L’économie face à la nature – De la prédation à la coévolution, de Harold Levrel et Antoine Missemer – Editions Les Petits Matins, en partenariat avec l’Institut Veblen/pour les réformes économiques, 9 février 2023 – 256 pages
L’effondrement de la biodiversité est désormais un risque réel et imminent, moins connu mais tout aussi menaçant pour les humains que le changement climatique. Les auteurs partent de ce constat mais se focalisent sur les solutions, esquissant les voies d’une transformation vers une économie fondée sur le vivant, où un nouveau rapport avec la nature permet aussi de repenser notre modèle économique.
L’exploitation de la biosphère nécessaire au développement des sociétés humaines a été tour à tour fondée sur une économie de la prédation puis de la production, avec des conséquences terribles pour la biodiversité. Un des enjeux du XXIe siècle est de faire émerger une économie de la coévolution permettant de redéfinir notre rapport avec la nature.
Nous ne partons pas d’une page blanche : des initiatives, dès le XVIIIe siècle, ont tenté de tracer une voie alternative à la surexploitation de la nature. Redécouvrir ces initiatives permet de mieux comprendre les sources de la crise actuelle et de nourrir la recherche de solutions. Les auteurs articulent ces expériences anciennes avec de nombreuses évolutions récentes, du développement de l’agroécologie à la reconnaissance de droits à la nature en passant par le réensauvagement de territoires autrefois totalement contrôlés par les humains.
Considérer l’économie comme partie prenante des dynamiques écosystémiques, reconnaître la dette écologique générée par nos modes de production et de consommation, nous nourrir autrement, apprendre à cohabiter avec les espèces sauvages, ou encore nous appuyer sur de nouveaux communs apparaissent ainsi comme autant de leviers de la transformation écologique de nos systèmes socio-économiques.
Les auteurs rappellent ainsi que beaucoup des outils de la transformation écologique de l’économie sont à portée de main, à condition d’accepter les compromis nécessaires à l’émergence d’un nouveau contrat social, prenant les traits d’un véritable contrat naturel.
À l’aube de la sixième crise d’extinction du vivant, provoquée par un modèle économique insoutenable et encore largement aveugle à ses propres dégâts, il y a urgence à transformer radicalement nos façons de produire et de consommer, nos conceptions du monde, nos institutions, voire notre contrat social.
Harold Levrel est professeur d’économie écologique à AgroParisTech, Cired.
Antoine Missemer est chargé de recherche en économie au CNRS, Cired.