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Le document était à usage interne mais le site Euractiv vient d’en publier le contenu. Il s’agit d’une note confidentielle de BusinessEurope, l’organisation dirigée par Pierre Gattaz, qui fédère les grandes associations patronales européennes. La note de ce Medef européen dévoile sa stratégie dans les négociations avec l’Union européenne sur le réchauffement climatique. Objectif : comment contrecarrer toutes les mesures visant à réduire la production de gaz à effet de serre en Europe.
Le patronat européen compte soutenir la lutte contre le réchauffement climatique… mais seulement en façade. Si BusinessEurope compte réserver un accueil plutôt positif à la politique climatique européenne, ce soutien sera uniquement valable « tant qu’on parle d’une déclaration politique sans implications » précises sur les engagements existants dans le cadre de l’accord de Paris pour le climat.
La stratégie de Business Europe fait écho à l’annonce du commissaire européen à l’action climatique, Miguel Arias Cañete, qui a récemment proposé de réhausser les objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. L’Espagnol estime que le niveau d’ambition prévu avait été dépassé « de facto » par un accord sur la part des renouvelables et l’efficacité énergétique conclu en juin. Il propose de réduire de 45 % les émissions de gaz à effet de serre en Europe d’ici à 2030, contre 40 % à ce jour.
Cette position est aussi celle de Jean-Claude Juncker qui a déclaré lors de son discours sur l’état de l’union que la volonté du Parlement de hausser les objectifs était « scientifiquement exacte et politiquement nécessaire ».
Le lobby du patronat européen conseille à ses membres de s’opposer à Miguel Arias Cañete en « utilisant l’argument habituel » selon lequel le problème du réchauffement climatique « étant global, l’Europe ne peut pas faire des efforts pour les autres. » Le document propose de « minimiser le sujet » en arguant que la hausse des ambitions « n’est pas ce qui importe le plus » et que « l’essentiel est de persuader d’autres grandes économies de se mettre au même niveau que l’Europe ».
Enfin, le mémo met l’accent sur le fait de « réclamer plus de transparence sur les calculs, le besoin d’avoir des études sur l’impact et le risque d’instabilité » que créerait une telle proposition. Une façon de retarder l’échéance.
Parmi les pays les plus en pointe dans leur résistance à ces changements, l’Allemagne, craignant que cela n’entrave la compétitivité de son industrie, largement dépendante des exportations, fait figure de leader. En août dernier, Angela Merkel, dans la droite ligne de la stratégie du Medef européen, s’était exprimée contre la révision des objectifs climatiques, estimant que « nous devrions commencer par nous en tenir aux objectifs que nous nous sommes déjà fixés ».
Avec 30 lobbyistes basés à Bruxelles et une dépense annuelle de plus de 4 millions d’euros, BusinessEurope est un des groupes d’intérêt commercial les plus influents dans le processus d’élaboration des politiques de l’UE. Il représente 40 fédérations professionnelles et 70 multinationales comme Microsoft, Google, Facebook, Bayer, Total ou Ford – qui paient pour siéger dans son groupe de soutien consultatif.
Tara Connolly, activiste chez Greenpeace, dénonce les « manœuvres politiques » de BusinessEurope, à un moment où les Européens « sont les témoins directs des effets du changement climatique » après un été marqué par des canicules et une sécheresse qui a obligé l’UE à débloquer des fonds pour aider les agriculteurs.
« La Commission européenne a la responsabilité d’avancer, d’ignorer les boniments, les mensonges et les tactiques de retardement des dinosaures que sont les corporations européennes. Il serait irresponsable de tomber dans le panneau des déclarations alarmistes et de ne pas prêter attention aux dangers économiques, sanitaires et environnementaux du changement climatique », estime-t-elle.
« L’opposition de BusinessEurope à tout progrès climatique est bien connue, mais c’est la première fois que cela sort de manière si explicite » indique Martin Pigeon, un porte-parole de Corporate Europe Observatory, une ONG qui plaide pour une plus grande transparence et régulation des activités de lobbying. A deux mois de la COP24 qui aura lieu en Pologne, ces révélations semblent illustrer une incompatibilité entre les enjeux environnementaux et les intérêts économiques des multinationales
Source : Euractiv
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