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Comment instrumentaliser la recherche de l’innovation ?

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Pilotage et performance stratégique : gestion du changement et de l’innovation.

‘Innovation’: 400 millions de références sur Google, nombre qui augmente apparemment de plus de 10% par mois. Ce sujet figure systématiquement à la ‘une’ des revues dévolues au Management et il est traité en profondeur par des publications spécialisées et au sein de nombreux forums fonctionnant sous forme d’‘ideagora’ , ‘unconference’ ou ‘crowdsourcing’.. . Mode, conséquence de la crise, nouvelles pressions concurrentielles, émergence de nouvelles méthodes de management ? Le changement peut être anticipé mais l’innovation (différenciation, diversification) ? Comment la susciter et la piloter ?

L’innovation n’est évidemment pas un nouveau paradigme, tout spécialement dans le secteur des biens de consommation, condamné depuis des décennies à renouveler sans cesse sa gamme de produits, pas nécessairement pour créer ou répondre à de nouveaux besoins et se différencier mais souvent uniquement pour maintenir sa notoriété..: le nouveau Txx lave encore plus blanc, la Zz est encore plus performante, la guerre des smartphones et des tablettes tactiles…

Cette ‘révolution de l’innovation’ touche les sociétés de services soumises à des pressions concurrentielles croissantes, qui les incitent à donner une dimension réellement stratégique à cet objectif ; la bataille de la compétitivité s’est intensifiée sur ce terrain, d’où la nécessité d’instrumentaliser l’approche et appliquer de nouvelles techniques de management. Nous formons des MBA, le moment semble venu de se doter de MBI : Master of Business Innovation ou de ‘CIO’ comme ‘Chief innovation officer’.

Une nouvelle dynamique est en marche… et comme souvent, les principaux courants de pensée semblent venir de Boston, s’infiltrant grâce à Internet, aux réseaux sociaux et aux nombreux forums qui les accompagnent. Un consensus global se dégage sur l’importance de l’innovation permanente mais il subsiste, dans beaucoup d’entreprises, de nombreuses interrogations sur la manière de piloter cette démarche : approche méthodique, empirique, heuristique ?

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Définitions et postulats

L’innovation doit être une composante de la stratégie globale de l’entreprise. Elle doit donc être cadrée dans un schéma directeur, une ‘vision’, destinés à orienter les recherches, brider les imaginations et assurer la cohérence globale des projets. Même si certaines entreprises peuvent être tentées de sortir de leur core-business (par exemple une banque vendant des prestations informatiques), l’innovation doit servir un objectif stratégique global, suffisamment détaillé (chiffré), qui peut se définir en : parts de marché, CA par client, rentabilité, diversification (produits/segments), changement d’image et de valeurs…

Une entreprise ne peut dépasser ses concurrents en les imitant mais bien en innovant. Pour être innovant, un produit ou un service doit posséder des caractéristiques uniques auxquelles le client attache de la valeur et qui sont difficiles à recopier. L’art pour l’art ne sert à rien et, sauf à essayer de breveter systématiquement vos ‘inventions’, la seule manière de se protéger temporairement des plagiats est par le coût et/ou la complexité des solutions.

L’innovation est indispensable pour palier au vieillissement des processus, de tout type : logiciels, procédures… Le changement est généralement imposé par la conjoncture alors que l’innovation est déterminée par votre stratégie d’entreprise ; l’un et l’autre peuvent être incrémental ou radical. Le changement imprévu affaiblit souvent les processus : il faut travailler dans l’urgence, changer les priorités, accepter des compromis techniques ou organisationnels…A titre d’exemple, une adaptation de logiciel ou de procédure non planifiée peut dégrader la belle structure linéaire et cartésienne mise en place à l’origine.

Les résistances au changement

L’innovation peut être perçue comme une menace lorsqu’elle peut amener une entreprise à changer son ‘business model’ et ses valeurs. La culture du résultat à court terme inhibe la prise de risques sur des investissements à la rentabilité incertaine ou lointaine. L’aversion au risque est mieux rémunérée que l’innovation. Les procédures budgétaires laissent peu de place à la R&D. Le changement, quel qu’il soit, est déstabilisant et sa facilité de mise en œuvre repose en premier lieu sur l’adhésion du personnel : l’être humain a une propension à accepter plus facilement la rénovation incrémentale que l’innovation radicale.

