Greenpeace France et L’ObSoCo publient les résultats d’un baromètre* visant à analyser les pratiques touristiques des jeunes Français au regard des enjeux environnementaux et notamment leur rapport à l’avion. Une majorité de jeunes est prête à remettre en question son rapport au voyage par souci écologique. Selon cette enquête, les jeunes souhaitent continuer à voyager mais différemment : voyager moins souvent en avion, rester plus longtemps sur place, remplacer l’avion par le train lorsque celui-ci est accessible, s’ouvrir à d’autres pratiques de voyage…
Si l’avion reste un moyen de transport apprécié car il permet de s’évader vers des destinations lointaines, cette étude met en lumière une large adhésion à la nécessité de réduire les vols de loisirs, dans un contexte d’urgence climatique.
Cette jeunesse préoccupée par le dérèglement climatique et prête à changer son mode de vie : 80% des jeunes interrogés pensent que la situation est très préoccupante ou dramatique et qu’il est urgent d’agir pour le climat, et 76% reconnaissent la nécessité d’opérer des changements importants ou radicaux dans nos modes de vie. À cet égard, 52% déclarent avoir déjà intégré l’environnement dans leurs comportements de consommation.
Seule une minorité prend souvent l’avion
Une majorité de jeunes (53%) ne prend pas, ou très rarement l’avion pour ses loisirs. À l’inverse, un tiers le prend régulièrement (plus d’une fois par an), et 16% de manière occasionnelle (une fois tous les deux à trois ans). Les personnes très diplômées (> bac+4) et celles habitant l’agglomération parisienne, sont particulièrement nombreuses à prendre l’avion au moins deux fois par an pour leurs loisirs (respectivement 27% et 25% contre 14% des jeunes en moyenne).
Cette observation est à mettre en parallèle avec les résultats de l’Étude Nationale Transport et Déplacement 2008, qui montrent que les personnes aisées et les Franciliens ont plus souvent recours à l’avion. C’est aussi ce que révèlent les travaux des sociologues Yoann Demoli et Jeanne Subtil, selon lesquels l’avion s’est bien moins démocratisé qu’on ne l’imagine. Pour ces deux chercheurs, on assiste à une “multiplication des voyages plutôt qu’une multiplication des voyageurs.”
Une disposition à moins prendre l’avion par souci environnemental…
Les jeunes sont prêts à limiter leurs vols de loisirs et 70% considèrent que le développement du réseau ferroviaire leur permettrait de diminuer leur recours à l’avion. Le train est en effet de loin la première alternative à l’avion envisagée (à 60%), devant la voiture (36%). Agnès Crozet, Secrétaire générale de L’ObSoCo fait observer que cette étude montre « une réelle appétence des jeunes pour des alternatives aux destinations lointaines et plus largement aux voyages en avion. » Le train, et notamment le train de nuit, apparaît en effet comme l’alternative la plus crédible et efficace, même pour les voyages longs. Il est en outre associé à des imaginaires positifs (ralentissement du rythme de vie, découverte de paysages, romantisme, etc.) qu’il serait intéressant de développer.
81% sont prêts à agir sur leurs pratiques touristiques pour des raisons environnementales. L’idée de partir moins souvent, quitte à rester plus longtemps sur place, est plébiscitée par 3 jeunes sur 4.
Les trois-quarts (74%) des jeunes interrogés soutiennent l’idée que les vols de loisirs doivent rester exceptionnels : l’idée de partir tous les ans en voyage en avion est minoritaire. Et même chez les jeunes qui prennent régulièrement l’avion, cette idée est dominante : 56% chez les personnes qui le prennent 2 à 3 fois par an et 71% chez celles qui le prennent tous les ans. Il en ressort qu’une majorité de jeunes Français est prête à réduire ses voyages en avion.
… mais une pollution des voyages en avion largement sous-estimée
Si les jeunes savent que prendre l’avion pollue, rares sont ceux qui savent à quel point l’empreinte carbone de chaque passager est élevée. Près de 80% déclarent ne pas savoir qu’un seul long-courrier est en mesure de consommer tout le budget carbone d’un individu. Un aller-retour à Rio de Janeiro produit pourtant 2,8 tonnes équivalent CO2 pour chaque passager. Cela représente ce que chaque être humain devrait émettre par année d’ici 2030, pour espérer rester sous les 1,5 degré de réchauffement.
