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La guerre en Ukraine fait craindre des désastres environnementaux, nucléaires et chimiques permanents

La guerre en Ukraine fait craindre des désastres environnementaux, nucléaires et chimiques permanents

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La guerre en Ukraine n’est pas celle d’un champ de bataille comme un autre. Non seulement elle cause des morts et des destructions primaires inconnues depuis 70 ans sur le sol européen, mais en plus, elle se déroule dans des régions où les risques environnementaux sont majeurs et pourraient marquer leur empreinte pendant des décennies dans l’écosystème de l’Europe.

Le spectre du nucléaire est là, menaçant, depuis les premières heures de la guerre en Ukraine. La prise de Tchernobyl d’abord, fait craindre pour la vieille centrale dont le réacteur est encore incandescent sous son sarcophage, et surtout les montagnes de déchets radioactifs qui sont entreposés depuis 1986 dans la zone critique. En prenant Tchernobyl, les Russes ont pris l’Europe en otage. Si un incident devait advenir dans cette région, il menacerait une grande partie du continent européen.

Menace de guerre nucléaire

L’autre menace nucléaire a été brandie ce samedi 27 février par le dictateur Poutine. Il a déclaré mettre en état d’alerte « la force de dissuasion de l’armée russe » faisant craindre le risque de guerre thermo-nucléaire. Cette décision, même si elle ressemble à une tactique rhétorique, a changé en un instant la nature de la guerre. Nous étions dans une guerre de type conventionnelle, nous sommes maintenant sous le risque d’une guerre thermo-nucléaire », analyse le général Vincent Desportes, ex-directeur de l’École de guerre. Il explique qu’à cause de cette décision, « les armées russes sont prêtes à délivrer des armes atomiques partout en Europe et aux États-Unis sur un simple ordre de Vladimir Poutine ». Le général ajoute : « Nous ne sommes plus dans un dialogue conventionnel, mais un dialogue nucléaire qui peut se terminer par la destruction du monde. »

Des propos qui font froid dans le dos mais ne sont pas partagés par tous les observateurs et spécialistes de la question. C’est le cas de Gaspard Schnitzler, chercheur sur les questions de défense à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), pour qui cette mise en alerte est « surtout une stratégie de communication ». Quoi qu’il en soit, la menace existe et n’est pas nouvelle dans le discours de Poutine dont la grille de lecture du monde est volontiers apocalyptique.

Mais la menace du nucléaire militaire russe, si elle plane dans nos esprits, n’est pas la seule menace qui hante cette crise ukrainienne. Les experts craignent en effet que les bombardements russes, notamment dans la région du Donbass, cette région séparatiste occupée par la Russie dans l’est de la nation, n’entraînent des dommages environnementaux durables.

Menace d’accidents nucléaires

« L’est de l’Ukraine est fortement industrialisé, avec de nombreuses usines chimiques, des mines désaffectées et des centrales thermiques. Le risque de voir une catastrophe environnementale s’ajouter à l’horrible crise humanitaire est énorme », a déclaré Richard Pearshouse, responsable des questions de crise et d’environnement à Amnesty International à Genève.

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L’Ukraine abrite 15 réacteurs nucléaires répartis sur quatre centrales qui fournissent environ la moitié de ses besoins en énergie. Si elles étaient frappées, elles pourraient libérer des déchets radioactifs qui contamineraient la région pendant des milliers d’années.  Parmi ces installations figure la plus grande centrale nucléaire d’Europe, la centrale de Zaporizhzhia, qui se trouve à environ 200 km à l’ouest de la zone de combat du Donbass et se situe directement sur la ligne de front du conflit. Une attaque contre elle causerait des dommages environnementaux inconnus, sans compter qu’elle menacerait directement la sécurité énergétique du pays (la centrale fournit environ un quart de l’approvisionnement global en électricité de l’Ukraine).

