Le projet révolutionnaire imaginé par le navigateur Yvan Bourgnon rentre dans une nouvelle phase. Après un an et demi d’études de faisabilité et de recherche de financements, le navigateur-aventurier franco-suisse dévoile une maquette de la version finale d’un navire inédit à la pointe de l’innovation, le MANTA, collecteur de déchets plastiques en mer. Avec un objectif ambitieux : collecter jusqu’à 250 tonnes de déchets plastiques par sortie marine. Première mise à l’eau : 2022.
Comment lutter contre une catastrophe écologique planétaire : réduire la pollution plastique des océans ? Quand on sait que 9 millions de tonnes de déchets plastiques sont jetés dans les mers par an ; que 1 million d’oiseaux est tué par an ; que 100 000 mammifères marins sont tués chaque année ; que plus de 1400 espèces marines sont déjà impactées ; que 70 % des déchets flottants finissent par couler au bout d’un an et qu’il faut 450 ans pour qu’une bouteille plastique se dégrade, … Tout cela entraîne aussi des conséquences importantes sur la santé humaine (Stérilité, perturbations hormonales, troubles de la croissance…) et sur l’activité économique des pays (dégradation de l’activité touristique côtière, destruction des ressources halieutiques…).
C’est un nouveau défi fou que s’est lancé Yvan Bourgnon, vainqueur de la Transat en double Jacques-Vabre 1997 avec son frère Laurent, lui-même double vainqueur de la Route du Rhum en 1994 et 1998, disparu depuis en Polynésie française en 2015.
Sa traversée réussie en été 2017 entre l’Alaska et le Groënland a fait de lui le premier « voileux » à relier le Pacifique à l’Atlantique par cette voie. C’est dire si les défis ne lui font pas peur …
Yvan Bourgnon
Le navigateur aventurier, Président de l’association The SeaCleaners créée en septembre 2016 qui a pour objectif de lutter contre la pollution océanique, a dévoilé ce lundi 9 avril en avant-première la maquette au 1/80e du « Manta », futur quadrimaran géant collecteur de déchets plastiques dans les océans. Seul le projet avait déjà été présenté à la COP22, à Marrakech, au Maroc.
Ce navire révolutionnaire combinera les énergies renouvelables pour atteindre une autonomie totale, et accueillera en son sein une véritable usine de tri, compression et stockage des déchets plastiques récoltés (plus de 250 tonnes de déchets pourront être stockées dans ses coques avant d’être rapatriées sur terre).
Depuis le succès de la campagne de crowdfunding de décembre 2016, The SeaCleaners tient ses promesses. Ce mode de financement participatif avait permis à l’association de récolter 150 000 €, soit quasiment le double de la somme initialement envisagée. Depuis, plus de 3000 heures d’études ont pu être menées par 6 bureaux d’études, dont les spécialistes ont fait évoluer le projet pour le mettre en phase avec la réalité du terrain. Le résultat de cette première phase de travail permet aujourd’hui de dévoiler la version finale du navire avec une maquette au 1/80e qui présentera la combinaison inédite et impressionnante des technologies embarquées sur le premier Quadrimaran collecteur de déchets marins.
Un géant des mers contre la pollution : 70 mètres de long, 49 mètres de large, 61 mètres de haut. Le Manta utilisera des outils à la pointe de la technologie afin de sortir les macro-déchets plastiques flottants avant qu’ils ne se dégradent et polluent irréversiblement la biodiversité marine.
Pour cela, une véritable usine sera embarquée à bord pour collecter, trier, compacter et stocker les déchets plastiques. Trois collecteurs seront installés entre les coques du navire sous la forme de tapis roulants pour remonter rapidement de grandes quantités de plastiques. Le Manta sera capable de stocker plus de 250 tonnes de déchets dans ses coques avant de les rapatrier sur terre où ils seront pris en charge par des centres de recyclages adaptés.
Au-delà de sa mission de nettoyage des océans, le MANTA est en lui-même un pari technologique sans précédent. La propulsion et l’autonomie énergétique du navire sont deux enjeux fondamentaux du projet.
C’est dans une optique d’innovation toujours plus poussée que le MANTA sera alimenté par plusieurs sources d’énergie renouvelable. Il sera propulsé par quatre gréements DynaRig et quatre moteurs électriques. Pour les alimenter, il embarquera plusieurs technologies combinées de production d’énergie renouvelable associées à un système de stockage énergétique optimisé. 2000 m2 de panneaux solaires vont ainsi être installés sur le pont du quadrimaran et deux éoliennes verticales utiliseront la force du vent pour produire de l’électricité. De quoi permettre au MANTA d’être autonome dans ses phases de déplacement et de collecte et de pouvoir se déplacer sur toutes les zones de forte densité de pollution (estuaires, zones côtières…).
La bataille contre la pollution des océans se mène sur tous les fronts et se remporte également à terre. Il est essentiel de remonter à la source de la pollution afin de réduire en amont la consommation de plastique et son gaspillage. Le MANTA servira de base au développement d’actions de sensibilisation à destination des populations les plus impactées par la pollution plastique. C’est d’ailleurs la dimension la plus essentielle de cette mission écologique.
Dans la même lignée, ce projet est destiné à devenir un levier de l’économie circulaire. Les plastiques collectés constitueront la base d’une dynamique d’économie locale et circulaire. Le Manta permettra d’initier ou de développer des initiatives de transformation des déchets en matière première et de dynamiser l’économie des pays où s’effectueront les collectes.
L’association poursuit également un but scientifique d’observation et d’analyse. Chaque collecte sera géolocalisée, quantifiée et qualifiée grâce à la mise en place d’un véritable laboratoire à bord du navire. Toutes les données seront ensuite publiées en Open Data afin d’en permettre l’accès à toute la communauté internationale.
Selon Yvan Bourgnon, une centaine de Manta serait nécessaire pour ramasser l’ensemble des plastiques de ce « 8ème continent », ainsi nommé par les chercheurs car 95 % des macro-plastiques se concentrent sur 5 % des surfaces maritimes. Selon une étude publiée dans la revue Scientific Reports du jeudi 22 mars 2018, la taille de ce vortex serait 4 à 16 fois supérieure à ce que laissait penser les précédentes recherches : environ 1,6 million de km2, soit trois fois la taille de la France. Et il augmente selon eux « de façon exponentielle ».
Programme du projet :
2018 : Études de faisabilité – Cahier des charges technique – Tests techniques en simulateurs – Partenariats financiers
2019 : Choix du chantier naval – Début de la construction – Partenariats financiers
2020 : Construction du navire – Partenariats financiers
2021 : Fin de la construction – Mise à l’eau du bateau – Essais techniques
2022 : Premières missions de collecte
Pour aller plus loin :
– Livre « Conquérant des glaces. De l’Alaska au Groenland à la voile en solitaire » de Yvan Bourgnon – Editions Arthaud, Mars 2018
– Film de Yvan Bourgnon « En Equilibre sur l’océan »
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