BILLET D’HUMEUR
Les politiques sont rentrés de vacances. Université d’été par ci, meetings et réunions par-là, petites phrases forgées pour réveiller les médias à peine sortis de leur léthargie estivale, grosses ficelles et minables manœuvres en vue des prochaines élections, beaucoup de clapotis devant micros et caméras pour éviter savamment le sujet qui fâche. Le vrai, le méga sujet de notre époque, celui qui obère tous les autres : l’urgence climatique.
Nous sortons d’un été comme nous n’en n’avons jamais connu, fait de records et de tempêtes, de coups de chaud et de sécheresses. Jamais la production agricole, celle des fruits et légumes qui garnissent d’ordinaire nos tables n’a été aussi rachitique. 90 % des vignes du bordelais sont à jeter à la poubelle. Les habitants des villes, enfermés dans leurs habitats d’un autre temps se demandent comment ils vivront demain s’il fait encore plus chaud. Les riverains des rivières regardent leur cours familier comme une menace paradoxale : trop et c’est l’inondation, pas assez et c’est l’aridité. Aux quatre coins du monde, les voyants sont au rouge : l’hémisphère Sud brûle en plein hiver, les calottes glaciaires ne cessent de fondre, les forêts s’étiolent asphyxiées, la faune marine ou terrestre compte ses derniers survivants, l’effondrement des récoltes fait dresser le spectre de la famine en Inde comme en Afrique et ailleurs.
Les scientifiques spécialistes du climat n’ont plus de voix à force de crier. Quand ils parviennent encore à murmurer l’alerte, c’est au milieu de la tempête de vociférations des réseaux dénialistes et climatosceptiques. Dehors oiseaux de mauvais augures ! leur crie-t-on. Insultes et menaces pleuvent dans les réseaux dits sociaux, quant aux commentaires du moindre propos évoquant le sujet climatique, ils sont marqués du sceau des contrevérités quand ce n’est de l’imbécillité la plus crasse.
Pendant ce temps, de quoi nous parlent les politiques dans leur rentrée ? Du rappeur Médine trouble-fête des Verts, de Ségolène Royal comme porte-drapeau de la prochaine Gauche adoubée du bout des doigts par le grand marabout Mélenchon, des dents de Gérald Darmanin raclant les parquets élyséens, de Ciotti qui rêve d’un Wauquiez-Président toutes les nuits. Quant à l’extrême droite, elle est la seule à parler vraiment de la crise climatique mais pour dire qu’il n’y a pas suffisamment crise pour enquiquiner les Français. Le président Macron se concentre sur les grandes eaux diplomatiques, tout en esquivant les sujets brûlants comme le sommet sur le sort de l’Amazonie qu’il a séché, préférant peaufiner son bronzage au fort de Brégançon.
Tout va donc bien Madame la marquise au royaume de la politique. Les grands courants atlantiques qui forment notre climat peuvent s’effondrer, le jet-stream apportant au gré de ses ondulations déréglées canicules et tempêtes peut faire ses caprices, les émissions de gaz à effet de serre, source de tous nos maux, peuvent continuer à croître malgré toutes les promesses, tout cela n’a pas d’importance. Ce qui compte, c’est la tenue des écoliers pour la prochaine rentrée et non leur condition d’habitabilité dans leurs classes, c’est la perspective des prochains Jeux Olympiques et la question brûlante : nagera-t-on dans la Seine ?
Comment s’étonner alors de la vague de déni climatique qui gagne la France ? Comment expliquer la baisse de crédit de la plupart des personnalités politiques et s’indigner de l’énormité de la masse des abstentionnistes aux élections ? La vie politique française joue avec le feu : en refusant d’affronter ou au moins d’évoquer l’enjeu existentiel majeur qui menace chaque citoyen, les politiques de tous bords anesthésient les capacités de résistance et d’adaptation devant le risque de toute la population. Ils tendent un écran de distractions empêchant d’aller au fond des réalités pour assurer la survie de nos enfants. Ils veulent que nous restions à la surface des choses, comme des bouchons flotteurs frivoles. Triez votre poubelle et dormez en paix, bonnes gens.
Entièrement d’accord avec vous. Cette rentrées est d’une pauvreté incroyable ! Les canicules successives asséchent les cerveaux, mais vivifient les carrières politiques toujours plus à droite; De quoi décourager les plus offensifs. Dans les conversations avec les élus, mes voisins, mes amis, mes compagnon-nes, de lutte, ressort la peur du changement climatique, certains se disent eco-anxieux, et pourtant, ils sont pris dans cette force d’inertie de l’avant qui les maintient dans les mêmes paradigmes, les mêmes réflexes. Quand un investissement est à faire, se pose-t-on la question de savoir s’il va favoriser le changeemnt climatique, quel sera son impact sur… Lire la suite »