Après un premier volet consacré au monde végétal, cette nouvelle exposition au Grenier à sel à Avignon interroge la relation entretenue par l’homme avec la machine, autrefois mécanique ou électronique et aujourd’hui algorithmique, dans un contexte de déploiement croissant des intelligences artifi- cielles et de grande porosité des frontières, fantasmée ou réelle, entre l’humanité et la robotique, entre la chair et le code. L’exposition participe de la trilogie Symptômes du vivant dont l’objectif est d’explorer le thème du vivant, sa place dans l’imaginaire des artistes à un moment crucial où l’érosion de la biodiversité pousse notre société à sortir du « grand partage » entre l’Homme et le reste du monde du vivant.
Qu’en est-il de cette interaction homme-machine ? Comment les artistes questionnent-ils la relation aux interfaces qui régulent nos existences à l’heure d’internet, des réseaux sociaux, des IA génératives et du Métavers ? Qu’ils la considèrent comme libératrice ou asservissante, capable d’étendre nos possibilités d’action ou au contraire menaçante pour le créateur, voire pour l’espèce humaine, elle n’en finit pas de renvoyer en miroir les craintes et les espérances de notre époque.
A travers un parcours émaillé d’oeuvres, d’objets et de films, l’exposition réunit 15 artistes d’horizons différents et autant de productions artistiques relevant de pratiques variées (installation interactive, automate, vidéo, photographie, robotique, animation, VR… ). Tour à tour allégoriques, critiques, poétiques ou tout simplement ludiques, ces oeuvres interrogent l’identité propre de l’homme, sa corporéité et son devenir, de l’obsolescence au transhumanisme. Elles invitent à se perdre là où la science et l’imaginaire se mêlent intimement.
Quand le fantasme prend corps
La machine est dans nos vies à tous et depuis bien longtemps. De l’Antiquité égyptienne ou grecque, avec les machineries hydrauliques, aux automates du siècle des Lumières ou au Robot le plus performant aujourd’hui (Unitree H1), nombreuses ont été les créatures artificielles qui ont cherché à répliquer la nature humaine pour permettre aux hommes de mieux agir. Avant même l’avènement de la robotique et l’invention du mot Robot par le dramaturge tchèque Karel Capek en 1920, la littérature s’est tout autant intéressée à la création par l’homme d’un être artificiel à son image, qu’on l’appelle Pygmalion, Golem, Ève Future ou Frankenstein.
Cette histoire est toujours en cours. Elle nous fascine comme elle captive et interroge les artistes, sans doute parce qu’elle ramène sans cesse aux contours de notre propre condition humaine. Avec l’avènement du numérique, la robotique et l’imaginaire technoscientifique qui s’y rattache sont devenus de puissants territoires de création pour les artistes contemporains qui peuvent se rêver tour à tour cyborgs, avatars, clones, créatures androïdes ou augmentées. Dans leurs oeuvres, ils nous parlent du monde automatisé à venir, soulignant pour certain les problèmes qu’il soulève (Filipe Vilas-Boas, Varvara & Mar), pour d’autres les espoirs « tranhumanistes » qu’il engendre (Stelarc, Matthieu Gafsou, Lu Yang) et pour d’autres encore la magie de ces nouvelles formes d’interaction devenues un formidable espace de jeu artistique (Bastien Faudon, France Cadet).
Artistes : Donatien AUBERT, France CADET, Thierry COHEN, Heather DEWEY-HAGBORG, Bastien FAUDON, Mathieu GAFSOU, Esmeralda KOSMATOPOULOS, Maxime MATTHYS, Julien PRÉVIEUX STELARC VARVARA & MAR, Filipe VILAS-BOAS, LU YANG
Commissariat : Véronique Baton
Exposition Le futur est déjà là – Symptômes du vivant #2, du 5 octobre au 31 décembre 2024- En accès libre (Ouverture du mercredi au samedi de 14h à 18h, sauf jours fériés).
LE GRENIER À SEL – 2 rue du Rempart Saint-Lazare – 84000 Avignon – 04 32 74 05 31 – www.legrenierasel-avignon.fr
Photo d’en-tête : FILIPE VILAS BOAS « La peau de banane intelligente #12 », 2022 /Techniques mixtes – Crédit photo : © Emile Ouroumov, La Ferme du Buisson