Au détour des couloirs et des alcôves, là où la ville retient son souffle, surgit une autre manière d’habiter le monde. Animaux dans la Ville invite à rêver Paris comme un territoire partagé, où le vivant circule librement entre pierres, arbres et passants. De l’audace visionnaire d’Andrea Branzi aux utopies urbaines de Stefano Boeri, se tisse une fable contemporaine : celle d’une métropole qui réapprend à écouter les présences discrètes, à accueillir l’inattendu, à laisser l’animal — réel ou imaginaire — réenchanter le quotidien. Ici, l’architecture devient dialogue, et la modernité s’ouvre enfin à la pluralité du monde.
Après Chantier de Yann Kebbi, et Interdit au public d’Alain Guiraudie, la Fondation Cartier pour l’art contemporain et la RATP dévoilent Animaux dans la Ville, un projet artistique inédit d’Andrea Branzi et Stefano Boeri, en dialogue avec les alcôves de la galerie Valois. Car c’est au cœur d’un lieu singulier que se dévoile l’exposition. Niché sous le tumulte de la ville, la galerie Valois s’étire comme un secret ancien, un corridor où résonne encore l’élégance d’un Paris disparu. Entre les lignes 1 et 7 du métro, elle déroule ses motifs floraux, vestiges délicats d’un Art nouveau qui fleurit dans la pénombre du métro. Autrefois passage vibrant menant aux Grands Magasins du Louvre, elle demeure un seuil, un souffle d’histoire glissé sous les pas pressés des voyageurs. Aujourd’hui, la RATP et la Fondation Cartier y réinventent le dialogue entre patrimoine et création, faisant de cette artère souterraine un écrin inattendu où la mémoire accueille le mouvement, et où l’avenir s’éclaire d’une lueur doucement rétro.
Si l’exposition prend place ici, dans le souffle discret de la galerie Valois, c’est qu’elle trouve naturellement écho dans cette artère souterraine où se croisent chaque jour des milliers de pas, de regards et d’histoires. Depuis plus de quarante ans, la Fondation Cartier pour l’art contemporain cultive le dialogue et l’expérience, ouvrant l’art à toutes ses formes et à tous les horizons. Fidèle à son esprit d’exploration, elle tisse des ponts entre les disciplines, les sensibilités, les mondes et sa Collection, façonnée au fil des expositions, reflète ces résonances multiples avec les enjeux contemporains. Avec l’ouverture en octobre de ses nouveaux espaces au 2, place du Palais-Royal, face au Louvre, dans un bâtiment haussmannien réinventé par Jean Nouvel, la Fondation prolonge son geste d’ouverture en investissant un lieu qui porte déjà en lui un souffle d’histoire et de mouvement.
Les espaces de transport parisiens sont depuis toujours des terrains fertiles pour la rencontre : des passages où l’art, offert à tous, peut surgir comme une lueur au cœur du quotidien. La RATP, à travers son engagement patrimonial et culturel, cherche à enrichir le voyage, à y glisser des moments de surprise et de contemplation. Sa politique culturelle, ouverte aux expressions les plus variées, affirme le désir de faire circuler la création avec la même fluidité que les voyageurs, afin que chacun puisse, au détour d’un couloir, rencontrer un fragment d’imaginaire.

L’exposition présente trois étapes d’une réflexion menée par l’architecte et designer Andrea Branzi et l’architecte et urbaniste Stefano Boeri.
En 2008, répondant à la demande du gouvernement français de trouver de nouvelles idées pour le Grand Paris, ils proposent de lâcher des animaux au cœur de la capitale, afin d’envisager une métropole qui ne soit plus uniquement pensée pour les humains. Andrea Branzi explique alors : « la présence d’animaux libres dans un tissu urbain crée une sorte de réduction du stress ».
Entre 2014 et 2016, avec les architectes Michele Brunello et Azzurra Muzzonigro, Boeri prolonge cette réflexion dans un atelier avec leurs étudiants du Politecnico di Milan (Italie), consacré à l’étude des comportements animaux en milieu urbain et à la conception de dispositifs architecturaux pour leur intégration dans la ville de Milan.
Enfin, en 2023, Branzi revient sur ce projet dans une série de collages où apparaissent, au milieu de sites parisiens familiers, des présences animales incongrues. Dans une approche singulière et pleine d’humour, Branzi esquisse une nouvelle vision de la modernité, ouverte à la pluralité du vivant.
Andrea Branzi
Andrea Branzi (1938–2023) fut l’un des chefs de file de l’architecture et du design radical italien en tant que membre d’Archizoom, Studio Alchimia et Memphis. En 1985, il crée Animali Domestici, une série de meubles qui associent bois brut et éléments fabriqués industriellement.
Ce travail introduit des fragments de nature au cœur du domestique et marque durablement l’histoire du design. Opposé au rationalisme moderne, Branzi a orienté son travail vers une réflexion anthropologique, explorant les origines de l’expérience humaine et la possibilité d’une cohabitation élargie entre humains et autres formes de vie.
En partenariat avec Triennale Milano, la Fondation Cartier consacrera à l’architecte et designer, disparu en 2023, une nouvelle exposition personnelle en 2026.
Stefano Boeri
Stefano Boeri, architecte et urbaniste, est professeur au Politecnico di Milano et directeur du Future City Lab à Shanghai. Célèbre pour le Bosco Verticale, il explore les implications géopolitiques et environnementales des phénomènes urbains et l’intégration de la biodiversité dans les villes.
Président de Triennale Milano depuis 2018, il a reçu un doctorat honoris causa de l’Université de Milano-Bicocca ainsi que le prix UN SDG Action Award pour son approche « Green Obsession ».
Exposition « Animaux dans la ville » jusqu’au 28 février 2026 – Galerie Valois, métro Palais-Royal – Musée du Louvre
Photo d’en-tête : Andrea Branzi, Animaux dans la ville, 2023 © ADAGP, Paris, 2025 © Leone Locatelli et Bernardo Migone







