Survivre à la chaleur – Adaptons-nous, de Matthieu Glachant et François Lévêque – Éditions Odile Jacob, janvier 2025 – 240 pages
Les auteurs partent d’un constat simple : les records de température et les événements climatiques extrêmes (vagues de chaleur, feux de forêt, sécheresses, montées des eaux…) engendrent déjà des pertes humaines, des dégâts matériels et des perturbations écologiques. Face à cette réalité, ils soulignent que l’adaptation devient non seulement nécessaire, mais urgente. Contrairement aux critiques reprochant à l’adaptation de concurrencer l’atténuation (réduction des émissions de CO₂), le livre affirme qu’adaptation et atténuation sont complémentaires, car l’adaptation répond vite aux impacts locaux, alors que l’atténuation agit sur le long terme à l’échelle planétaire.
Organisé sous forme de dialogue entre deux économistes, l’ouvrage couvre plusieurs domaines d’application : vagues de chaleur, incendies, neige, submersion, agriculture, etc. Chaque chapitre mêle état des lieux, solutions techniques (ex : climatisation, végétalisation, digues, gestion de l’eau), et coûts/effets associés. Ils introduisent les outils clés de l’économie de l’environnement : analyse coût-bénéfice, monétarisation des biens non marchands, externalités, scénarios, etc.
Les dernières parties du livre sont consacrées aux inégalités, que ce soit entre exposés et vulnérables, ou entre nord et sud, insistant sur la nécessité de politiques publiques équitables et ciblées.
Le livre s’inscrit dans l’urgence actuelle : canicules répétées, pics de mortalité humaine (100 000 décès annuels liés à la chaleur). Il propose une réponse pragmatique et accessible, alternative utile à l’idéalisme long terme. Les auteurs évitent les simplismes : la climatisation sauve des vies , mais peut accroître les émissions et les inégalités. L’adaptation y est posée en complément de l’atténuation, non en opposition.
Quant au dialogue économique, il rend l’ouvrage accessible au grand public tout en restant rigoureux, avec des exemples concrets et la diversité des cas (urbain, rural, montagne, littoral) renforçant ainsi sa lisibilité.
L’ouvrage se concentre surtout sur la France et pays développés ; certains enjeux du Sud pourraient nécessiter des approfondissements complémentaires et certains secteurs (santé, infrastructures, mobilisation citoyenne) mériteraient peut-être une exploration plus poussée.
Le message essentiel des deux auteurs est qu’adaptation et atténuation sont deux piliers à articuler ensemble, selon le principe du “duo indissociable”. L’adaptation peut être territoriale, décentralisée, rapide, et politiquement tangible. Quant à la Justice climatique, les politiques doivent cibler les plus vulnérables, tant socialement (logement, revenus) que géographiquement (régions, pays).
Survivre à la chaleur est un livre à la fois utile, clair et persuasif. Son argumentaire plaide en faveur d’un équilibre nécessaire entre adaptation immédiate et atténuation structurelle, sans négliger les enjeux d’équité. Pour toute personne s’intéressant à la transition climatique et aux politiques qui peuvent renforcer la résilience collective, c’est un outil moteur de réflexion et d’action.
Matthieu Glachant est professeur d’économie à Mines Paris- PSL, spécialiste de l’économie de l’environnement sur laquelle il a publié de nombreux articles académiques, notamment sur le sujet de l’adaptation.
François Lévêque est professeur d’économie à Mines Paris-PSL. Il est spécialiste des questions d’énergie-climat et de concurrence. Il a reçu en 2021 le prix du Livre d’économie des lycéens pour son dernier ouvrage Les Entreprises hyperpuissantes. Géants et titans, la fin du modèle global ?
Lire l’article d’analyse « Survivre à la chaleur : pourquoi l’adaptation est désormais indispensable« . UP’, 19 juin 2025






