Les marques Coca-Cola, PepsiCo et Nestlé sont désignées les plus grands pollueurs plastique au monde pour la troisième année consécutive. C’est le résultat du troisième Brand Audit international du mouvement Break Free From Plastic, de l’association No Plastic In My Sea qui vient de sortir aujourd’hui. Un échec pour ces multinationales qui annonçaient en 2018 vouloir lutter pour augmenter la part de plastique recyclé dans leurs emballages.
Pour la troisième année consécutive, Coca-Cola, PepsiCo et Nestlé constituent les principaux pollueurs mondiaux en termes de déchets plastiques, selon le rapport du mouvement Break Free From Plastic, intitulé « BRANDED Vol III : Demanding Corporate Accountability for Plastic Pollution » publié aujourd’hui (1).
L’audit de marques organisé par Break Free From Plastic est une initiative annuelle d’actions citoyennes qui consiste à compter et à documenter les marques sur les déchets plastiques collectés dans les communautés du monde entier. Ce mouvement, créé aux Philippines en 2016 pour unir les voix des personnes du monde entier, milite pour mettre fin à la pollution du plastique à chaque étape de son cycle de vie. Il rassemble plus de 11 000 organisations et sympathisants individuels du monde entier pour apporter un changement systémique grâce à une approche holistique qui s’attaque à la pollution du plastique tout au long de la chaîne de valeur du plastique – de l’extraction à l’élimination – en se concentrant sur la prévention plutôt que sur la guérison, et en apportant des solutions efficaces. Les organisations membres de la BFFP et les particuliers partagent les valeurs communes de la protection de l’environnement et de la justice sociale.
Cette année, 346 494 morceaux de plastique ont été collectés dans 55 pays, grâce à 14 734 volontaires. Cette année, l’audit, qui a recensé 575 marques, s’est concentré plus particulièrement sur le travail essentiel des ramasseurs informels de déchets, principalement dans les pays du Sud. Cela a mis en lumière l’impact financier négatif qu’a le plastique à usage unique de faible valeur sur les moyens de subsistance de ces ramasseurs.
Selon Abigail Aguilar, coordinatrice régionale de la campagne sur les plastiques de Greenpeace Asie du Sud-Est, « Il n’est pas surprenant que pendant trois années consécutives ce soient les mêmes grandes marques sur le podium. Ces entreprises prétendent qu’elles affrontent la crise du plastique, mais elles continuent d’investir dans de fausses solutions et s’associent avec les sociétés pétrolières pour produire encore plus de plastique. Les entreprises multinationales comme Coca-Cola, PepsiCo et Nestlé doivent cesser leur dépendance aux emballages plastique à usage unique et s’éloigner des combustibles fossiles afin de mettre fin à cet abus, et lutter contre le changement climatique ».
Le dernier rapport de la Fondation Ellen MacArthur, sorti le 10 novembre 2020, a clairement indiqué que ces entreprises n’ont fait aucun progrès dans la lutte contre la crise de la pollution plastique, malgré une progression constatée au cours de la première année suivant la signature de l’Engagement. Et on reste loin des objectifs prévus pour 2025 : « Les progrès réalisés pour passer à des emballages réutilisables sont limités et les efforts d’élimination restent concentrés sur un ensemble relativement restreint de matériaux et de formats », déplore le rapport.
Le plastique à usage unique a des effets dévastateurs, non seulement sur la planète, mais aussi sur les communautés les plus impactées du monde. Les ramasseurs de déchets, ainsi que les membres de leurs communautés, voient une augmentation alarmante des emballages en plastique à usage unique de faible qualité. Ces emballages font l’objet d’une stratégie agressive de mise sur le marché par les grandes entreprises multinationales.
