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architecture

Habiter mieux, habiter plus au Pavillon de l’Arsenal

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Il s’invente aujourd’hui à Paris de nouvelles architectures du logement. Ces immeubles collectifs à peine livrés ou encore en projet explorent par nécessité ou opportunité des situations urbaines inédites. Ce faisant, ils questionnent les formes traditionnelles de l’habitat et leur fabrication. Certains expérimentent également des stratégies de construction décarbonées, d’autres anticipent les modes de vie de demain ou interrogent la notion même de propriété. Il faut construire mieux et consommer moins, pour habiter plus et habiter mieux.
A découvrir au Pavillon de l’Arsenal jusqu’au 2 septembre 2018.
 
L’exposition Habiter Mieux Habiter Plus souhaite mettre à la portée de tous ces enjeux par la présentation de maquettes, films, interviews, prototypes, perspectives et plans d’une soixantaine d’architectures classées selon les questions qu’elles soulèvent.
Où fabriquer les logements du Paris de demain ? Casernes, couvents, garages, bureaux, l’immeuble du futur est-il déjà là ? Peut-on encore inventer de nouveaux fonciers ? Comment construire mieux pour consommer moins ? Terrasses, balcons, loggias peut-on offrir plus d’espaces extérieurs et rester sobre ? L’appartement peut-il évoluer avec les rythmes de vie ? Et, si les programmes solidaires préfiguraient les logements du futur ?  Colocation, cohabitation, copropriété à quoi ressemblera l’appartement à l’heure de l’économie du partage ?
 
Alors que Paris compte déjà 120 millions de mètres carrés bâtis dont 77 millions (1) pour l’habitat, les politiques actuelles et les appels à projets des maîtres d’ouvrage et aménageurs publics incitent à nouveau les concepteurs à inventer les logis de leur temps. L’enjeu est de convoquer d’autres espaces à habiter car la pression de la demande rejoint le défi du foncier.
Casernes abandonnées, bureaux obsolètes, garages inutilisés, églises désacralisées : si l’immeuble de demain existe peut-être déjà pour partie, chaque transformation offre l’opportunité de redécouvrir des patrimoines oubliés, de rouvrir des sites, de partager des cours, et ainsi de participer à la vie de la cité. La ville durable préfère la réhabilitation au neuf, dont le bilan carbone serait dix fois moins impactant (2).
Elle privilégie aussi la mixité et l’intensité. Sur les toits, au-dessus des entrepôts et ateliers, en couverture des emprises routières ou ferroviaires, l’évolution des techniques et des mobilités révèle des fonciers jusqu’alors délaissés. Les accords signés par la Ville avec la SNCF ou la RATP en témoignent. Ils engagent la construction à terme de plus de 16200 logements, dont au moins 50% d’habitat social (3). La diversité des situations se conjugue avec l’ambition de répondre aux besoins et aspirations de chacun. Internat, résidence étudiante, habitat participatif ou intergénérationnel, mais aussi maison relais, foyer, colocation, hébergement d’urgence : les typologies ouvertes et adaptables développées pour les logements spécifiques semblent annoncer l’habitat de demain.
Les modèles préfigurent la diminution de l’espace privé au profit de lieux plus collectifs ou la mise en œuvre de services partagés associés à l’offre immobilière. À l’échelle de l’immeuble, jardins, toitures partagés, buanderie ou locaux associatifs se multiplient ; à l’échelle de l’appartement, balcons, terrasses et loggias.
Selon une récente enquête d’opinion (4), la question de la luminosité arrive en tête des critères de choix immobiliers, et 59% des sondés rêvent d’un balcon ou d’une terrasse. Certains programmes présentés lors de cette exposition annoncent jusqu’à 20 m2 d’espace extérieur par logement. Ils rappellent et actualisent les modèles modernes de l’immeuble-villa du début du XXe siècle.
 
