Dans tes brumes, c’est une exposition qui parle de l’énergie d’une ville, de l’effacement et de l’oubli, du surgissement et de l’inattendu. C’est une exposition sur les conditions météorologiques de la disparition : un espace blanc, envahi par la brume, au sein duquel les visiteurs peuvent jouer à disparaître et rêver au monde qui continue sans eux. Alors que l’on nous somme perpétuellement d’être disponibles, c’est une exposition qui nous rend indisponibles. Jusqu’au 22 février 2025, La galerie Les filles du calvaire invite la commissaire Lise Bruyneel pour une exposition hivernale. Dans tes brumes reunit le travail de Dirk Braeckman, Juli Calbert, Katrien de Blauwer, Antoine de Winter, Renée Lorie, Stéphanie Roland, Dries Segers, Lore Stessel et Laure Winants.
« C’est une exposition où les artistes jouent, eux aussi, à s’absenter de leurs œuvres en intégrant dans leur processus de création le hasard et l’accident. C’est une exposition sur la frontière entre les arts, sur des photographies qui ressemblent à de la peinture et des peintures qui sont presque de la photographie, des photographies sur pierre, des photographies sans appareil, des photomontages aux ciseaux de corps volés dans des magazines. C’est une exposition où l’on utilise pour lentilles des bulles d’air vieilles d’un million d’années, où l’on ouvre grand la focale pour laisser entrer la lumière jusqu’à brûler le film.
C’est une exposition qui se demande ce que nous emportons des paysages que nous avons regardés, ce que nous gardons des gestes de celles et ceux que nous avons aimés, ce qui demeure en nous du monde quand nous fermons les yeux. Face à l’urgence de la crise climatique, c’est une exposition qui interroge notre désir de reproduire l’image avec exactitude en étant incapables de préserver sa source. C’est une exposition qui nous confronte au spectre de notre propre disparition.
C’est une exposition où la science flirte avec la science-fiction, qui nous plonge au cœur des océans et des glaciers, où la glace crée des dégradés de couleurs fabuleux, où des cartes postales apparaissent à la chaleur de nos mains, où l’on visite des îles fantômes et des communautés si petites que les relations humaines y semblent grossies à la loupe.
C’est une exposition qui libère l’espace de stockage, qui laisse la place aux visiteurs pour recevoir les œuvres, qui ouvre l’expérience sensorielle aux odeurs et aux sons, qui fait apparaître des arcs-en-ciel, des images holographiques et autres mirages. C’est une exposition où le temps est nuageux et les températures légèrement au-dessus des normales saisonnières. Et d’abord, à Bruxelles, il ne pleut pas. »
Lise Bruyneel et Simon Hatab
Lise Bruyneel, commissaire d’exposition et exploratrice des zones d’entre-deux, propose une vision artistique singulièrement poétique avec Dans tes brumes. L’exposition offre une expérience immersive autour de la fugacité et de l’effacement. Elle interroge l’énergie d’une ville, ses respirations et ses silences, en jouant avec des thématiques aussi évanescentes que la brume elle-même.
Dans tes brumes est un espace suspendu, où la disparition devient une condition météorologique, un acte presque volontaire. Ici, les visiteurs se perdent dans un blanc vaporeux, invitant à l’effacement et au rêve. La brume transforme ce lieu en une zone de retrait, un refus poétique de l’omniprésence et de la disponibilité imposée par nos sociétés hyperconnectées. Cette expérience, unique et énigmatique, incite à l’introspection tout en célébrant l’inattendu et le surgissement.
Lise Bruyneel, connue pour ses approches conceptuelles et sensibles, orchestre cette exposition hivernale comme une invitation à se soustraire au monde, pour mieux en réinventer les contours. Elle réussit à métamorphoser un espace physique en une métaphore universelle, où la brume devient une manière de se réconcilier avec l’invisible et l’éphémère.
Exposition Dans tes brumes, Jusqu’au 22 février 2025 à la Galerie Les filles du calvaire – 17 rue des filles du calvaire – 75003 – Paris
Photo d’en-tête : Renée Lorie, Through binoculars, Série Shelter, 2020, Photographie analogique, impression numérique sur une sculpture. Courtesy Renée Lorie