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Ces citadins qui décident de tout quitter pour cultiver la terre

Interview

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Une nouvelle génération d’agriculteurs est en pleine évolution, bien loin des stéréotypes ou clichés médiatiques. Oui, l’agriculture est en danger avec des milliers de fermes qui disparaissent chaque année dans un monde agricole malmené par la crise. Mais il existe des femmes et des hommes qui décident de changer de vie et de se reconvertir dans ce secteur. Dans cette interview exclusive, Paolin Pascot démontre pour UP’ qu’il est possible de se reconvertir si l’on est passionné.

Plus du tiers des créations d’activité en agriculture sont aujourd’hui le fait de personnes qui ne sont pas nées dans des familles paysannes. Venus d’horizons professionnels et sociaux très divers, ces nouveaux arrivants dans le monde agricole contribuent à renouveler les effectifs d’une profession qui a perdu 200 000 actifs entre 2000 et 2010. Selon Gaspard d’Allens et Lucile Leclair, dans leur ouvrage « Les Néo-paysans », (Editions du Seuil, 2016), ces paysans ex-citadins représenteraient aujourd’hui 30% des installations agricoles, soit deux fois plus qu’il y a dix ans. A l’origine de leur décision, on trouve souvent une prise de conscience écologique, l’envie de vivre en accord avec leurs convictions ou de sortir d’une existence qui leur semble « hors sol ». Qu’ils soient guidés par une recherche de mieux vivre individuel ou familial ou qu’ils aspirent à transformer par leurs actes la société dans laquelle ils vivent, ces nouveaux paysans sont en train de modifier, doucement mais sûrement, le paysage agricole français (1). 
Nous sommes loin d’une agriculture productiviste : ils étaient informaticiens, cadres dans de grandes banques ou grandes entreprises, ou ouvriers ou commerçants, … Ils créent des installations à taille humaine, privilégiant le bio, les circuits courts, du tourisme à la ferme, et ne recherchent pas le rendement ou à « faire de l’argent ». Mais à vivre avec la nature, à élever leurs enfants avec des valeurs de solidarité, de respect de l’environnement, des animaux et des autres. Pour soutenir le développement de modèles d’agriculture, d’élevage et de transformation alimentaires moins dépendants des ressources non renouvelables et plus respectueux des écosystèmes et de la santé humaine. On les appelle les néoruraux. 

Paolin Pascot est le co-fondateur et Président d’Agriconomie. Petit-fils de paysan, Paolin Pascot a, très tôt, considéré les nouvelles technologies comme un moyen de rendre l’agriculture plus performante et durable. En 2014, il décide de fonder avec deux amis Agriconomie.com (2), une plateforme en ligne qui aide les agriculteurs à acheter leurs semences et pièces détachées à moindre coût. Il est aussi à l’origine, avec quatre autres fondateurs d’entreprises innovantes, d’un incubateur de poids : La Ferme Digitale, créée en 2016, groupement de plus de 45 startups (à ce jour) qui crée un panel riche d’outils numériques innovants au service de l’agriculture et de l’alimentation, avec pour enjeu de créer la ferme de demain.

Interview

UP’ : Quels sont les éléments qui déclenchent ce changement de métier ? Qu’est ce qui attire ces nouveaux agriculteurs dans le métier ? Quelles sont leurs motivations ? 

Paolin Pascot : Le métier d’agriculteur est surement l’un des plus beaux, mais il n’est pas de tout repos. Les challenges à surmonter sont nombreux (fluctuation des cours, rentabilité des productions non assurée, évolution des réglementations, aléas climatiques de plus en plus fréquents…), mais la fierté de produire, la satisfaction et l’enthousiasme sont plus forts ! C’est un métier que l’on exerce par passion, par conviction, par humanité. Etre agriculteur ou agricultrice c’est être curieux et engagé dans et pour l’avenir. Devenir agriculteur, c’est choisir : la passion de la terre, la polyvalence des missions quotidiennes, la fierté de cultiver et de produire, pour soi et pour les autres, un métier loin des tumultes des grandes villes, aux multiples facettes, complet. Etre agriculteur c’est convoquer toutes ses compétences au service d’une cause : produire durable.

UP’ : Comment se forment-ils à ce nouveau métier ? Existe-t-il des écoles et/ou formations appropriées ? 

