Les Parisiens pourront se chauffer au bois grâce à une nouvelle chaudière biomasse XXL installée par la Compagnie parisienne de chauffage urbain (CPCU) à Saint-Ouen qui vient d’être inaugurée ce jeudi 10 mars. Désormais, le chauffage urbain parisien proviendra pour plus de moitié des énergies renouvelables et de récupération. Les réseaux de chaleur connaissent ainsi une nouvelle jeunesse en abandonnant les combustibles fossiles pour les énergies renouvelables, comme la biomasse et la géothermie.
Cinq grands silos de bois accueillent des granulés de bois acheminés par des wagons sur rails : deux trains pour 1 300 tonnes quotidiennes pour l’alimentation des chaudières. Une galerie d’un kilomètre relie la plate-forme biomasse à la chaudière de CPCU située à l’opposé de la ZAC des docks. Puis le charbon est amené et mélangé aux granulés quelques mètres avant l’entrée dans le brûleur. Car certaines chaudières ne sont pas encore compatibles au tout-biomasse. « Nous sommes pour le moment à 50-50, mais nous allons tenter de passer à 60% de biomasse, explique le président de CPCU, Frédéric Martin. Le prochaine objectif est de supprimer la seconde moitié du charbon de notre mix énergétique. »
Les granulats de bois, déjà séchés et «étuvés », arrivent par bateau des Etats-Unis puis sont acheminés par train de Rouen à Saint-Ouen. C’est le petit hic de l’opération. Car la filière bois française n’a pas pu répondre favorablement à l’appel d’offres de CPCU. « Nous avons besoin de 140 000 tonnes de granulés chaque année, alors qu’en France nous ne pouvions en avoir que 40 000 tonnes pour un prix plus élevé de 30%, détaille Marc Barrier, directeur général de CPCU. Nous lancerons un nouvel appel d’offres en avril 2017 pour prendre le relais d’approvisionnement en 2019, et nous espérons que la filiale française pourra en être. »
Un retard dû au faible usage de granulés en France, le plus souvent utilisé à des fins domestiques. La filière du bois française doit maintenant prendre en compte l’usage industriel du granulé, au risque d’être à nouveau délaissée au profit des États-Unis.
La CPCU est la filiale de la Ville de Paris et du groupe Engie qui fournit du chauffage à 500 000 logements chaque année à Paris dont un tiers des logements collectifs parisiens et dans 16 communes de banlieue, à travers 480 kilomètres de réseau. 75 millions d’euros ont été investis pour construire cette plate-forme logistique biomasse afin d’arriver aux objectifs fixés par le Plan climat de Paris, financé pour moitié par la Banque européenne d’investissement. Le charbon, désormais remplacé pour moitié par de la biomasse sous la forme de granulés de bois, va permettre d’éviter le rejet de 300 000 tonnes de CO2 par an dans l’air.
La Compagnie voit ainsi l’utilisation d’énergies propres devenir majoritaire dans sa création de chaleur : un mix énergétique de CPCU composé désormais pour 41% de la valorisation des déchets, 10% de biomasse, 2% de biocombustible et 1% de géothermie pour les énergies vertes, auxquels il faut ajouter 16% de charbon et 30% de gaz. CPCU avance aussi que ses émissions atmosphériques ont été drastiquement diminuées en ce qui concerne les poussières (-90 %), les oxydes d’azote (-85 %) et le dioxyde de soufre (-95 %).
Le site établi à proximité de la ZAC des Docks, est mitoyen avec un éco-quartier, forçant ainsi le projet à intégrer une dimension architecturale afin de mieux fondre les grosses installations dans le paysage urbain.
Toute la région parisienne se met au vert, à l’image d’Ivry sur seine qui a lancé en décembre 2015 ses premiers forages géothermiques pour alimenter le réseau de chauffage : ce réseau, baptisé Géotelluence, d’une puissance totale de 70 MW (dont 10 MW de géothermie) fournira chauffage et eau chaude à hauteur de 45% de l’énergie renouvelable distribuée. Et grâce à une autre connexion au réseau de chaleur CPCU, lui-même alimenté pour moitié en énergies renouvelables et de récupération, il atteindra les 67% d’énergie renouvelable au total.
Sur le campus universitaire de Paris-Saclay, le réseau de géothermie qui va être construit récupérera aussi la chaleur dégagée par les grands équipements de recherche. Son concepteur, la société Idex, évoque une première mondiale.
Très développés en Europe du Nord, ces réseaux de chauffage collectif vont dans le sens de la transition énergétique ; ils sont en train de vivre une nouvelle jeunesse.
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