Une souche mutante d’E. coli, mcr-1, sème l’inquiétude aux États-Unis. Elle a été identifiée chez une femme de 49 ans qui souffrait d’une infection urinaire. Même la colistine, un antibiotique polypeptidique, utilisée en dernier recours dans la prise en charge d’infections bactériennes s’avère impuissante. Les antibiotiques utilisés couramment contre la cystite, l’angine ou la pneumonie pourraient devenir inefficaces.
Le phénomène de résistance aux antibiotiques de bactéries mutantes préoccupe toute la communauté médicale mondiale. C’est un danger majeur de santé publique qui nous menace et dont la cause serait l’abus d’antibiotiques, désarmés devant des bactéries de plus en plus coriaces. La hantise d’un retour aux temps où les maladies les plus simples tuaient en masse.
Cette bactérie super-résistante est considérée par les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC) comme l’une des plus grandes menaces de santé publique. Cette super-bactérie E-coli, découverte récemment en Europe et en Chine chez des humains et des animaux a été retrouvée pour la première fois sur le sol américain. C’est ce que rapporte une équipe du réseau de surveillance des organismes multirésistants (MRSN) de l’Institut de recherche militaire Walter Reed (WRAIR) dans la revue Antimicrobial Agents and Chemotherapy .
Avec un taux de mortalité pouvant aller jusqu’à 50 %, mcr-1 résiste à tous les antimicrobiens, y compris la colistine, utilisée en dernier recours pour combattre ce type de super-bactéries. « C’est un antibiotique ancien mais le seul encore efficace contre cette bactérie cauchemardesque » qui appartient à la famille des carbapenem-resistant Enterobacteriaceae (CRE), a expliqué le Dr Thomas Frieden, directeur des Centre de contrôle et de prévention des maladies (CDC).
La colistine est commercialisée depuis 1959. Fin 2015, la première identification en Chine d’un gène transférable résistant à la colistine avait semé l’inquiétude. Plusieurs cas ont été rapportés depuis, en Europe, au Canada, avant ce dernier, aux États Unis.
« La colistine est l’un des médicaments les plus efficaces contre les bactéries à très haute résistance. L’émergence de ce gène transférable qui leur confère une résistance à cet antibiotique vital est extrêmement préoccupante. La découverte de ce gène aux États Unis appelle à renforcer la surveillance pour en identifier les réservoirs, pour pouvoir prévenir sa propagation », alerte le Dr Patrick McGann, principal auteur de l’étude, cité par le Quotidien du médecin.
Le mauvais usage des antibiotiques est la principale cause du développement des résistances microbiennes qui touchent 2 millions de personnes aux États-Unis et provoquent 23 000 morts par an. Dans l’Union européenne, les bactéries pharmacorésistantes seraient responsables chaque année de 25000 décès, selon l’OMS, avec des coûts s’élevant à plus de 1,3 milliard d’euros en frais de santé et pertes de productivité.
En France, chaque année, plus de 150 000 patients développent une infection liée à une bactérie multirésistante, et plus de 12 500 personnes en meurent, soulignait le Dr Jean Carlet, dans son rapport remis cet automne à la ministre de la Santé. Plus globalement, la résistance aux antibiotiques devrait causer, selon lui, 10 millions de morts par an en 2050.
Ce qui inquiète fortement les chercheurs c’est que la bactérie résistante peut se répandre à d’autres souches que la E. coli en question. Si cela arrive, les antibiotiques pourraient devenir obsolètes et ne plus être efficaces contre les cystites, les pneumonies ou l’angine bactérienne. Des maladies parfois mortelles. C’est pourquoi le gouvernement Obama a décidé d’investir urgemment 800 millions de dollars dans la recherche sur de nouvelles générations d’antimicrobiens.