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Le regard de Jean-Michel Folon sur le monde

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En collaboration avec la Fondation Folon, la Saline royale d’Arc-et-Senans présente une exposition hommage à Jean-Michel Folon (1934 – 2005), dont l’œuvre est profondément marquée par les rencontres qu’il fait tout au long de sa vie. Son langage artistique témoigne d’une curiosité inlassable pour des univers graphiques très différents, comme l’encre de Chine, l’aquarelle, la photographie, mais aussi la sculpture et même la tapisserie. Sa vision critique du monde est soulignée par un trait sobre à l’encre noire, une technique qu’il alterne avec l’aquarelle. « Le Monde de Folon » dévoile tous les visages de l’artiste belge jusqu’au 5 novembre 2023.

Artiste engagé, Folon s’est intéressé à la place de l’humain dans son environnement et ses personnages fétiches évoluent dans un univers déshumanisé, mécanisé et labyrinthique. Il prend part à des causes politiques et sociales fortes : la guerre, le nucléaire, la violence et le totalitarisme occupent une part importante de son œuvre et sont des sujets qu’il dépeint toujours avec une impitoyable ironie.

Plus de 200 œuvres sont exposées dans cette rétrospective inédite, qui dévoile non pas une, mais plusieurs facettes de l’artiste. La plupart des pièces, jusque-là conservées dans les réserves de la Fondation Folon, sont pour la première fois présentées au public français, mais aussi étranger.

Folon, Déclaration universelle des Droits de l’Homme. Couverture, aquarelle sur papier, 1988. © Fondation Folon/ADAGP, Paris 2023

Le monde de Folon

L’exposition Le monde de Folon signe le retour de Jean-Michel Folon en France, terre d’accueil de l’artiste. Après celle organisée au Musée Ungerer à Strasbourg en 2022 qui mettait à l’honneur le travail d’illustration et l’engagement de l’artiste, cette nouvelle exposition, à la Saline royale, propose un large panorama de son art. Ses œuvres investissent ce site patrimonial exceptionnel durant toute la belle saison.

Chaque exposition est le reflet d’une rencontre. Celle-ci est le fruit d’un dialogue entre les équipes scientifiques de la Saline et celles de la Fondation. Les échanges ont nourri un propos et ont renouvelé le regard, quelquefois de façon étonnante. Dans la Maison du Directeur, plus de 200 œuvres présentent quatre décennies de carrière et regroupent des dessins inédits, des photographies, des encres de couleurs, des sérigraphies, des sculptures ou des aquarelles emblématiques issues de la collection et des archives de la Fondation Folon. Celles-ci témoignent de l’évolution du parcours artistique et de la cohérence dans la diversité des techniques. Cette approche explore aussi des pans de l’œuvre que l’artiste ne mettait pas en valeur de son vivant.

Durant les belles soirées d’été, un mapping projeté sur l’admirable architecture de Claude-Nicolas Ledoux donnera vie aux images de Folon et créera un rapprochement audacieux entre deux univers et deux époques, celle d’un architecte des Lumières et celle d’un poète visionnaire d’un monde contemporain en pleine mutation. Grande première ! Jean-Michel Folon en aurait probablement été heureux, lui qui a toujours été fasciné par l’image en mouvement. Ses créations pour les arts de la scène et le cinéma en sont le meilleur témoignage.

Dans les jardins, une promenade de sculptures monumentales invite à la contemplation des lieux et à la rêverie. Folon recherchait ce dialogue avec l’environnement naturel, profitant des effets de la pluie et du soleil, du jeu des nuages et des saisons. Selon lui, à chaque heure du jour, la lumière révèle une autre palette et un relief inédit. Il aimait emprunter les mots de Marguerite Yourcenar : Le jour où une statue est terminée, sa vie en un sens commence.

Les équipes se réjouissent de cette collaboration fructueuse qui contribue à s’affranchir d’une image cloisonnée de l’œuvre et à redécouvrir un artiste curieux, dessinateur, illustrateur, peintre, poète et sculpteur qui, à contre-courant des diktats artistiques dominants, fait partie de ces hommes libres qui ont brisé la frontière entre les genres.

