Ce variant Delta, apparu en Inde, est déjà la souche dominante au Royaume-Uni, retardant la sortie du pays de son confinement. Depuis son apparition, il s’est répandu, selon l’Organisation mondiale de la santé, dans 62 pays dont la France. Le ministre de la Santé Olivier Véran assure qu’il ne représente que 2 à 4 % des cas positifs mais qu’il faut rester vigilant et ne pas baisser la garde. En effet, Delta possède la capacité de se propager très rapidement. Les chercheurs s’efforcent de découvrir les secrets de sa redoutable efficacité.
Les cas de Covid sont en augmentation en Angleterre, et un variant se propageant rapidement pourrait en être la cause. Le variant B.1.617.2, qui porte désormais le nom de Delta, est apparu en Inde, mais s’est depuis répandu dans 62 pays, selon l’Organisation mondiale de la santé.
Delta est encore rare en France. Lors d’une intervention à la presse ce mardi 15 juin, le ministre de la Santé Olivier Véran a déclaré qu’il ne représentait que 2 à 4 % des cas, soit « 50 à 150 nouveaux diagnostics » par jour. « C’est peut-être encore peu, mais c’était la situation anglaise il y a quelques semaines », a-t-il ajouté, rappelant que le variant Delta « représente plus de 90% des cas en circulation » outre-Manche, où l’épidémie est repartie « sur une trajectoire ascendante », avec « quasiment deux fois plus de cas quotidiens » que dans l’Hexagone, malgré « un taux de couverture vaccinale supérieur au nôtre ». Raison de plus pour « ne pas relâcher notre vigilance collective », a-t-il insisté. « Ce n’est certainement pas le moment », car « nous ne devons certainement pas donner de prise au variant indien pour qu’il fasse repartir une nouvelle vague épidémique, nous devons absolument l’empêcher ».
Au Royaume-Uni, ce variant indien a rapidement dépassé la souche B.1.1.7 – également connu sous le nom d’Alpha – pour devenir la souche dominante, ce qui pourrait faire dérailler les plans du pays visant à assouplir les restrictions le 21 juin. Le nombre total de cas est encore faible, mais les responsables de la santé publique surveillent de près ce variant. Lundi 14 juin, le secrétaire d’État britannique à la santé, Matt Hancock, a indiqué que la souche Delta semble être environ 40 % plus transmissible que la souche Alpha, mais les scientifiques tentent toujours de déterminer le chiffre exact — les estimations vont de 30 % à 100 %. Ils cherchent également à comprendre ce qui la rend plus infectieuse. Ils n’ont pas encore beaucoup de réponses, mais ils ont des hypothèses.
Tous les virus acquièrent des mutations dans leur code génétique lorsqu’ils se répliquent, et le SRAS-CoV-2 ne fait pas exception. Beaucoup de ces mutations n’ont aucun impact. Mais certaines modifient la structure ou la fonction du virus. Identifier les changements dans la séquence génétique d’un virus est simple. Il est plus difficile de comprendre l’impact de ces changements sur la façon dont un virus se propage. La protéine spike, qui aide le virus à pénétrer dans les cellules, est un bon point de départ.
Comment Delta pénètre dans les cellules
Pour infecter les cellules, le SRAS-CoV-2 doit pénétrer dans l’organisme et se lier à des récepteurs à la surface des cellules. Le virus est parsemé de protéines en forme de champignon qui s’accrochent à un récepteur appelé ACE2 sur les cellules humaines. Ce récepteur se trouve sur de nombreux types de cellules, y compris celles qui tapissent les poumons. Il fonctionne comme une clé qui s’insère dans une serrure.
Les mutations qui permettent au virus de se lier plus étroitement peuvent faciliter la transmission d’une personne à une autre. Imaginez que vous respirez une gouttelette qui contient le SRAS-CoV-2. Si cette gouttelette contient des virus ayant une meilleure capacité de liaison, ils « seront plus efficaces pour trouver et infecter une de vos cellules », explique Nathaniel Landau, microbiologiste à l’école de médecine Grossman de l’Université de New York. Les scientifiques ne savent pas encore combien de particules de SRAS-CoV-2 il faut inhaler pour être infecté, mais le seuil serait probablement plus bas pour un virus qui s’accroche mieux à l’ACE2.
