Regardez le monde
avec les yeux ouverts

Inscrit ou abonné ?
CONNEXION

UP', média libre
grâce à ses lecteurs
Je rejoins

rejoignez gratuitement le cercle des lecteurs de UP’

transition énergétique
/

Une politique monétaire au service de l’investissement européen et du climat

Commencez

Dans sa note d’analyse « Une proposition pour financer l’investissement bas carbone en Europe », France Stratégie propose un dispositif d’intermédiation financière, gagée sur le carbone, qui permettrait à l’Europe de donner une direction bas carbone à la croissance future et de renforcer ainsi son leadership historique sur les questions climatiques. L’étude définit aussi les conditions de sortie de la stagnation en Europe et de résolution de l’insuffisance des investissements dans la transition énergétique par une politique ciblée d’achat d’actifs par la banque centrale.

L’année 2015 sera marquée pour l’Europe par une double urgence : celle d’agir contre le réchauffement climatique et celle de sortir du marasme économique. Aujourd’hui, ces deux débats se déroulent séparément :
− dans le strict cadre des négociations climat qui doivent déboucher sur un accord à la fin de l’année à Paris ;
− dans le contexte du plan européen d’investissement annoncé par Jean-Claude Juncker et d’une politique de rachat d’actifs par la Banque centrale européenne (BCE) pour éviter la spirale déflationniste et stimuler la reprise des investissements.
Cette note d’analyse propose un cadre d’action commun à ces deux problématiques.

L’histoire des négociations internationales sur le climat montre qu’il est très difficile de faire émerger un prix du carbone. Si en théorie, la taxe carbone et le système de quotas d’émissions sont les meilleurs instruments pour faire payer le prix de l’externalité induite par chaque unité de CO2 émise, en pratique, la mise en œuvre de la politique climatique se heurte, à court terme, à une forte opposition sociale de la part des ménages et des entreprises, pour qui elle se traduira par des surcoûts importants.
Afin de circonvenir cette opposition et à la fois de mieux lisser les efforts tout en s’engageant de façon crédible sur la voie de la transition, cette note propose de rendre éligibles à la politique de rachat d’actifs par la BCE des titres privés dont l’impact bas carbone avéré aura été préalablement garanti par la puissance publique. En effet, en se limitant pour l’essentiel au rachat de titres émis sur le marché secondaire, la BCE risque de n’influer qu’indirectement sur les nouveaux investissements et donc sur l’ampleur et la qualité de la croissance. Le mécanisme proposé implique au contraire un financement dirigé vers de nouveaux investissements, bas carbone qui plus est, garants ainsi d’une reprise plus rapide mais aussi plus durable.
Ce dispositif permettrait de donner une direction bas carbone au volet investissement de la stratégie de sortie de crise européenne.

L’originalité de la proposition repose sur l’implication conjointe de la puissance publique et du secteur privé pour envoyer un signal sur une valeur du carbone d’emblée élevée de manière à guider les nouveaux investissements en l’absence (temporaire) d’un prix du carbone adéquat. Cela permet de rentabiliser les nouveaux investissements bas carbone sans pénaliser immédiatement le stock de capital. Cela a aussi pour effet d’influer immédiatement sur les décisions d’investissement tout en permettant une montée en puissance progressive du prix carbone. De plus, Les États sont aussi fortement incités à mettre en place des mécanismes de tarification du carbone afin que la garantie qu’ils apportent sur la valeur des actifs carbone soit neutre pour le budget public.
Cette proposition d’intermédiation financière gagée sur le carbone repose sur cinq grands principes :

1. Définir une valeur sociale du carbone (VSC)

Il ne s’agit ni d’un prix qui se fixe sur un marché du carbone, ni d’une taxe incorporée dans le prix des marchandises courantes. C’est un prix théorique défini comme la valeur d’une tonne d’équivalent CO2 évitée. Les estimations disponibles sur la VSC indiquent un large spectre de valeurs qui dépendent d’un nombre élevé de paramètres. C’est donc le gouvernement qui doit in fine en décider le niveau.