Jean-Michel Folon

Folon, photographe Christian Carez, 1974. © Christian Carez

Jean-Michel Folon naît le 1er mars 1934 à Bruxelles. Il est l’aîné d’une fratrie de trois. Peu porté sur les études, il passe son temps à dessiner. Il suit d’abord un cursus d’architecture, avant d’intégrer la célèbre école de La Cambre, à Bruxelles, où il ne reste que peu de temps. En 1955, il part en autostop pour la France. Il ne sait pas encore qu’il y part pour longtemps… Il s’installe non loin de Paris, à Bougival.

Durant cinq ans, il dessine tous les jours. En 1960, Folon envoie des dessins à New York à divers magazines. Une première réponse, très enthousiaste, d’Esquire lui ouvre les portes des autres revues de renom, notamment Horizon et The New Yorker.
Son succès aux USA se répercute en Europe : magazines et galeries le sollicitent de tous côtés. Sa rencontre avec l’écrivain Giorgio Soavi, alors directeur artistique chez Olivetti, lui fait prendre un nouveau tournant : il réalisera pour la firme italienne plusieurs campagnes publicitaires.

En 1968, il conçoit une œuvre murale pour le pavillon de la France à la Triennale de Milan.

En 1969, il obtient une première exposition à New York, à la prestigieuse Lefebre Gallery. En 1961, Folon épouse l’artiste française Colette Portal. Le couple aura deux enfants. En 1968, après avoir vécu à Paris, la famille s’installe dans une vieille ferme à Burcy, dans la Beauce, dont le paysage influencera largement l’œuvre de Folon.

Vers 1970, il rencontre celle qui deviendra sa seconde épouse, Paola Ghiringhelli, galeriste qui lui propose une exposition à la Galleria del Milione à Milan. Durant les années 1970, de grands musées lui consacrent des expositions : le musée des Arts décoratifs à Paris (1971), le Musée d’Art Moderne de Bruxelles (1975), le Bojimans-van Beuningen à Rotterdam (1976), l’Institute of Contempory Art à Londres (1977), etc. Il représente la Belgique aux Biennales de Venise en 1970 et de Sao Paulo en 1973, où il remporte le Grand Prix.

Tout en poursuivant son travail pour la presse, il illustre à la demande d’éditeurs divers textes de la littérature et de la poésie du XXe siècle : La Métamorphose de Kafka (1973), Les Ruines circulaires de Jorge Luis Borges (1974), Alcools et Calligrammes de Guillaume Apollinaire (1978), ainsi que les Chroniques martiennes de Ray Bradbury et l’œuvre complète de Jacques Prévert en 1979. Enfin, il crée le générique de début et de fin des programmes de la chaîne française Antenne 2, marquant de 1975 à 1983 l’esprit de millions de téléspectateurs.

Dans les années 1980, Folon s’installe sur la Côte d’Azur, d’abord à Cap d’Ail, puis à Monaco. Il poursuit son travail d’illustrateur et participe comme affichiste à des combats qui lui sont chers, notamment ceux menés par Amnesty International pour les Droits de l’Homme. Il expose beaucoup : au musée de la Poste à Paris, au musée Ingres de Montauban (1982) et au musée Picasso d’Antibes (1984). Des rétrospectives lui sont consacrées au Japon, à Tokyo, Osaka et à Kamakura (1985), au Musée Correr à Venise (1985), au Museo de Bellas Artes de Buenos Aires et au Botanique de Bruxelles (1987). En 1981, il est sollicité pour des scénographies de théâtre et d’opéra.

Assemblant et transformant des objets, Folon fait ses premiers pas vers la sculpture, qui l’occupera vivement dans les années 1990. En 1997, il installe à Knokke, en Belgique, un personnage en bronze devant la mer, que l’eau recouvre à chaque marée, intitulé La mer, ce grand sculpteur. De 1990 à 1996, il expose partout dans le monde, entre autres à New York, au Metropolitan Museum of Art, à Florence, Barcelone, Shizuka, Tokyo, Kyoto, Lausanne et à Bologne. Par ailleurs, il continue ses combats, notamment en faveur de l’environnement, et poursuit son travail d’illustrateur : L’Homme invisible de H.G.Wells en 1992, les Fables de La Fontaine en 1995. Il crée également les cartons de vitraux de plusieurs chapelles en France.