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PP : Les écoles et organismes de formation dédiés à l’apprentissage des métiers agricoles sont nombreux. Le paysage de la formation et de l’accompagnement est en France très diversifié. Les demandes de formation professionnelles augmentent chaque année, les offres se diversifient et se spécialisent. Du lycée agricole jusqu’à l’école d’ingénieur, en passant par les formations continues pour adultes (CFPPA) ou les formations thématiques mixtes… l’offre est adaptée. Le besoin et le type de population évolue, l’offre de formation aussi. Pour ces personnes en reconversion professionnelle il est à noter que les différents (et nombreux) diplômes agricoles sont également accessibles en formation professionnelle continue dispensés par exemple par les CFPPA (Centre de Formation Professionnelle et de Promotion Agricole) s’adressant en priorité au public adulte, ou dans les établissements de l’enseignement supérieur. Aussi, le BPREA (Brevet Professionnel Responsable d’Exploitation Agricole) permet d’obtenir la capacité professionnelle agricole nécessaire à l’installation.

UP’ : Quels sont les profils qui se reconvertissent le plus souvent ? Dans quelle activité ? Vers quel type d’agriculture se font ces reconversions (bio par exemple) ? 

PP : Majoritairement les métiers de maraîchers, viticulteurs, apiculteurs et bergers attirent ces citadins en quête de reconnexion avec la nature mais aussi de reconnexion avec leur vie, leurs attentes voire leurs rêves. Aussi, une part importante de ces nouveaux agriculteurs s’installent en agriculture biologique. La filière bio est un exemple, particulièrement représentée dans les exploitations maraîchères et viticoles. Par définition, se reconvertir, changer de métier, tout quitter pour se lancer dans une nouvelle aventure n’est pas chose aisée, que ce soit pour des métiers agricoles ou non. C’est pour ça qu’il est évident que la passion guide ces adultes désireux de débuter une nouvelle vie. Mais les étapes à franchir sont nombreuses, les embûches avec.

*30 % des installations Hors Cadre Familial en 2013 selon l’étude « Création d’activité par les entrepreneurs hors cadre familial : besoins spécifiques, leviers d’action et complémentarité des dispositifs d’accompagnement » commandée par les syndicats JA et MRJC

UP’ : Est-il facile aujourd’hui de trouver des parcelles, des terres agricoles à la reprise ? Y-at-il des aides gouvernementales ou d’organismes particuliers pour aider à cette reconversion (ex : Dotation jeune agriculteur (DJA), …) ?

PP : L’accès au foncier agricole fait partie des premiers défis à relever pour les futurs installés. Les prix augmentent d’année en année, les exploitations se mutualisent en GAEC – Groupement Agricole d’Exploitation en Commun – et engendrent des exploitations de taille très importante. Néanmoins, l’accès au foncier agricole est un réel enjeu dans les discours politiques. Des organismes existent pour faciliter cet accès aux jeunes agriculteurs, futurs exploitants. Les SAFER – Sociétés d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural – sous tutelles du Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation et du Ministère des Finances, ont pour mission d’accompagner les futurs chefs d’exploitation dans leur projet d’installation en milieu rural.       
La DJA – Dotation Jeune Agriculteur -, les exonérations fiscales et sociales, les exonérations de la taxe sur le foncier non bâti, le rôle des institutions et syndicats dans l’accompagnement et le conseil… les futurs installés, et pas seulement les personnes en reconversion professionnelle, ne sont pas seuls. Des dynamiques de soutien au niveau national et européen sont réfléchies et mises en place.

UP’ : Pensez-vous que la relève de l’agriculture est assurée ?

PP : L’innovation technologique, biologique, numérique permet aux agriculteurs de mieux anticiper, de mieux s’adapter aux évolutions réglementaires, climatologiques, économiques… et de mieux adapter leurs pratiques. Le niveau d’études a énormément évolué. 31% des installations se font hors cadre familial. Un futur exploitant sur trois n’est pas issu du monde agricole. L’accompagnement par cette structuration du secteur très fédératrice nous permet d’envisager l’avenir plus sereinement. Comme on a pu l’aborder plus haut, les agriculteurs sont de moins en moins seuls face aux nombreux challenges du quotidien. C’est aussi un message porteur d’espoir et de plus grande sérénité pour nos jeunes générations qui prendront ou qui ont pris la relève.

Le renouvellement des générations reste un enjeu national très important. Les futurs exploitants aujourd’hui sont le visage agricole français de demain. Soutenons-les !

Propos recueillis par Fabienne Marion

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(1) Source : « Devenir paysan » Ouvrage collectif – Edition Les Champs des possibles
(2) Créée en 2014 par trois jeunes entrepreneurs issus du secteur agricole, Agriconomie est la première plateforme de vente en ligne entièrement dédiée aux approvisionnements agricoles. Elle compte aujourd’hui plus de 65 000 clients agriculteurs, et leur permet d’économiser jusqu’à 5.000 euros par an sur leurs achats. D’abord connue pour son site e-commerce spécialisé dans les approvisionnements agricoles (semences, pièces, équipements, engrais…), Agriconomie propose également une offre complète d’outils en ligne visant à faciliter l’activité quotidienne de l’agriculteur. Agriconomie est aussi membre de La Ferme Digitale.

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