Pourquoi ne pas profiter d’une lecture illimitée de UP’ ? Abonnez-vous à partir de 1.90 € par semaine.

2. Déterminer un volume total d’investissements bas carbone dont la valeur est garantie par l’État

Chaque État détermine la contribution nationale à la stratégie internationale de réduction des émissions carbone en s’engageant à garantir un montant global d’investissements permettant d’atteindre cet objectif national. La valeur garantie de chaque projet d’investissement bas carbone correspond aux émissions économisées sur la base de la valeur sociale du carbone (VSC).

3. Certifier les réductions d’émissions

Un organisme indépendant assure le contrôle a posteriori des émissions carbone économisées par chaque projet. Cette institution définit une typologie de projets bas carbone et des méthodologies d’évaluation des réductions d’émissions selon les technologies concernées, les secteurs et les horizons temporels des projets. De cette manière, les investisseurs privés peuvent anticiper la valeur carbone de leurs projets et en déduire la garantie publique qui leur sera apportée.

4. Inscrire les actifs carbone au bilan de l’institution monétaire

La banque centrale s’engage à refinancer les prêts délivrés par les banques commerciales pour financer les investissements bas carbone. La garantie de la banque centrale s’applique à hauteur de la valeur des réductions d’émissions effectivement réalisées par les projets, définie par la VSC.

5. Rediriger l’épargne de long terme vers les investissements bas carbone

En plus de la mobilisation du canal du crédit bancaire, le dispositif monétaire offre un levier pour rediriger l’épargne vers les investissements bas carbone. Le fait que la banque centrale accepte de « payer » à sa valeur sociale les réductions d’émissions apporte une garantie suffisante pour concevoir, via des fonds spécialisés, une gamme de produits financiers, de type « obligations vertes », sûrs et donc bien notés.
Par le jeu des taxes et quotas, la puissance publique gère la montée graduelle du prix du carbone de telle sorte qu’elle reste tolérable pour les investissements existants intensifs en carbone mais génère à terme un revenu suffisant pour honorer la garantie publique sur les certificats carbone.

Le dispositif proposé ici offre précisément une forme d’assouplissement quantitatif (« quantitative easing ») sous contrôle (via la métrique carbone instaurée), qui améliore la qualité de la croissance. Il renforce également la compétitivité hors prix de l’Europe en raison des effets d’entraînement des secteurs des transports et de l’énergie sur l’ensemble de l’économie.
Par rapport aux politiques qui ne cherchent à agir que sur la mise en place d’un prix du carbone, avec peu de succès jusqu’ici, le dispositif proposé permet de mobiliser directement et immédiatement le levier du crédit bancaire et de l’épargne au service de la transition énergétique.
L’Union européenne devrait promouvoir une politique monétaire au service de l’investissement européen et du climat, pour donner une direction bas carbone à la croissance future et renforcer ainsi son leadership historique sur les questions climatiques. L’influence de l’Europe vis-à-vis des pays émergents lors de la conférence de Paris en décembre 2015 reposera en grande partie sur sa capacité à faire la preuve que des solutions existent pour concilier prospérité durable et objectifs climat ambitieux.

Sommaire :
– L’Europe en 2015, confrontée aux défis du climat et de la croissance
– La difficile émergence d’un prix du carbone
– Une intermédiation financière pour investir dans la transition bas carbone
– Un plan monétaire pour financer la transition bas carbone

Pour lutter contre la désinformation et privilégier les analyses qui décryptent l’actualité, rejoignez le cercle des lecteurs abonnés de UP’

Auteurs : Michel Aglietta, conseiller scientifique au CEPII et auprès de France Stratégie ; Étienne Espagne, chargé de mission au département Économie-Finances, France Stratégie ; Baptiste Perrissin Fabert, chargé de mission « économie du climat » au Commissariat général au développement durable, ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie.

