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Pandémies : prévenir coûtera moins cher que guérir

Pandémies : prévenir coûtera moins cher que guérir

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Nous ne sommes pas encore sortis de la pandémie de Covid-19 que déjà les scientifiques nous alertent sur la prochaine. Elle nous pend au bout du nez, tant les agressions à l’environnement et à l’habitat sauvage se multiplient, laissant s’échapper des zoonoses de plus en plus dangereuses. Ne pas prévenir « à la source » serait une grande folie disent les experts dans un rapport qui vient d’être publié. D’autant que les risques se précisent : NeoCov, un nouveau virus, beaucoup plus dangereux que le Covid a été repéré et fait l’objet de toutes les attentions.

Selon des scientifiques auteurs d’un rapport publié dans Science Advances, prévenir les futures pandémies à la source ne coûterait qu’une petite fraction des dommages déjà causés par les virus qui passent de la faune sauvage à l’homme. Chaque année, plus de 3 millions de personnes en moyenne meurent de maladies zoonotiques, c’est-à-dire de maladies qui se propagent de la faune sauvage à l’homme. Les chercheurs ont estimé que, sur la base de la population actuelle de la Terre et des pandémies passées, nous pouvons nous attendre à plus de 3 millions de décès dus aux maladies zoonotiques chaque année à l’avenir. Et ce, sans compter le Covid-19 qui a fait grimper les chiffres en 2020-21 encore plus haut. Ces épidémies sont désormais plus fréquentes et leur coût se calcule en milliers de milliards de dollars. Le professeur Stuart Pimm, coauteur de la nouvelle analyse, a déclaré : « Les pandémies ne sont pas un problème qui va disparaître. La population humaine mondiale augmente et s’urbanise de plus en plus. La situation va s’aggraver et nous serons davantage exposés aux risques. »

D’autant que jusqu’à 75 % de toutes les nouvelles maladies infectieuses humaines sont des zoonoses. Il pourrait y avoir plus de 1,6 million de virus inconnus en circulation, principalement dans les tropiques. Or dans un monde globalisé, la propagation est rapide. Le variant Omicron du Covid-19 a révélé la rapidité avec laquelle un virus peut infecter la planète. Détecté pour la première fois en Afrique du Sud, il a traversé les continents en quelques semaines.

Mettre un terme à la destruction de la nature, qui met les humains et la faune sauvage en contact plus étroit et entraîne la propagation de ces maladies, coûterait environ 20 milliards de dollars par an, soit à peine 10 % du préjudice économique annuel causé par les zoonoses (sans compter le Covid-19) et 5 % de la valeur des vies perdues.

Vive critique des organismes mondiaux et des gouvernements

Les scientifiques critiquent vivement les approches des organismes mondiaux et des gouvernements qui se concentrent uniquement sur la prévention de la propagation des nouveaux virus une fois qu’ils ont infecté les humains, au lieu de s’attaquer aux causes profondes. « Cette prémisse est l’une des plus grandes folies des temps modernes », assène le professeur Aaron Bernstein, du Centre pour le climat, la santé et l’environnement mondial de l’université de Harvard, qui a dirigé la nouvelle étude. Selon lui, nous devons mettre en œuvre sans tarder trois actions clés : une surveillance mondiale des virus présents dans la flore et la faune sauvage, un meilleur contrôle de la chasse et du commerce de la faune sauvage, et la réduction de la déforestation.

La faune sauvage est connue pour abriter un grand nombre de virus, et les épidémies sont de plus en plus fréquentes et graves. Depuis le début de la pandémie de Covid-19, les experts n’ont cessé de répéter qu’il fallait s’attaquer aux causes profondes. L’inaction a laissé le monde jouer à un « jeu funeste de roulette russe avec les agents pathogènes », ont-ils déclaré, et il est vital de protéger la nature pour échapper à une « ère de pandémies ».

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« Notre salut ne coûte pas cher [car] la prévention est beaucoup moins onéreuse que les traitements », fait observer le professeur Bernstein. « Si le Covid-19 nous a appris quelque chose, c’est que nous ne pouvons absolument pas compter sur les seules stratégies post-épidémies pour nous protéger. En dépensant seulement cinq centimes sur un dollar, on peut contribuer à prévenir le prochain tsunami de vies perdues à cause des pandémies en empêchant la vague d’émerger, au lieu de payer des milliards pour ramasser les morceaux. » Le professeur affirme que l’action visant à arrêter les pandémies à la source avait été ignorée parce que la réponse aux pandémies était dirigée par des scientifiques et des organisations médicales qui ne connaissaient pas la protection de la nature pour empêcher les débordements. « De plus, cette prévention primaire ne se traduit pas par des profits pour les entreprises », a-t-il ajouté.

Le rapport d’analyse utilise un langage brutal, inhabituel dans une revue scientifique. D’éminents décideurs politiques ont promu des plans selon lesquels les meilleurs moyens de faire face aux futures catastrophes pandémiques devraient consister à « détecter et contenir les menaces zoonotiques émergentes ». En d’autres termes, nous ne devrions prendre des mesures qu’une fois les humains malades. Nous ne sommes pas du tout d’accord », indique le rapport. Les auteurs critiquent en particulier le Global Preparedness Monitoring Board (GPMB), une initiative conjointe de la Banque mondiale et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), et un groupe de haut niveau du G20 sur le financement de la préparation aux pandémies, dont les rapports et les stratégies ne font aucune mention de la lutte contre la propagation.

