À la tête du laboratoire de biomécatronique du Media Lab du MIT, Hugh Herr a mis au point une prothèse de jambe appelée « BIOM T2 ». Des prothèses douées d’intelligence artificielle embarquée qui permettent désormais à des personnes d’accéder à des mouvements auparavant impossible à effectuer mais surtout qui s’adaptent à toutes formes de terrrains.
Hugh Herr a perdu ses deux jambes il y a trente ans, lors d’un accident d’escalade en montagne. Il ne cessera d’élaborer de nouvelles prothèses, analysant les déficiences des prothèses existantes et modélisant mathématiquement le fonctionnement de la cheville lors de la marche. Il porte ses propres prothèses qu’il décrit comme imitant la nature, reproduisant à l’identique les fonctions des chevilles, genoux et mollets biologiques.
Des propthèses bioniques car elles vont permettre une simulation incroyable de la marche humaine : en montée, les prothèses vont rendre la démarche plus facile grâce aux moteurs embarqués. En descente, celles-ci suivront la pente en contrôlant l’énergie du marcheur. L’équipe de recherche a d’ores et déjà créé des modèles adaptés pour les multiples cas où des patients se retrouvent dans l’incapacité d’utiliser leurs jambes : de la paralysie cérébrale à des exo-squelettes pour des pathologies ciblées.
L’équipe du laboratoire de recherche a modelé la façon dont le pied, la cheville et le genou travaillent de concert dans l’organisme. Elle utilise une « propulsion bionique » alimentée par batterie, couplée à deux microprocesseurs et six capteurs environnementaux qui ajustent la raideur, la position, la puissance déployée et le degré d’amortissement de la cheville plusieurs milliers de fois par seconde en deux points clés. Lors de l’impact du talon, le système contrôle la raideur de la cheville pour absorber le choc et porter le tibia vers l’avant. Ensuite, des algorithmes génèrent de l’énergie en fonction du terrain pour propulser le porteur en avant. Les quantités d’informations transmises entre les différentes muscles ont toutes été transposées en code binaire et programmées dans le membre bionique.
Les prothèses sont adaptées à chaque patient à l’aide d’un logiciel spécialisé créé par les chercheurs, qui programme la rigidité et la puissance déployées à toutes les étapes de la marche. Ils appellent ce processus le « Personal Bionic Tuning ». Cela signifie qu’un patient s’acclimate souvent à sa prothèse en quelques minutes au lieu de quelques semaines. La prothèse restaure la démarche naturelle, l’équilibre et la vitesse de marche, mais en absorbant les chocs et redistribuant l’énergie elle permet aussi de réduire les contraintes subies par les articulations des jambes et par le dos.
Hugh Herr a développé différentes sortes de jambes bioniques pour des usages très spécifiques : la marche, la course, mais aussi l’escalade. Et il est convaincu que d’ici une vingtaine d’années, un adulte amputé pourra se mouvoir plus facilement qu’un adolescent de 18 ans.
Le prochain objectif de Herr et son équipe est de permettre aux amputés de ressentir dans leur corps le sentiment du toucher – propre aux membres fait de chair et d’os. Si les prothèses sont bioniques, c’est qu’elles simulent déjà la façon dont une jambe interagit avec l’espace. Mais les sensations au contact du pied artificiel n’atteignent pas encore le cerveau sous la forme de signaux électriques. Le porteur d’une jambe bionique ne ressent donc pas le contact proprement dit avec une surface plutôt qu’une autre.
Le MIT et BIOM ont investi 50 millions de dollars dans ce projet. Des modèles d’exosquelettes qui se connecteraient au corps humain de manière moins contraignante qu’une prothèse bionique sont à l’étude. Une fois validés, le MIT compte mettre à disposition les codes et les modèles 3D de ses membres robotisés pour élargir l’accès à tous.
Vidéo TedeX de Hugh Herr :