Quand l’utopie tourne à la dystopie… Du 25 octobre 2019 au 26 janvier 2020, découvrez Amos’ world, une installation artistique inédite qui met en scène le destin d’une communauté d’habitants d’un grand ensemble. Mêlant sculptures et vidéos, cette œuvre immersive raconte l’effondrement des idéologies de l’architecture moderne et déploie une certaine allégorie de notre époque.
Œuvre trilogique réalisée par l’artiste américano-belge Cécile B. Evans, Amos’ World, dévoile une fiction sous forme de série télévisuelle. On y suit l’architecte, Amos, et des habitants du grand ensemble d’habitation qu’il a conçu. Forcés de constater que le bâtiment manque à ses promesses, les locataires vont se réapproprier la situation et retrouver leur capacité d’action, bousculant ainsi les ambitions de l’architecte qui s’imaginait avoir créé une structure idéale. Que se passe-t-il alors quand le monde construit par Amos commence à s’effondrer ? Telle une allégorie, Amos’ World interroge la construction de nos subjectivités et l’effondrement progressif d’une pensée capitaliste du collectif.
L’histoire s’appuie sur l’expérience produite par l’idéologie de l’architecture moderne et son échec, pour déployer une allégorie de notre époque dominée par le réseau. Technologique, ferroviaire, urbain ou humain par exemple, il rassemble diverses entités, dans un rapport d’interdépendance, décentralisé ou hiérarchique, horizontal ou vertical. L’objectif de ces structures était de produire des espaces privés idéalement articulés aux espaces communs, proposant une harmonie et une concordance parfaite entre l’architecture, l’homme et la nature. Exploitant au maximum les ressources disponibles faites pour loger de nombreuses personnes en un même lieu, maîtrisant les espaces de loisir, dessinés et conçus en amont sans prendre en compte les populations qui allaient y vivre, elles semblaient parfaites pour l’époque capitaliste.
Ces projets ont néanmoins presque toujours échoué. Les locataires furent tenus responsables de ces échecs, du fait qu’ils ne s’étaient pas conformés aux comportements imaginés par les architectes.
Cécile B. Evans met en scène les rapports de pouvoir entre individus, la manière dont ils sont activés et façonnés par des infrastructures. Le récit d’Amos’ World évoque les hiérarchies et mécanismes de contrôle qui conditionnent les interactions entre les individus et régulent leurs rapports à l’espace et aux objets.
Rassemblant des acteurs, actrices et des personnages animés grâce à des techniques analogues et digitales, la trilogie est visible par les visiteurs depuis des cabines de visionnage individuelles et dont la forme rappelle celle du bâtiment d’Amos. Des éléments du tournage, reconfigurés en sculptures ponctuent les espaces d’exposition.
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Premier épisode
Nous sommes ici présentés à Amos, l’architecte. Son personnage correspond à l’archétype de l’homme blanc tourmenté, dont l’arrogance exclut toute capacité à l’incertitude. Il confond ses ambitions avec la réalité et ne perçoit pas ses impacts. Quelques locataires du bâtiment sont également présentés, ainsi qu’un personnage dénommé le Temps (au sens de weather, le temps qu’il fait) qui tempère les fantasmes et humeurs de l’architecte. L’action se déroulant, le bâtiment se révèle en inadéquation avec l’idéal qu’il souhaitait mettre en œuvre. Les besoins physiques et émotionnels des habitants entrent en conflit avec les comportements prévus par l’architecte pour les utilisateurs de l’immeuble.
2e et 3e épisode
Ils amènent l’apogée et la conclusion de cette histoire. Le sentiment de supériorité d’Amos s’effrite et l’action se déporte vers les locataires du bâtiment qui commencent à réconcilier leurs actions avec leurs besoins. Alors que chaque personnage se débat avec ses difficultés, ses désirs contradictoires, un événement cataclysmique nommé le ‘tournant’ (the Turn) marque une nouvelle étape juste avant l’épisode 3.
L’épisode 3 a été filmé en studio, face à un public. À l’image de la structure du bâtiment, démantelée, et des contacts entre les locataires qui se font plus fréquents, l’épisode 3 est projeté dans une structure ouverte, où les spectateurs sont assis dans le même espace.
Ce projet, à la croisée de différentes disciplines, déploie une allégorie de notre existence au sein d’une réalité construite, dans laquelle les personnages vont progressivement s’insurger contre les structures physiques, idéologiques et technologiques qui visent à les confiner.
Réalisation : Cécile B. Evans, artiste belgo-américaine, entre 2016 et 2018.
En coopération avec : mumok Museum Moderner Kunst Stiftung Ludwig, Vienne ; Tramway, Glasgow ; Galerie Emanuel Layr, Rome & Vienne ; Abteiberg Museum, Mönchengladbach ; 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz.
Exposition Amos’ world au 49 NORD – 6 EST / FRAC LORRAINE, 18 rue des Trinitaires – 57000 – METZ – Du 25 octobre 2019 au 26 janvier 2020
Rencontre avec l’artiste le dimanche 26 janvier 2020 – 15h : Intéressée par la rébellion des émotions, contre toute forme d’oppression, qu’elle soit idéologique, technologique ou physique, Cecil B. Evans développe un travail artistique interrogeant les structures de pouvoir en place dans nos sociétés contemporaines.
Autour de l’exposition
Dans une société aux catégories cloisonnées, les artistes invités proposent des stratégies pour sortir d’identités figées. Récit spéculatif, rituel, dissociation, … autant de portes d’entrées pour élargir le champ des possibles :
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– Week-end de rencontres-surprises et activisme : Week-end des FRAC le samedi 16 novembre 2019 (gratuit)
Pour la 4e année consécutive, les 23 Frac et Platform vous proposent un week-end découverte de leurs actions. Comme pour l’édition précédente, chaque Frac invite une personnalité de sa région à s’approprier une œuvre de sa collection et à la partager avec le public. À Bure, en Meuse, nombre de militants en tout genre luttent depuis 20 ans contre un projet d’enfouissement de déchets radioactifs. Inodores, incolores, mais pas sans effets, ils devraient être cachés à 500m sous terre. Cette invitation pendant le Week-end Frac est l’occasion de rendre visible ce que l’on cherche à dissimuler et de sonder les liens entre art et engagement.
– Projection-performance Collective Amnesia : in Mémory of Logobi : mercredi 20 novembre 2019 è 19h (gratuit)
Christelle Oyiri aka Chrystallmess, DJ sound designer, critique
Pourquoi certaines cultures traversent l’histoire et d’autres pas ? Partant de ce constat, Christelle Oyiri aka Chrystallmess écrit son récit d’afro descendante. Dans ce projet à la croisée du dJing, de la performance et de la 3D, elle se saisit de l’afro futurisme et nous plonge dans l’effervescence du mouvement de danse Logobi, originaire d’Abidjan (Côte d’Ivoire). Une invitation à sortir d’une version unilatérale de l’histoire, dans une version DIY.