Chercher plus d’extérieur appropriable se construit avec une attention renouvelée aux matériaux dans le respect des enjeux énergétiques. Pierre, paille, chanvre, bois : l’immeuble parisien retrouve et réinterprète ses matières d’origine pour éviter les excès de la modernité. Depuis le vote du conseil de Paris en juillet 2016, l’ambition est de réduire la consommation du bâti à 40 kWh ep/m2/an.
Ainsi, les logements du futur présentés dans l’exposition consommeront cinq fois moins que les immeubles des Trente Glorieuses (5) et quatre fois moins que ceux de la fin du siècle dernier.
 
La volonté publique interpelle aussi les us du chantier, qu’il s’agisse des temporalités ou des procédés techniques utilisés. Par le recours aux filières sèches, à la préfabrication, aux matériaux de réemploi ou biosourcés, nombre d’acteurs aspirent à réduire les 13,5 kg de déchets inertes produits par la construction d’1 m2 de logement (6) et s’orientent vers de nouveaux process, alors que le sable vient à manquer.

LIRE DANS UP’ : Le sable nous a filé entre les doigts. Bientôt il n’y en aura plus.

Paris comptait au dernier recensement plus de 1362182 logements (7), davantage qu’à n’importe quelle époque de son histoire. Rapporté à la population, le ratio de 1,6 personne/logement est le plus avantageux, toutes périodes confondues. La surface moyenne de logement par personne, passée de 26,5 à 31 m2 à Paris, progresse. Le logement insalubre est résorbé depuis 2010, et Paris doit atteindre 30% de logement social en 2030.
Mais, au-delà des chiffres, l’équation est globale. En 2005, la chercheuse québécoise Louise Dandurand démontrait que l’innovation technologique et l’innovation sociale sont complémentaires. « La diversité des acteurs et des usages, la complexité des processus, l’importance des réglementations impliquent des processus non linéaires dans une démarche partagée de résolution des problématiques (8). »
 
Le défi du logement à Paris relève bien de cette double ambition, solidaire et technologique. Il revient alors aux architectes, depuis plus d’un siècle à l’origine de la réflexion pour de meilleurs logements, d’inventer, au sein d’équipes pluridisciplinaires avec les maîtres d’œuvre, promoteurs et constructeurs, des lieux plus vertueux, plus généreux. L’exposition Habiter Plus-Habiter Mieux souhaite mettre ces enjeux à la portée de tous, en présentant une soixantaine de projets classés selon les questions qu’ils soulèvent dans l’habitat au quotidien.
 

LE LOGEMENT À PARIS CHRONIQUE DE DEUX SIÈCLES MILITANTS
Si, jusqu’à la fin du XIXe siècle, on parle de « maisons » à propos des constructions accueillant des habitations (individuelles ou collectives), la notion de maison locative apparaît dès 1670 avec l’ensemble de la rue de la Ferronnerie (1er). Bientôt appelé « maison à loyer », ce type de logement se développe tout au long du XVIIIe siècle. Paris devient alors un espace urbain dominé par la figure de l’immeuble, qui structure son remarquable développement au siècle suivant. Le rythme de la construction reste cependant inférieur aux attentes des Parisiens, dont le niveau de confort demeure largement insuffisant. La spectaculaire croissance de la population parisienne, puis l’annexion de la « petite banlieue » en 1860 provoquent un retard chronique en matière de logement, constat dressé jusque dans les années 1950 par nombre d’observateurs. Si les grands travaux conduits par le préfet Haussmann contribuent à diffuser les éléments de confort, des pans entiers du territoire parisien ne bénéficient pas de cette modernisation. C’est au XXe siècle que la notion de politique du logement prend corps : les fondations philanthropiques d’abord, puis la Ville de Paris et l’État multiplient les initiatives et les lois pour endiguer la crise du logement. Plus largement, remédier à une hygiène urbaine déficiente s’avère l’un des défis majeurs à relever pour tous ceux qui cherchent à agir sur le destin de la capitale. Devenu une priorité, le logement est l’instrument privilégié de la modernisation de Paris, notamment avec les rénovations urbaines des années 1960- 1975 et la généralisation des tours et des barres. Il demeure une préoccupation majeure au XXIe siècle, conjuguée à l’émergence d’un urbanisme écoresponsable et attentif à la continuité urbaine.
Simon Texier, Historien de l’architecture, professeur à l’université de Picardie-Jules Verne