Les défis

Un objectif stratégique difficile à cerner. Beaucoup d’entreprises comptent sur le hasard (‘serendipity’) ou la pression des clients alors que innovation et diversification sont indispensables pour rester concurrentiel, réduire les menaces, conquérir de nouveaux marchés mais également conserver vos clients existants auxquels vous donnez ainsi des gages de votre volonté de continuer à élargir votre offre de services, ce qui leur permettra de préserver leur propre compétitivité !

Sélectionner les bonnes propositions d’innovation. La technique du ‘crowdsourcing’ (boîte à suggestions dans votre Intranet) peut facilement provoquer une overdose d’informations. La bande passante des décideurs n’est pas extensible à l’infini et il y a donc lieu de mettre en place des processus visant à ce que les propositions soient décrites de manière structurée, avec le niveau suffisant de justifications et d’abstraction.

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La prise de risques. Personne n’a la boule de cristal. Lorsqu’une idée surgit, il est difficile de prédire si elle va réellement déboucher sur une amélioration radicale ou si elle va simplement enfanter un microscopique changement incrémental.

La gestion du changement : la réactivité face à des crises, des appels d’offre…

Les leviers d’innovation et de changement

Il n’existe pas de réelles ‘machine à inventer’ mais le changement et l’innovation peuvent être suscités et pilotés de multiples façons. L’appropriation par le CEO et un soutien sans faille du Management sont des prérequis incontournables. L’innovation devrait figurer à l’agenda de tous les Comités de Direction.

Un changement culturel. Les projets d’innovation n’ont que peu de chance de succès si la culture de l’entreprise ne s’y prête pas. Une culture d’innovation va (doit !) attirer et retenir des nouveaux talents ; bien souvent elle permet de redynamiser un ‘business model’ et une organisation sans nécessairement devoir tout réinventer. La communication est essentielle.

Prise de risques. Une culture de ‘venture capital’. L’échec est acceptable s’il est formateur. Une politique d’innovation doit s’apprécier dans sa globalité et non pas sur une initiative en particulier. Le prototypage permet de valider un concept à des coûts acceptables. Accorder une large autonomie opérationnelle pour le lancement de nouveaux produits: accepter temporairement des coûts de structure en créant de nouveaux pôles de compétence dotés d’une forte autonomie décisionnelle, en attendant que le produit arrive à maturité.

Une meilleure compréhension des besoins des clients et la recherche de services complémentaires. C’est évidemment un point clé. A titre d’exemple, si un gestionnaire de portefeuilles souhaite obtenir un tableau prévisionnel de liquidités, c’est évidemment parce qu’il veut optimiser sa position de trésorerie et il est donc nécessaire de consolider dans ce tableau tous les flux financiers prévus, même pour des opérations non encore dénouées, en faisant éventuellement un distinguo entre le certain et l’incertain…. Un partenariat avec un client-pilote est toujours un excellent levier du fait qu’il garantit l’adéquation avec les besoins de celui-ci. Si ce client possède la notoriété suffisante, celle-ci rejaillira sur le nouveau service. Les meilleures solutions innovantes sont celles qui permettent au client de réduire les coûts marginaux et de structure de certaines activités sortant de son core-business, en les externalisant chez vous. Le monde financier recèle beaucoup d’opportunités de ce type, par exemple dans l’acquisition et le contrôle des données financières.

 

Récompense et appropriation : lorsqu’un projet d’innovation est retenu, le créateur doit en être récompensé. Vous risquez des déceptions si vous pensez que les contributeurs (clients ou membres du personnel) sont uniquement guidés par le sens du devoir. Cette rémunération peut prendre diverses formes : financière, feedback, notoriété…Comme pour les processus, il faut ensuite un ‘sponsor’ dont la compétence est reconnue et qui possède un réseau suffisamment fort pour promouvoir cette innovation et entretenir la dynamique. La désignation d’un responsable de processus produit également des effets très bénéfiques sur ce dernier, du fait que son propriétaire va s’attacher à le faire évoluer, tant sur le plan de l’efficience opérationnelle que de la valeur créée.

