Reconnaître le fascisme d’Umberto Eco – Éditions Grasset / Collection Les cahiers rouges, août 2025 – 64 pages
Paru en Italie en 1997 dans un volume d’essais intitulé Cinq questions de morale, traduit chez Grasset en 2000, Reconnaître le fascisme est un texte d’une extrême actualité : le témoignage lucide et terrible d’un des plus grands intellectuels du XXe siècle, qui a grandi dans l’Italie de Mussolini.
Quatorze. Tel est le nombre des caractéristiques qui permettent de déterminer si une idéologie, un mouvement, une société sont fascistes, selon Umberto Eco. Il y a les plus évidentes : la haine de la culture, l’obsession du complot, le refus de l’étranger. D’autres, plus insidieuses, bénignes en apparence, aboutissent au même résultat si l’on n’y prend garde : la peur du langage complexe, l’idée d’un peuple doté d’une volonté propre, le fait de considérer les désaccords comme des trahisons.
Les sociétés démocratiques sont-elles à l’abri d’un retour du fascisme ? Non, dit Umberto Eco, qui nous met en garde contre le masque innocent que prendra le fascisme pour revenir au pouvoir. « Ce serait tellement plus confortable si quelqu’un s’avançait sur la scène du monde pour dire : « Je veux rouvrir Auschwitz, je veux que les chemises noires reviennent parader dans les rues italiennes ! Hélas, la vie n’est pas aussi simple. » Les clés pour débusquer et combattre une idéologie mortifère.
Ce qui fait la force de ce texte, c’est précisément le refus d’Umberto Eco d’enfermer le fascisme dans une période ou une forme historique unique. En décrivant un « fascisme éternel », polymorphe et adaptable, il montre que celui-ci peut renaître au cœur même des régimes démocratiques, non par un coup de force spectaculaire, mais par l’érosion progressive de l’esprit critique, du pluralisme et de la raison.
Reconnaître le fascisme n’est donc pas seulement un essai de mémoire ou d’histoire : c’est un outil d’analyse politique et morale, une invitation à la vigilance intellectuelle et citoyenne. En cela, le texte demeure essentiel pour comprendre les dérives contemporaines et rappeler que la démocratie n’est jamais acquise, mais toujours à défendre.