 

Quelques exemples

 
 
PROGRAMME MIXTE DANS L’ANCIENNE CASERNE DES MINIMES 2, rue de Béarn – Paris 3e
Aujourd’hui, la caserne forme un îlot fermé. Le rendre accessible est une opportunité qui nous est apparue évidente. Nous proposons de créer des porosités urbaines dans le soubassement, tout en préservant l’effet d’enceinte hérité de l’histoire, écrin, selon les saisons et l’heure, d’un Biergarten, d’un jardin de fraîcheur ou d’une simple cour. Par son intimité, cet espace offre un lieu de rencontre atypique dans le Marais. Les ateliers et le restaurant font le trait d’union avec le reste du quartier. Traversants, ils habitent l’îlot d’une urbanité mixte et conviviale qui joue avec les temporalités de la ville. Le volet social nous a permis d’investir le projet d’une grande diversité de logements, qui entrent en résonance pour faire de ce lieu un véritable morceau de ville.
rh+ architecture
Maîtrise d’œuvre : rh+ architecture/ OLM paysagistes/Cotec, BET TCE/ Altia, BET acoustique
Livraison : 2019
 
 
87 LOGEMENTS SOCIAUX DANS L’ANCIEN SIÈGE DE L’INPI 26-26 bis, rue de Saint-Pétersbourg & 73, rue d’Amsterdam – Paris 8e
L’îlot contient sept immeubles juxtaposés construits à différentes époques (1880, 1930, 1940, 1990…), constituant un ensemble dont les constructions ont obstrué les anciennes cours. Le repérage est difficile, la lecture du site également. La présence du végétal est rare; avec une emprise au sol des bâtiments de plus de 90%, il reste peu d’espaces libres. Le projet permet d’agir sur cette densité forte pour en faire un atout. La recomposition globale du site fera la part belle aux espaces de respiration. Le but est de restituer une lisibilité à cet ensemble surdensifié et de dégager des cours et des vues. Les prospects respectueux et agréables retrouvés favorisent l’accueil de logements sociaux. Naud & Poux architectes
Maîtrise d’œuvre : Naud & Poux architectes / Atec / Oasiis / Rabot-Dutilleul
Livraison : 2019
 
13 LOGEMENTS SOCIAUX DANS L’ANCIENNE ANTENNE PÔLE EMPLOI 2, cité Charles-Godon – Paris 9e
 
Pour sa nouvelle vie, l’ancienne antenne Pôle Emploi laisse place à des logements sociaux. Le bâtiment historique qui abritait le Mont-de-Piété de la Ville de Paris est surélevé de deux niveaux en recul successif et étendu dans la cour en gradins ouverts. La cour créée est arborée et les terrasses accueillent des îlots de verdure. Les façades nouvelles sont habillées de panneaux composites ciment/ verre texturés, encadrant des baies largement dimensionnées en bois. Sur rue, les rythmes verticaux et horizontaux répondent aux modénatures existantes. Sur cour, l’ensemble est d’une composition plus libre répondant au contexte singulier de ce petit îlot. La moitié des logements sont traversants et les derniers étages développent des logements familiaux en duplex.
Ellenamehl Architectes
Maîtrise d’œuvre : ellenamehl Architectes / GEC Ingénierie
Livraison : 2020
 
 
 
 
 
 
 