De la même manière, l’évaluation de l’efficacité des différentes actions individuelles est imprécise. 24% des jeunes identifient les vacances en avion comme particulièrement néfastes pour le climat, contre 40% pour les emballages et déchets. Pour les jeunes qui prennent l’avion, réduire la fréquence de ces vols a pourtant un impact climatique bien plus puissant encore que la réduction et le tri des déchets.
Ce constat est à mettre en relation avec les efforts des compagnies aériennes pour minimiser l’impact de leurs vols sur le climat. Une moitié des répondants pense ainsi que la compensation carbone permettrait de voyager sans polluer (une idée souvent induite par les compagnies), alors que ces initiatives ne permettent pas de réduire les émissions liées à l’aviation. Parmi les solutions proposées, 61% des jeunes sont en faveur d’une « loi Evin climat », qui signifie l’interdiction pure et simple de la publicité des secteurs les plus polluants, comme l’aérien.
Une jeunesse encline à voyager moins loin
Le coût du trajet est un critère décisif dans le choix des destinations de vacances. Pour 38% des jeunes interrogés, le coût du trajet est un élément déterminant pour choisir leur destination de vacances. C’est le deuxième critère le plus cité après le cadre naturel (44%). Au vu de l’importance du critère de coût révélé dans cette étude, les avantages fiscaux offerts au secteur aérien, qui pénalisent des modes de transport moins polluants comme le train, apparaissent d’autant plus antinomiques avec la lutte contre le changement climatique. Parmi les solutions évoquées, celle d’offrir un billet de train à chaque jeune de 20 ans pour pouvoir voyager gratuitement en Europe est plébiscitée à 78%.
Les jeunes n’ont pas besoin d’avion pour ressentir du dépaysement
Sept jeunes sur 10 estiment qu’il n’est pas nécessaire de prendre l’avion pour être dépaysé et 88% qu’il est possible de passer de bonnes vacances sans prendre l’avion. Ces constats se retrouvent également en resserrant la focale uniquement sur les jeunes qui prennent l’avion : 63% pour le premier item et 86% pour le deuxième. Si 89% pensent que la France et ses pays frontaliers regorgent d’endroits magnifiques à découvrir, pour 53%, la France et les pays limitrophes sont même le lieu de vacances idéal et 59% pourraient voyager moins loin pour leurs loisirs afin de limiter l’impact de leurs voyages sur l’environnement.
Selon Alexis Chailloux, responsable engagement citoyen chez Greenpeace France : « Cette étude montre une adhésion de principe des jeunes à la nécessité de réduire la fréquence des vols de loisirs. C’est une excellente nouvelle, qui confirme que le changement de norme sociale est déjà enclenché sur cette tranche d’âge. Il est indispensable de repenser notre rapport au voyage pour continuer à découvrir le monde sans exploser notre budget carbone. Il manque désormais une volonté politique pour prendre les mesures qui s’imposent pour réguler le transport aérien et rendre les alternatives moins émettrices, comme le train, plus accessibles et plus attractives. »
* Les données présentées dans ce sondage sont issues d’une enquête réalisée en ligne par L’ObSoCo pour Greenpeace France, du 17 au 29 décembre 2021 auprès d’un échantillon de 1200 personnes représentatif de la population de France métropolitaine âgée de 18 à 34 ans.
Bien évidemment, il y a aujourd’hui un problème avec le trafic aérien, qui est énorme et exponentiel depuis 20 ans. Et il faut réduire drastiquement les lignes aériennes lorsque celles-ci peuvent être compensées par des moyens de transport qui, actuellement, sont moins énergivores. Cela dit, le postulat de base consistant à fustiger un moyen de transport ou un autre est une manière médiocre et simpliste de poser le problème du climat. Il ne s’est jamais vu nulle part que l’humanité relevait les défis qui se présentaient à elle en revenant en arrière. Si l’on s’en tient à l’aspect technique et… Lire la suite »