Téléchargez la note d’analyse « Une proposition pour financer l’investissement bas carbone en Europe »

Nous avons un message pour vous…

Dès sa création, il y a plus de dix ans,  nous avons pris l’engagement que UP’ Magazine accordera au dérèglement climatique, à l’extinction des espèces sauvages, à la pollution, à la qualité de notre alimentation et à la transition écologique l’attention et l’importance urgentes que ces défis exigent. Cet engagement s’est traduit, en 2020, par le partenariat de UP’ Magazine avec Covering Climate Now, une collaboration mondiale de 300 médias sélectionnés pour renforcer la couverture journalistique des enjeux climatiques. En septembre 2022, UP’ Magazine a adhéré à la Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique.

Nous promettons de vous tenir informés des mesures que nous prenons pour nous responsabiliser à ce moment décisif de notre vie. La désinformation sur le climat étant monnaie courante, et jamais plus dangereuse qu’aujourd’hui, il est essentiel que UP’ Magazine publie des rapports précis et relaye des informations faisant autorité – et nous ne resterons pas silencieux.

Notre indépendance éditoriale signifie que nous sommes libres d’enquêter et de contester l’inaction de ceux qui sont au pouvoir. Nous informerons nos lecteurs des menaces qui pèsent sur l’environnement en nous fondant sur des faits scientifiques et non sur des intérêts commerciaux ou politiques. Et nous avons apporté plusieurs modifications importantes à notre expression éditoriale pour que le langage que nous utilisons reflète fidèlement, mais sans catastrophisme, l’urgence écologique.

UP’ Magazine estime que les problèmes auxquels nous sommes confrontés dans le cadre de la crise climatique sont systémiques et qu’un changement sociétal fondamental est nécessaire. Nous continuerons à rendre compte des efforts des individus et des communautés du monde entier qui prennent courageusement position pour les générations futures et la préservation de la vie humaine sur terre. Nous voulons que leurs histoires inspirent l’espoir.

Nous espérons que vous envisagerez de nous soutenir aujourd’hui. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à offrir un journalisme de qualité, ouvert et indépendant. Chaque abonnement des lecteurs, quelle que soit sa taille, est précieux. Soutenez UP’ Magazine à partir d’1.90 € par semaine seulement – et cela ne prend qu’une minute. Merci de votre soutien.

Je m’abonne →

S’abonner
Notifier de

0 Commentaires
Les plus anciens
Les plus récents Le plus de votes
Inline Feedbacks
View all comments
Article précédent

Des réformes ambitieuses peuvent créer un sentier de croissance forte et inclusive, selon l'OCDE

innovation énergie
Prochain article

Energie : partage en biens communs

Derniers articles de ECONOMIE

REJOIGNEZ

LE CERCLE DE CEUX QUI VEULENT COMPRENDRE NOTRE EPOQUE DE TRANSITION, REGARDER LE MONDE AVEC LES YEUX OUVERTS. ET AGIR.
logo-UP-menu150

Déjà inscrit ? Je me connecte

Inscrivez-vous et lisez trois articles gratuitement. Recevez aussi notre newsletter pour être informé des dernières infos publiées.

→ Inscrivez-vous gratuitement pour poursuivre votre lecture.

REJOIGNEZ

LE CERCLE DE CEUX QUI VEULENT COMPRENDRE NOTRE EPOQUE DE TRANSITION, REGARDER LE MONDE AVEC LES YEUX OUVERTS ET AGIR

Vous avez bénéficié de 3 articles gratuits pour découvrir UP’.

Profitez d'un accès illimité à nos contenus !

A partir de 1.70 € par semaine seulement.

Profitez d'un accès illimité à nos contenus !

A partir de $1.99 par semaine seulement.
Partagez
Tweetez
Partagez
WhatsApp
Email
Print