particules sur le 7e Continent. Mais ces travaux en laboratoire, à partir d’échantillons collectés dans le gyre de l’Atlantique Nord, démontrent que les micro plastiques qui sont déjà très dégradés après un séjour prolongé en mer peuvent produire des particules nanométriques.
Il reste encore beaucoup de travail pour détecter ces particules dans le milieu naturel ou pour évaluer la toxicité potentielle de ces nano particules. »
 
Pour Patrick Deixonne « Cette étude renforce notre connaissance sur le 7e Continent : elle permet aux scientifiques d’identifier de manière certaine un maillon de la chaine de dégradation du plastique et permet de mieux sensibiliser le grand public sur le devenir de nos déchets. Elle conforte notre idée qu’une fois dans les océans les solutions de ramassage des déchets sont technologiquement inadaptées. Cela renforce notre volonté d’agir en amont par la sensibilisation, la pédagogie et la mise en place de solutions pour éviter que nos déchets plastiques rejoignent inévitablement l’océan. »
 
 
 
 
(1) Surfrider Foundation Europe est une ONG environnementale créée en 1990 et qui œuvre pour la protection du littoral et des océans. Elle effectue un travail de recherche sur différentes problématiques (qualité de l’eau, déchets aquatiques, climat…), fait de l’éducation et du lobbying politique pour faire avancer sa cause. Après avoir obtenu l’interdiction des sacs plastiques à usage unique qui doit entrer en vigueur en France le 1er juillet 2016, Surfrider amorce cette année un travail sur les bouteilles plastiques. Le siège de l’association qui compte en France différents bureaux dont un à Bordeaux, est à Biarritz.
 

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