En 2000, Folon crée sa Fondation à La Hulpe, dans l’un des plus beaux parcs d’Europe, situé au sud de Bruxelles. En 2003, il est nommé ambassadeur de l’Unicef et reçoit l’Ordre de la Légion d’Honneur. Il expose dans des lieux prestigieux : au château de Sédières en France (2001), au parc du Château SaintGeorges de Lisbonne (2001), au Palazzo Ducale de Lucques en Italie (2003), jusqu’à sa dernière rétrospective au Palazzo Vecchio et à Forte di Belvedere de Florence en 2005.

En outre, durant la seule année 2003, il crée les décors et costumes de La Bohème pour le Festival Puccini à Torre del Lago, conçoit les vitraux de la chapelle de Waha en Belgique et réaménage la chapelle des Pénitents Blancs à Saint-Paul de Vence en France. Le 20 octobre 2005, il s’éteint à l’âge de soixante-et-onze ans, à Monaco.

A l’instar de Claude-Nicolas Ledoux qui bâtit une architecture pour « éveiller les sens », Jean-Michel Folon initie un langage artistique large, débordant d’une curiosité inlassable pour des univers graphiques très différents dénonçant les maux de la société contemporaine.

L’exposition à la Saline royale présentera plus de deux cents œuvres issues des collections de la Fondation Folon et permettra de retracer plus de cinquante années de quête artistique.

Les Métamorphoses (Salle 1)

Folon, La forêt, encres de Chine et de couleur sur papier, s.d. © Fondation Folon/ADAGP, Paris 2023

Cette première salle de l’exposition initie au langage poétique de Folon, qu’il développera tout au long de sa carrière dans une multitude de techniques. L’artiste part d’un vocabulaire constitué de signes archétypaux et universels (flèche, masque, main, oiseau, personnage, œil, soleil, etc.) et les mixte suivant une grammaire complexe héritée des surréalistes. Ainsi, il soumet ses représentations à des métamorphoses, à des contaminations et à des hybridations, qui dépassent la simple représentation de la réalité pour nous emmener vers les espaces du rêve et de la poésie.

Au début de sa carrière, Folon développe un style radical – encre de Chine sur papier blanc – où le trait épuré est réduit à sa plus simple expression. Des années 1950 aux années 1970, la photographie est bien présente dans la construction de sa pensée visuelle. Les photographies présentes dans cette première salle nous plongent au cœur même du processus créatif de l’artiste. L’univers urbain y est prégnant, angoissant : flèches, panneaux de signalisation, réverbères, immeubles, etc. Ces photographies révèlent aussi l’extraordinaire capacité de Folon à anthropomorphiser ce qui l’entoure, un phénomène psychologique appelé « paréidolie ». Ainsi une prise de courant devient un masque, une façade se fait visage… Enfin, il y a son personnage, qui traverse toute son œuvre des dessins d’humour du début aux aquarelles de la maturité et aux sculptures de la dernière période. Devenu fétiche, il évolue dans un univers labyrinthique et mécanisé.

Des dessins et des actes (Salle 2)

Dès le début des années 1960, Folon développe une forte conscience écologique, qui anticipe bien des constats actuels. Si elle se matérialise d’abord par des dessins en noir et blanc, la vision environnementale de l’artiste se décline également en couleur, à l’aquarelle et en sérigraphie.

Folon pointe également les grands maux de la société contemporaine et fustige l’absence de droits de l’Homme. Chaise électrique attendant sa victime, squelette atomique nourri d’explosifs… : ces œuvres des années 1970 et 1980, pour la plupart dédiées à la presse, dénoncent l’irrémédiable cruauté humaine. Le rouge vif domine, couleur de sang à travers laquelle l’artiste affiche le mal avec une impitoyable ironie. En 1988, à la demande d’Amnesty International, Folon illustre la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, adoptée en 1948 par les Nations Unies. Outre les aquarelles originales, des dizaines d’esquisses témoignent de l’élaboration de la pensée visuelle de l’artiste.