LOGEMENTS ÉTUDIANTS ET JEUNES TRAVAILLEURS DANS UNE CONSTRUCTION BOIS Porte Brancion – Paris 15e / Vanves
Pour répondre à l’enchevêtrement anarchique d’infrastructures et de constructions de natures différentes de la porte Brancion, nous avons choisi de concilier multiplicité des programmes avec simplicité volumétrique et sobriété architectonique. Ce projet de reconquête urbaine crée une respiration visuelle pour « poser » le rapport du passant à la ville, afin que la porte Brancion devienne un véritable lieu, urbain et humain. Les trois bâtiments (logements étudiants, résidence pour jeunes travailleurs et équipement sportif) dialoguent pour recréer, selon un schéma orthogonal classique, une forme d’intériorité qui servira de base à un espace public praticable et apaisé. Interface métropolitaine multi-orientée, l’architecture, ouverte à son environnement, rend visibles les usages collectifs à l’intérieur des bâtiments.
Hardel Le Bihan architectes
Maîtrise d’œuvre : Hardel Le Bihan architectes / Terrell, structure / Pouget consultants, BET HQE / Le Sommer Environnement / Aïda, BET acoustique / 8’18’’, lumière
Livraison : 2020
 
 

LE PREMIER IMMEUBLE NUDGE AU MONDE Avenue de France, ZAC Paris Rive Gauche, lots M9B1- M9B2 – secteur Masséna-Chevaleret – Paris 13e
Un immeuble nudge, c’est offrir un large panel de modularité des logements et du bâtiment pour répondre et s’adapter aux parcours de vie délinéarisés du XXIe siècle. C’est enrichir et agrandir l’espace existant entre le logement et la ville, entre le privé et le public. Ce que l’on nommait autrefois parties communes devient un prolongement de chez soi pour son bienêtre, son accomplissement et son projet de vie. C’est bâtir un immeuble qui réduit l’empreinte carbone, car totalement en bois, vertueux et efficace pour s’ouvrir largement sur la ville. Clairement inscrit dans le contexte de l’avenue de France, ce village vertical enveloppe en son sein, telle une agora, des commerces équitables et solidaires, sous une enveloppe végétale poétique. Les nudges réunissent, traduisent et stimulent tout en donnant vie aux aspirations des habitants de l’immeuble.
Catherine Dormoy Architecte & AAVP Architecture
Maîtrise d’œuvre : Catherine Dormoy Architecte / AAVP Architecture / David Besson-Girard, paysagiste / Franck Boutté Consultants / Betrec / Batiserf / Avel Acoustique / BMF, BET / Malte Martin et 1024 Architecture, artistes
Livraison : 2020
 

Commissariat général de l’exposition
Alexandre Labasse, architecte, Directeur général
Marianne Carrega, architecte, Adjointe au Directeur général et responsable du mécénat
Kim Lê, Sophie Jacquin, Adrien Taraki et Camelia Petre, architectes, Commissaires d’exposition Antonella Casellato, documentaliste, Responsable du centre de documentation, avec Claire Deambrogio, documentaliste et Emeline Houssard
Julien Pansu, architecte, Directeur de la communication, du multimédia et du développement des publics, avec Enora Cordier, Estelle Petit et Thomas Landi
 
Conception graphique : Sylvain Enguehard
 
Exposition présentée jusqu’au 2 septembre 2018 au Pavillon de l’Arsenal – 21, bld Morland – Paris 4e
Entrée libre du mardi au dimanche de 11h à 19h
 
1. Étude Atelier parisien d’urbanisme (Apur).
2. Une construction tertiaire neuve en béton affiche 128 kg équivalent carbone/m²; la rénovation lourde n’atteint que de 5 à 10 kg/m².
3. RATP : 2000 logements dont 50% sociaux ; SNCF : 14200 logements dont 60% sociaux.
4. Étude Century 21, 2016.
5. Étude Apur. Estimation avec une fourchette de ±50 kWh/m²/an selon les configurations morphologiques des constructions.
6. Parmi les 13,5 kg de déchets inertes figurent : 5,7 kg de déchets non dangereux, 0,45 kg de métal, 1,8 kg de plâtre, 1,3 kg de bois, 0,25 kg d’emballage. Conseil régional d’Île-de-France, « Avis sur l’avant-projet de Predec – Plan régional de prévention et de gestion des déchets issus des chantiers du Bâtiment et des Travaux publics », septembre 2013.
7. Donnée Apur, recensement 2014.
8. Louise Dandurand, « Réflexion autour du concept d’innovation sociale, approche historique et comparative», Revue française d’administration publique, n°115, 2005/3, p. 377-382.

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