Ideagora, think tanks, groupes de réflexion : équipes multidisciplinaires et diversifiées sur le plan culturel, éducatif, forums, ‘boîtes à suggestions’ (crowdsourcing) dans votre Intranet. La méthode Lean Six-Sigma propose une technique d’amélioration rapide appelée ‘Kaizen’ et qui consiste à séquestrer un groupe correctement étoffé en termes de compétences pour améliorer un processus ou un service. L’expérience a montré l’influence très stimulante de cette technique sur la créativité des participants. Internet évoque également des ‘unconferences’ dans lesquelles l’agenda et les thèmes sont définis par l’auditoire : ce mode de fonctionnement peut être un bon incubateur du fait d’une plus grande liberté de parole (absence de barrières hiérarchiques) et diversité mais bien entendu il faut des modérateurs et un processus de recensement des suggestions.

Collecte, sélection et formalisation des propositions. Tous ces outils collaboratifs vont immanquablement engendrer des flux énormes d’informations qu’il s’agit de canaliser, filtrer, agréger (si nécessaire, par exemple pour éviter les redondances) et structurer (synthétiser). Des techniques simples permettent d’opérer très en aval pour imposer un minimum de formalisme dans la description d’une nouvelle proposition : typologie, impacts, ROI… et faciliter ainsi la découverte des pépites.

Les méthodes de recherches de l’innovation

Malgré son caractère heuristique, une approche systématique est possible, selon au moins quatre axes :

– Analyse de marchés. Effectuer un recensement des besoins et déterminer leur taux de satisfaction, afin d’identifier des niches qui pourraient être autant d’opportunités : absence de concurrents, nouveaux entrants…
– Analyse comparative de votre business model avec celui de vos principaux concurrents.
– Analyse de l’utilisation des services existants. Les entreprises n’ont pas toujours conscience de la richesse de leur portefeuille de services lequel recèle peut-être des gisements sous-exploités pouvant être commercialisés à moindre coût et plus rapidement que des projets très novateurs encore à l’état d’épure.
– Analyse prospective visant à anticiper les changements importants dans quelque dimension que ce soit : légale, économique, fiscale… Il ne saurait y avoir de réelles surprises sur les événements qui touchent l’entreprise. Vous ne savez pas nécessairement quand les changements vont se poursuivre mais vous en connaissez les caractéristiques principales. La ‘veille’ commerciale, technologique, politique, fiscale… permet de préparer le terrain en définissant un plan, en mettant en place une ‘force d’intervention rapide’ (par exemple un ‘project ou programme office’) et enfin, en promouvant une culture de projet.

Conclusions & Plan d’action : Plan Directeur, Processus, Pilotage Stratégique…

L’innovation peut porter sur les produits, les services, les segments de clientèle… mais aussi sur vos valeurs, votre image, la qualité… Autant de gisements pouvant augmenter votre chiffre d’affaires. Une stratégie de différenciation réussie reposera logiquement sur les 4 piliers suivants au moins :

Une vision, un objectif stratégique matérialisé dans un Plan Directeur précisant les objectifs, les opportunités, les changements ‘radicaux’ que vous souhaitez provoquer (nouveaux marketing mix, basculement d’une stratégie de domination par les coûts pour la qualité, amélioration d’image…), les moyens que vous voulez allouer pour gérer ces ‘transitions’ (outils, compétences, ressources financières et humaines, processus, indicateurs, management…).

Engagement fort du CEO et du Management, s’appuyant éventuellement sur un CIO (I comme innovation) ou son CIO (I comme Information). L’innovation devrait figurer à l’agenda de tous les Comités de Direction, de manière à susciter des ‘tensions créatives’ à ce niveau.

Mobilisation de l’intelligence collective. Créer un terreau fertile pour faire surgir des nouvelles idées : idéagoras réunissant des équipes multidisciplinaires, changements culturels (génétiques), valorisation des inventeurs et appropriation. Communication soutenue, vers le personnel et vers les clients.

Pilotage stratégique. L’innovation est donc une composante stratégique qui exige d’être pilotée comme telle : tableaux de bord, indicateurs (Key Innovation Indicators ?). Mise en place de processus permettant de collecter, filtrer, structurer, évaluer de manière objective les propositions d’innovation… et les mettre facilement et rapidement en œuvre, pour en tirer le meilleur profit, le plus vite et le plus longtemps possible

PS : tous les sujets esquissés dans cet article (et bien d’autres) sont développés dans le livreCap sur la Performance Stratégique (4/2011). Un module de formation est également proposé en partenariat avec la société Get-Training( www.get-training.org )

Bernard Timmermans. Consultant Indépendant./ 28 aôut 2013 – www.strategic-pilot.com

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