Quelque chose à ajouter ? Dites-le en commentaire.
Le 27 mars dernier, le Premier ministre indien Narendra Modi fanfaronnait à la télévision en annonçant la réussite d’un tir de missile vers un satellite en orbite. L’Inde entrait ainsi dans le club très fermé des nations capables de mener la guerre de l’espace. Le problème c’est que le missile indien a bien détruit le satellite cible mais en le volatilisant façon puzzle dans l’espace. Des centaines de débris, filant à la vitesse sidérale de 7.8 km à la seconde, menacent désormais les astronautes de la station spatiale internationale. Quand on sait qu’un débris de 10 cm peut causer des dégâts critiques, on comprend la colère des grandes agences spatiales mondiales.
En pleine campagne électorale pour les législatives qui auront lieu en avril et mai, le Premier ministre indien Narendra Mori apparaissait à la télévision pour annoncer fièrement que son pays venait d’expédier un missile dans l’espace afin de détruire un satellite test situé en orbite à environ 300 km au-dessus de la surface de la Terre. L’Inde devenait ainsi une puissance capable de mener une guerre dans l’espace et rejoignait ainsi le club très fermé occupé par les États-Unis, la Chine et la Russie. Une prouesse technologique saluées dans les rues indiennes mais qui a immédiatement suscité l’inquiétude de tous les spécialistes de l’espace.
En effet, détruire un satellite de plus de 700 kg ne peut manquer de produire une quantité de débris dans l’espace. Le Premier ministre Modi se voulait rassurant en précisant que la plupart des débris se consumeraient aussitôt en retombant dans l’atmosphère terrestre. Ce ne fut pas tout à fait le cas. En effet, l’explosion a provoqué la dispersion d’une multitude de débris dont le moindre d’entre eux peut percuter un satellite situé dans une orbite voisine et l’endommager gravement voire le détruire.
L’armée américaine avait repéré au moins 270 débris mercredi 27 mars, quelques heures après le tir indien, a annoncé le général David Thompson, vice-commandant de l’Air Force Space Command, au Congrès américain. Il a précisé que le lancement du missile d’interception indien avait eu lieu à 05H49 GMT mercredi, et qu’il avait été immédiatement repéré par les systèmes de surveillance américains. Le nombre de débris « va sans doute augmenter au fur et à mesure que le champ de débris s’étale et que nous recueillons plus d’informations », a-t-il déclaré. Christophe Bonnal, expert en débris spatiaux au Centre national d’études spatiales, précise au journal Le Monde : « il y en aura probablement d’autres. On le saura dans quelques jours, voire quelques semaines. Ce nombre de 270 ne concerne que les débris au moins aussi gros que le poing. En réalité, il y en a beaucoup, beaucoup plus : probablement 2 500 à 3 000 de l’ordre du centimètre et 30 000 à 50 000 de l’ordre du millimètre ».
Le problème se pose pour les débris supérieurs à 10 cm. Certains d’entre eux retomberont en se consumant dans l’atmosphère terrestre mais un nombre encore indéterminé d’entre eux ont été accéléré par l’effet de l’explosion et ont pris de l’altitude, vers des orbites où naviguent plusieurs objets spatiaux. Parmi ceux-ci, la Station spatiale internationale (ISS), navigue sur une orbite à 400 km. Son envergure de 100 mètres en fait une cible parfaite pour des débris en perdition. L’ISS possède un blindage la protégeant de débris de l’ordre du centimètre, mais au-delà de cette taille, les dégâts peuvent être catastrophiques. Le film Gravity avait montré dans sa séquence d’ouverture comment le télescope spatial Hubble, l’ISS, une navette spatiale et la majorité de son équipage avaient tous été réduits en confettis après la rencontre avec un nuage de débris.
Le 2 avril, la NASA, qualifiant la destruction par l’Inde d’un satellite par tir de missile de « chose terrible » déclarait que cette explosion avait créé 400 débris orbitaux et constituait une menace pour les astronautes à bord de la Station spatiale internationale. Le satellite s’est brisé en morceaux, dont beaucoup sont dangereusement gros mais trop petits pour être suivis, a déclaré Jim Bridenstine, l’administrateur de la NASA. « Ce que nous suivons en ce moment, ce sont des objets assez gros pour être suivis – nous parlons d’environ 10 cm ou plus – environ 60 pièces ont été suivies. » Il précise que 24 de ces morceaux se dirigent vers la Station spatiale, la mettant en situation de grave danger. « C’est inacceptable » s’est-il écrié, poursuivant que « Ce genre d’activité n’est pas compatible avec l’avenir des vols spatiaux habités. »
L’armée américaine suit les objets dans l’espace pour prédire le risque de collision de l’ISS et des satellites. Elle surveille 23 000 objets de plus de 10 cm de diamètre. Cela comprend environ 10 000 débris spatiaux, dont près de 3 000 ont été créés par un seul événement : un essai antisatellite chinois opéré en 2007.
À la suite du test indien, le risque de collision avec l’ISS a augmenté de 44 % en 10 jours, affirme Jim Bridenstine. Un risque qui se dissipera avec le temps, car une grande partie des débris se consumera en pénétrant dans l’atmosphère ; mais il suffit d’un gros boulon pour créer des dégâts qui pourraient s’avérer catastrophiques à cause de l’effet cascade que produisent les collisions dans l’espace. Ce type de réaction en chaîne entre objets en orbite se produit lorsqu’une collision produit un nuage de débris et que chacun de ces fragments déclenche d’autres collisions.
Selon les modèles statistiques cités par l’Agence spatiale européenne, on estime qu’il y aurait environ 900 000 débris plus gros qu’une bille en orbite autour de la Terre. L’Agence dénombre environ 34 000 objets de plus de 10 cm en circulation. L’espace est loin d’être vide. Il y pleut même des boulons.
S’abonner
Connexion
0 Commentaires
Les plus anciens
Les plus récents
Le plus de votes
Inline Feedbacks
View all comments