Un porte-parole du GPMB a déclaré au Guardian qu’il soutenait les conclusions de l’analyse. « Nous convenons qu’il existe des lacunes substantielles dans les connaissances, les capacités institutionnelles et les ressources financières qui limitent la capacité à éviter l’émergence de pathogènes. Nous convenons également que l’action préventive est nettement plus rentable que l’impact direct sur les économies mondiales et les vies perdues. Le débordement et la prévention à la source sont des domaines de travail spécifiques qui bénéficieraient d’un leadership mondial. »

Un nouveau virus menaçant, sous haute surveillance

Covid-19 est né, on s’en souvient à Wuhan en Chine. Hasard, coïncidence, des chercheurs chinois de l’Université de Wuhan alertent la communauté scientifique internationale sur un autre coronavirus, le NeoCov. Selon ces scientifiques chinois, qui avaient alerté sur le coronavirus Sars-Cov-2 responsable de la pandémie actuelle, ce virus ressemble potentiellement au MERS-CoV., connu également sous le nom de Syndrome Respiratoire du Moyen-Orient. MERS-CoV a été repéré pour la première fois en avril 2012 en Arabie Saoudite. Ce coronavirus atteint le tractus respiratoire, comprenant la trachée et les poumons (bronches, bronchioles, alvéoles pulmonaires) et entraîne la survenue de la toux et de la fièvre. Dans environ 35 % des cas, les patients infectés par MERS-CoV décèdent. C’est en ce point que NeoCov ressemble à ce coronavirus du Moyen-Orient, car il aurait, selon les études en laboratoire, un taux de létalité similaire.

Le virus NeoCov n’est en réalité pas si nouveau, car il fait l’objet, sous la dénomination technique BtCoV/Neoromicia/PML-PHE1/RSA/2011, d’études scientifiques depuis plus de 10 ans. L’hôte de ce coronavirus est la chauve-souris. Pour l’heure, NeoCov se transmet d’un mammifère à un autre, sans qu’aucun cas de contamination humaine n’ait été identifié. Ce qui est toutefois mis en évidence dans les travaux scientifiques, c’est qu’à une mutation près, NeoCov serait tout de même capable d’infecter les cellules humaines. En effet, tout comme le Sars-Cov-2 responsable de la Covid-19, NeoCov aurait la capacité de s’associer au récepteur ACE2 en passant par la protéine S ou Spike. NeoCov pourrait donc être tout aussi contagieux que le coronavirus responsable de la Covid-19.

Pour parvenir à cette hypothèse, les chercheurs ont constaté qu’en éditant le génome de NeoCoV en un point très précis (la mutation T510F), le virus se liait plus facilement aux cellules humaines au cours des expériences de laboratoire. Autrement dit : une mutation dans le génome de NeoCoV pourrait le rendre apte à se lier à l’ACE2 humaine et introduire son matériel génétique dans les cellules. Une telle mutation n’a cependant pas, à cette heure, encore été observée à l’état naturel.

Rassurons-nous donc, NeoCov n’a pas muté de façon à passer de l’animal à l’organisme humain. Pas encore. Néanmoins, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré ce 27 janvier que des études supplémentaires étaient nécessaires pour déterminer si le NeoCoV constituait une menace pour l’homme. Avec la pandémie de Covid-19 qui a bouleversé le monde entier et provoqué la mort de plus de 5,5 millions de personnes, les coronavirus sont mis sous haute surveillance par les scientifiques, prêts à donner l’alerte en cas de découvertes potentiellement dangereuses pour l’homme.

La prévention, pierre angulaire de toute action contre les pandémies.

L’accumulation d’une base de données sur les virus portés par les mammifères et les oiseaux, ainsi que sur leur constitution génétique et leurs hôtes, pourrait un jour aider les chercheurs à prédire quels virus sont les plus susceptibles d’infecter l’homme. Mais à court terme, une telle base de données pourrait aider à cibler les activités de prévention : Quelles sont les forêts qui doivent rester intactes parce que les risques pour la santé publique liés à leur abattage et à la présence humaine dans ces zones sont trop élevés ? Quels animaux ne devraient pas être commercialisés ou consommés ?

De nouvelles épidémies apparaîtront invariablement. Cette bibliothèque virale permettrait d’avoir une longueur d’avance lorsque cela se produira, accélérant ainsi le développement de tests et de vaccins. Les chercheurs estiment que le coût de la collecte des données et de la constitution de cette bibliothèque se situe entre 120 et 340 millions de dollars par an.

La dernière pièce maîtresse de la prévention est la surveillance et la détection précoce, dont le coût se situe entre 217 et 279 millions de dollars. L’amélioration des soins de santé pour les communautés mal desservies qui bordent les forêts tropicales permettrait de détecter les épidémies de maladies infectieuses et de les endiguer avant qu’elles ne se propagent. De même, la nécessité de surveiller la santé des animaux sauvages est largement mis en exergue par les auteurs du rapport publié par Science Advance. Cela implique de déployer davantage de vétérinaires de terrain et de biologistes spécialisés dans les maladies de la faune sauvage, en première ligne dans la lutte contre les agents pathogènes émergents sur les points chauds de la planète.

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La mise en place et le financement de ces mesures nécessiteront une volonté politique et des engagements de la part des nations les plus riches, des ONG et des organisations internationales, ainsi qu’une collaboration large et interdisciplinaire. Il faudrait pour cela repenser les épidémies mondiales potentielles non pas comme de lointaines possibilités, mais comme un risque imminent et inévitable pour la sécurité nationale et internationale.

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