De « fausses solutions » pour répondre au problème
Les groupes Coca-Cola, PepsiCo et Nestlé ont été sollicités par l’AFP mais n’ont pas souhaité, à ce jour, commenter ce rapport. Alors que les marques reconnaissent généralement leur rôle dans la propagation de cette pollution, le rapport juge qu’elles « s’acharnent à promouvoir de fausses solutions pour répondre au problème« . La promotion du recyclage est leur manière de faire porter la responsabilité aux consommateurs, dénonce le rapport, précisant qu’à peine 9% de la totalité des matières plastiques produites depuis les années 1950 ont été recyclées. « Les entreprises continuent de tirer profit de l’abondante production de plastique à usage unique, tandis que partout dans le monde les collectivités sont obligées d’en supporter le fardeau« , a regretté Break Free from Plastics, qualifiant cette situation d' »inacceptable« .
Selon Lakshmi Narayan, cofondatrice de SWaCH Waste Picker Cooperative situé à Pune en Inde, « Les entreprises multinationales comptent sur les ramasseurs informels de déchets pour récupérer leurs emballages, ce qui leur permet de respecter leurs engagements en matière de développement durable et de justifier l’utilisation d’emballages plastique à usage unique à grande échelle. Pourtant, cette évolution vers des emballages en plastique de moindre valeur menace les moyens de subsistance des ramasseurs de déchets, qui ne peuvent pas faire de profit avec ces articles de qualité inférieure. Le système dans lequel les ramasseurs de déchets travaillent aujourd’hui doit changer. »
Il est impératif que les multinationales prennent l’entière responsabilité des coûts externes de leurs produits plastiques à usage unique, tels que les coûts de collecte, coûts de traitement, ainsi que les dommages environnementaux qu’ils causent. Si nous continuons à maintenir ce statu quo, la production de plastique pourrait doubler d’ici 2030 et même tripler d’ici 2050. Nous n’avons plus de temps à perdre.
Selon Anna Cummins, cofondatrice de 5 Gyres, « Ces pollueurs sont complices des dommages faits à nos communautés de première ligne, en continuant à produire et à vendre des emballages néfastes pour leur santé, leurs subsistances et pour l’environnement. Nous avons besoin d’une transition juste, vers une économie circulaire, sans combustibles fossiles ».
Selon Emma Priestland, coordinatrice globale des campagnes de Break Free From Plastic visant les entreprises , «Les multinationaux les plus polluantes au monde prétendent travailler jour et nuit pour résoudre la pollution plastique, mais en réalité, elles continuent à déverser une quantité faramineuse d’ emballages plastiques nocifs dans l’environnement. Nous devons arrêter la production plastique, éliminer progressivement les emballages à usage unique et mettre en place des systèmes de réutilisation robustes et standardisés. Coca-Cola, PepsiCo et Nestlé devraient montrer la voie vers l’implémentation de vraies solutions ».
Les audits de marque, qui fonctionnent comme des organismes de sondages, sont un outil tangible pour pousser les entreprises et les décideurs politiques à construire de meilleurs systèmes pour un avenir sans plastique. L’audit de marque de Break Free From Plastic (BFFP) est une initiative d’action citoyenne qui consiste à compter et à documenter les marques trouvées sur les déchets plastiques collectés lors d’un nettoyage afin d’identifier les entreprises responsables de la pollution du plastique. En collectant des données sur les déchets plastiques, on remet en question le discours de l’industrie sur les responsables de la crise du plastique et sur la manière de la résoudre. Ces audits permettent donc de recentrer l’attention sur les entreprises qui sont à l’origine du problème et donnent ainsi les moyens d’exiger qu’elles cessent de produire des plastiques jetables à usage unique inutiles.
Le rapport annuel d’audit des marques tient les entreprises les plus polluantes pour responsables de l’alimentation de la crise de la pollution plastique. Leurs efforts reposent sur le pouvoir du peuple pour s’opposer à ces multinationales.
(1) Top 10 des premiers pollueurs mondiaux en 2020 : The Coca-Cola Company ; PepsiCo ; Nestlé ; Unilever ; Mondelez International ; Mars, Inc. ; Procter & Gamble ; Philip Morris International ; Colgate-Palmolive ; et Perfetti Van Melle
Pour aller plus loin :
- Webinaires « Gérer la fin de vie des plastiques » 9 et 10 décembre 2020