La « fast fashion », aujourd’hui omniprésente, n’a pourtant vu le jour qu’à la fin des années 80. Bien qu’il soit difficile de le croire, la façon dont les marques produisent toujours plus vite et toujours plus de vêtements bon marché est un phénomène relativement récent. D’une certaine manière, l’émergence de la « fast fashion » semblait inévitable. Après tout, la mode ne consiste-t-elle pas à adopter les dernières tendances, qu’elles se trouvent dans les pages de Vogue ou sur Instagram ? Pour autant, cette évolution des habitudes de consommations n’est pas sans impact pour la planète.
L’impact de l’industrie de la mode sur la planète
Selon la Fondation Ellen Macarthur, les consommateurs perdent chaque année 460 milliards de dollars en jetant des vêtements qu’ils pourraient continuer à porter, certains vêtements étant jetés après seulement sept à dix utilisations. Plus choquant encore, la Banque Mondiale estime que 40 % des vêtements achetés dans certains pays ne sont jamais utilisés. L’impact de ces déchets sur la planète est énorme et les façons dont ils nuisent à l’environnement sont variées. Le même rapport révèle également que l’industrie de la mode est responsable de 10 % des émissions annuelles mondiales de carbone, soit plus que tous les vols internationaux et le transport maritime réunis. Si la tendance se poursuit, les émissions de gaz à effet de serre de cette industrie augmenteront de plus de 50 % d’ici à 2030. Il est donc urgent que les choses changent. Les consommateurs comme les industriels semblent prêts à relever le défi.
Les moteurs du changement
Les préoccupations environnementales ne sont pas les seuls motivateurs du changement. Les enjeux liés à la chaîne d’approvisionnement, l’inflation et la pénurie de personnel dans le secteur entraînent une augmentation des coûts alors même que les clients sont de plus en plus sensibles aux prix. Dans ce contexte, toujours plus de personnes se tournent vers des vêtements vintages.
Face à ces bouleversements, comment le secteur de la mode doit-il réagir ? Un modèle commercial plus éthique est-il vraiment possible ? Et quels sont les outils et les technologies nécessaires pour faciliter ces nouvelles façons de vendre ?
La technologie au cœur du changement
La technologie est parfois tenue pour responsable de l’essor de la « fast fashion ». Après tout, c’est bien elle qui a permis aux entreprises de rationaliser leurs chaînes d’approvisionnement et de vendre toujours plus. Mais paradoxalement, c’est aussi la technologie qui rend possible des achats plus éthiques.
En effet, il y a quelques années, l’achat de vêtements d’occasion impliquait généralement des heures de recherche pour trouver un article particulier. Aujourd’hui, les sites de revente en ligne tels que Vinted et Vestiaire Collective ont rendu le processus rapide et simple. Ces sites connaissent une croissance impressionnante : Vinted a vu ses ventes augmenter de 37 %, au cours des neufs premiers mois de l’année 2022 alors que le reste du secteur était en difficulté.
Les vendeurs traditionnels cherchent à diversifier leurs propres modèles pour tirer parti de l’intérêt accru des consommateurs pour les articles de seconde main. Carrefour a élargi son offre en ligne et revend désormais des articles d’occasion et Ikea dispose maintenant d’une section seconde main. Le changement est en marche et les entreprises doivent se préparer à cette transformation.
Un catalyseur de transformation
D’un point de vue humain, ce changement demande une réelle réflexion car l’acheminement du stock vers l’entrepôt dans le bon état, au bon endroit et au bon prix, requiert des compétences différentes de celles requises avec une chaîne d’approvisionnement traditionnelle. Compte tenu de ces changements, les fiches de poste devront être repensées et les systèmes de rémunération modifiés. Une formation continue sera mise en place pour les nouveaux collaborateurs et les collaborateurs existants afin d’assurer la même qualité de service et de conseil qu’auparavant.
Concernant les budgets et les prévisions, tous les modèles préétablis seront à revoir car aucune donnée sur le sujet n’existe. Par conséquent, les informations en temps réel sur la chaîne d’approvisionnement et les ventes deviendront essentielles pour aider les entreprises à établir des prévisions à court et long terme.
Reste maintenant à savoir si les marques sont simplement en train de tâter le terrain ou d’élaborer de nouvelles et réelles stratégies. Mais une chose est sûre : ces nouveaux modèles nécessitent des compétences, processus et outils différents. Les entreprises innovantes doivent créer des solutions qui leur permettront de capitaliser sur des modèles commerciaux circulaires, augmentant ainsi considérablement leurs chances de succès à l’avenir. Le moment est venu pour les entreprises de s’engager dans l’économie circulaire.
Laurent Homeyer, Industry Advisor, Retail and Hospitality chez Workday