Le professeur Landau et ses collègues étudient la liaison en laboratoire en créant des pseudovirus. Ces virus créés in vitro ne peuvent pas se répliquer, mais les chercheurs peuvent les modifier pour exprimer la protéine spike à leur surface. Cela leur permet de tester facilement la liaison sans avoir besoin d’utiliser un laboratoire de haute sécurité. Les chercheurs mélangent ces pseudovirus avec des billes en plastique recouvertes d’ACE2, puis déterminent la quantité de virus qui adhère aux billes. Plus la quantité de virus est importante, plus le virus est capable de se fixer. Dans un article en préimpression publié en mai dernier, Nathaniel Landau et ses collègues montrent que certaines des mutations présentes dans Delta améliorent effectivement la liaison.
Comment il infecte une fois à l’intérieur
Mais une meilleure liaison n’abaisse pas seulement le seuil d’infection. Parce que le virus parvient mieux à s’emparer de l’ACE2, il infecte également un plus grand nombre de cellules à l’intérieur de l’organisme. « La personne infectée aura plus de virus en elle, car le virus se réplique plus efficacement », explique le Dr Landau.
Une fois que le virus s’est lié à l’ACE2, l’étape suivante consiste à fusionner avec la cellule, un processus qui commence lorsque des enzymes de la cellule hôte coupent la pointe à deux endroits différents, un processus connu sous le nom de clivage. Cela déclenche la machinerie de fusion. Si la liaison est comme la clé qui s’insère dans la serrure, le clivage est comme la clé qui tourne le pêne dormant. « Sans clivage sur les deux sites, le virus ne peut pas pénétrer dans les cellules », explique Vineet Menachery, virologue à l’Université du Texas Medical Branch. L’une des mutations présentes dans le virus Delta se produit en fait dans l’un de ces sites de clivage, et une nouvelle étude qui n’a pas encore été examinée par des pairs montre que cette mutation améliore effectivement le clivage. Le professeur Menachery, qui n’a pas participé à l’étude, affirme avoir reproduit ces résultats dans son laboratoire. « Il est donc un peu plus facile pour le virus d’être activé », dit-il.
On ne sait pas encore si cela améliore la transmissibilité, mais c’est possible. Selon le Dr Menachery, lorsque les scientifiques suppriment ces sites de clivage, le virus devient moins transmissible et moins pathogène. Il est donc logique que les modifications qui facilitent le clivage augmentent la transmissibilité. Il est également possible que la capacité de Delta à échapper à la réponse immunitaire de l’organisme contribue à la transmission. L’évasion immunitaire signifie que davantage de cellules sont infectées et produisent davantage de virus, ce qui permet à la personne porteuse du virus d’infecter plus facilement une autre personne.
Heureusement, les vaccins restent efficaces
La bonne nouvelle est que la vaccination offre une forte protection contre le variant Delta. Une nouvelle étude de Public Health England montre que le vaccin Pfizer-BioNTech a été efficace à 88 % pour prévenir la maladie symptomatique due à Delta chez les personnes entièrement vaccinées. Le vaccin d’AstraZeneca offrait une protection légèrement inférieure. Deux injections étaient efficaces à 60 % contre le variant. En revanche, l’efficacité d’une seule dose de l’un ou l’autre des vaccins était beaucoup plus faible (33 % seulement).
Quoi qu’il en soit, en France, environ 23 % seulement de la population est entièrement vaccinée (deux doses). En Inde, où la flambée du virus a été alimentée en partie par la propagation rapide de Delta, seuls 3,3 % de la population ont été complètement vaccinés. Avec près de 80% de la population française non encore complètement vaccinée, et avec la lassitude générale de la population devant les mesures de restrictions et de précaution, le variant Delta pourrait avoir de beaux jours devant lui.
ô Vaccin, ô Sauveur!
Peut-on avoir un suivi de la létalité relative des variants?
Pour savoir si cela s’améliore ou empire?