Si l’on ne corrige pas le cap des émissions de gaz à effet de serre, l’élévation du niveau des mers tel qu’annoncé par le GIEC ne sera pas d’un mètre en 2100 mais de beaucoup plus et peut-être plus vite que ce que l’on craignait. De plus, la modification de la circulation des courants océaniques à cause de la fonte des glaces polaires entraînera des perturbations climatiques extrêmes. C’est le constat alarmant que vient de publier le CNRS.
De nouvelles simulations ont été réalisées par une équipe internationale comprenant un chercheur du Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE/IPSL, CNRS / CEA / Université Versailles St-Quentin) afin d’étudier les conséquences d’une déstabilisation des calottes antarctique et groenlandaise sur le climat. Cette étude a conduit les chercheurs à revoir fortement à la hausse les risques climatiques associés. Ainsi, si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent au rythme actuel, la montée du niveau des mers pourrait atteindre plusieurs mètres dans plus de 100 ans.
Souhaitant évaluer l’impact d’une accélération de la fonte des glaces du Groenland et de l’Antarctique, les chercheurs d’une collaboration internationale comprenant un chercheur du LSCE ont réalisé de nouvelles simulations numériques du climat (à l’aide du modèle NASA-GISS) en réponse à différents scénarios de fonte liés à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Ces simulations ont été combinées à des observations de l’évolution climatique actuelle et à des reconstitutions des variations climatiques passées.
Les simulations réalisées montrent que si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent au rythme actuel, la fonte des glaces polaires pourrait altérer la circulation océanique mondiale en renforçant la stratification de l’océan Austral ce qui provoquerait un ralentissement de la formation d’eau profonde et plus généralement de la circulation méridienne de retournement (dite aussi circulation thermohaline).
Ces changements de circulation moduleraient la structure du réchauffement de surface de la Terre, avec une accélération du réchauffement dans les régions tropicales, et, à l’inverse, un refroidissement des eaux de surface de l’Atlantique Nord et de l’océan Austral. Ces modifications de la structure des changements de température de surface entraîneraient des modifications de la répartition des pluies dans la région intertropicale et pourraient favoriser la formation de tempêtes intenses dans l’Atlantique Nord.
Ces changements de circulation entraîneraient également un réchauffement des eaux de sub-surface sous les langues de glace flottantes de l’Antarctique, pouvant conduire à leur désintégration et donc à une accélération de la perte de masse de l’Antarctique.
Les chercheurs ont évalué le réalisme de ces mécanismes en tirant parti des connaissances sur différentes périodes passées. Il s’avère que les mécanismes précédents expliquent certaines caractéristiques des climats passés, comme le contrôle exercé par la circulation de l’océan Austral sur la concentration atmosphérique en dioxyde de carbone et ainsi sur le climat global et le niveau des mers. Ils sont aussi essentiels pour comprendre les variations climatiques au cours de la dernière période interglaciaire, lorsque le niveau des mers était de 6 à 9 mètres au-dessus du niveau actuel, avec des indications de tempêtes très violentes, alors que la température moyenne à la surface de la Terre était de moins de 1°C supérieure à la température actuelle : en agissant sur la circulation océanique de l’océan Atlantique, la fonte des glaces avait modifié les gradients de température de l’atmosphère et ainsi agi sur l’intensité des tempêtes.
La poursuite des émissions de gaz à effet de serre au cours de ce siècle pourrait donc entraîner une accélération de la montée du niveau des mers telle qu’elle pourrait conduire à une élévation de plusieurs mètres dans plus de 100 ans. Cette accélération pourrait limiter l’ampleur du réchauffement à la surface de la Terre, par la réorganisation des courants marins, tout en renforçant, dans certaines régions, l’intensité des tempêtes.
Ce résultat vient compléter ceux d’une autre étude récente qui portait sur la vulnérabilité de la calotte antarctique. À l’aide d’un modèle sophistiqué d’écoulement de la calotte antarctique, cette autre étude a montré une forte vulnérabilité de cette calotte à l’évolution du climat en cas de non diminution des émissions de gaz à effet de serre, concluant que les risques de montée du niveau de la mer au-delà de 2050 devaient être fortement revus à la hausse (Pollard – Conto, Nature, 2016).
Source : CNRS – Centre National de Recherche Scientifique – 28/04/2016
S’abonner
Connexion
0 Commentaires
Inline Feedbacks
View all comments