Agence de voyages imaginaires (Salle 3)

Conçue comme un cabinet de curiosités, la troisième salle de l’exposition nous plonge au cœur de l’atelier de Folon, dans la tête de l’artiste. C’est ici qu’il récupérait des objets délaissés du quotidien et les métamorphosait, leur donnant ainsi une nouvelle vie. Bateaux, totems, masques hantent l’espace.

En contrepoint à ces voyages imaginaires, cette salle présente également des carnets de l’artiste. Dès les années 1980, Folon, voyageur et curieux, emmène systématiquement dans ses bagages un cahier où il relate des instants de vie et de rencontre sous forme d’écrits et de créations passionnantes, faites souvent aux crayons de couleur, rehaussées de collages et d’aquarelle.

Les sculptures dans les jardins

La sculpture s’inscrit comme un défi dans l’œuvre de Folon. Un challenge que se lance l’artiste dans la seconde partie de sa carrière. Depuis toujours, Folon collecte des objets déclassés qui l’inspirent, avec pour visée de les ressusciter en sortes de ready-made. Au cours de la décennie 1990, encouragé par son ami César, Folon se lance résolument dans la statuaire, parfois monumentale, que ce soit en taille directe (bois, plâtre) ou en modelage. Il la traduira en bronze ou en pierre par la suite. Caractérisées par leur frontalité et leur corporalité, parfois rehaussées de pigments et de multiples patines, ses sculptures se nourrissent des arts premiers, des Cyclades aux Étrusques, des masques africains aux totems amérindiens. Largement centrées sur l’humain, elles incarnent des thèmes traités autrefois graphiquement et projettent ainsi l’univers de l’artiste dans des environnements hétéroclites : paysages, jardins, parcs, galeries, musées. Cette démarche trouve son aboutissement sur la plage de Knokke (Belgique) où Folon installe en 1997 un personnage en bronze, sempiternellement patiné par les marées (La mer, ce grand sculpteur).

En lien avec le Festival des jardins Peinture et poésie et l’exposition temporaire, des sculptures de Jean-Michel Folon seront présentes dans les jardins et entraineront le visiteur dans une promenade poétique.

Les Nuits de la Saline

En écho à l’exposition temporaire Le Monde de Folon, la Saline royale propose des soirées de projections sur les façades des bâtiments, réalisées par Laurent Langlois (Artslide), autour de l’œuvre de Jean-Michel Folon. Un mapping unique créé pour l’occasion. La soirée commence par une visite décalée des jardins thématiques et du Festival des jardins Peinture et poésie et se poursuit avec un dîner au cœur de la Saline royale. Le visiteur peut ensuite déambuler librement dans les jardins éclairés en attendant le spectacle dédié aux carnets de voyage de Jean-Michel Folon.

Dates des soirées 13, 14, 15, 27, 28, 29 juillet 3, 4, 5, 17, 18, 19, 24, 25, 26 août

La fondation Folon

FOLON, Le voyageur, 2002, bronze. Exposition à La Hulpe, 2008
© Thierry Renauld/Fondation Folon-ADAGP, Paris, 2023.

Fondée par Jean-Michel Folon en 2000, la Fondation Folon prend place dans l’un des plus beaux parcs de Belgique, le Domaine régional Solvay, un écrin vert de 227 ha à une vingtaine de kilomètres du cœur de Bruxelles. Havre de paix et de beauté, la Fondation offre à ses visiteurs un parcours muséal original à la découverte des multiples facettes de l’œuvre de l’artiste belge. Reconnue d’utilité publique, la Fondation remplit plusieurs missions. L’une d’elles est bien entendu d’assurer le rayonnement de l’œuvre de Jean-Michel Folon, en Belgique mais aussi dans le monde. www.fondationfolon.be

Exposition Le monde de Folon, du 5 mai au 5 novembre 2023 à la Saline Royale – 25610 – ARC-ET-SENANS

www.salineroyale.com

Les oeuvres de Jean-Michel Folon sont également disponibles sur la plateforme internationale Singulart, dédiée à l’art contemporain.

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