« Transformer l’Ukraine en un paysage dystopique, jalonné de zones d’exclusion radioactives, serait une méthode extrême pour obtenir la zone défensive que semble vouloir le président russe Vladimir Poutine. La gestion d’une crise migratoire massive centrée sur l’Occident et d’un nettoyage environnemental absorberait l’Europe pendant des années », a averti dans Forbes, Craig Hooper, du cabinet de conseil en sécurité nationale Themistocles AG.

Charbon toxique

Le Donbass compte à lui seul 900 mines de charbon et mines métallurgiques, actives ou non, qui ont dégradé la qualité de l’air et répandu des toxines dans les réserves d’eau locales. Des images satellites capturées par la société britannique d’analyse spatiale Terra Motion entre 2015 et 2020 montrent des mines abandonnées dans la région se gonflant d’eau, résultat de la négligence du régime séparatiste, selon David Gee, agent technique principal de la société. Les toxines provenant des mines abandonnées sont censées être régulièrement éliminées et traitées afin d’éviter que la mine ne soit inondée de manière incontrôlée, a expliqué M. Gee. Comme ce n’est pas le cas, un certain nombre d’entre elles se remplissent d’eau et pourraient se déverser dans les rivières voisines à tout moment.

Le Donbass est une « bombe à retardement toxique », a écrit Wim Zwijnenburg, chef de projet de désarmement humanitaire à PAX, une organisation néerlandaise pour la paix, dans Bellingcat en 2017. Dans une interview à Motherboard, il a noté que l’Ukraine a, ces dernières années, versé de l’argent pour répondre aux préoccupations environnementales dans la région, et que ces investissements ont « maintenant été annulés. » « Nous sommes maintenant dans le noir en ce qui concerne le risque d’inondation des mines, en ce qui concerne les déchets toxiques et radioactifs, nous sommes maintenant dans le noir pour savoir qui s’occupe de toutes ces usines, et il y a probablement des experts travaillant dans ces usines chimiques qui sont maintenant en train de fuir ou qui vont être tués. »

Les inondations autour des mines du Donbass, théâtre d’années de combats entre la Russie et l’Ukraine, alimentent depuis longtemps la crainte d’un « second Tchernobyl », rapporte The Telegraph. La mine de charbon de Yunkom, en particulier, a été inondée par l’armée russe en 2018 – une action dont le département d’État américain a averti à l’époque qu’elle « menacerait l’eau potable de milliers d’Ukrainiens dans l’est de l’Ukraine contrôlé par la Russie. »

Une évaluation de la Banque mondiale de 2015 sur les risques environnementaux dans la région hautement industrielle a estimé que 10 à 20 mines avaient été inondées lors du conflit armé, « causant potentiellement des dommages environnementaux massifs dans la région. » Les attaques contre certaines centrales électriques ont également provoqué le déversement de brut et la libération de toxines dans l’air et les cours d’eau à proximité. Le document identifie le Donbass comme l’une des régions les plus polluées d’Ukraine. « La crise actuelle ne fera qu’aggraver tout cela », regrette Kristina Hook, professeur adjoint de gestion des conflits à l’université d’État de Kennesaw, qui étudie les retombées environnementales du conflit en Ukraine.

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En octobre 2020, la chercheuse a développé un outil pour analyser les risques environnementaux dans les zones de guerre en utilisant l’Ukraine comme étude de cas : Le conflit armé dans la seule région du Donbass causerait plus de 11 000 décès, entraînerait près de 2 millions de personnes déplacées et laisserait 4,4 millions de personnes dans le besoin d’une aide humanitaire, écrit-elle dans un article. Les menaces environnementales s’ajoutent à ces préjudices d’une manière difficile à quantifier, mais qui sera probablement permanente si l’on n’y remédie pas.

« En raison de la persistance des polluants dans les écosystèmes, ils resteront actifs et nocifs dans le Donbass et dans l’écosystème mondial, même si la paix est instaurée », écrit Mme Hook dans son article. Les Ukrainiens continueront à souffrir et à incarner littéralement ces dommages pendant des décennies.

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