Ce qui frappe en effet quand on discute avec les occidentaux expatriés ou immigrés dans une ville comme Shanghai, c’est la séparation réelle qui existe entre eux et la population chinoise. Cette barrière tend à s’effacer très graduellement, du fait de l’arrivée dans les entreprises de Chinois avec une expérience universitaire ou professionnelle en Occident, et du retour des enfants de la diaspora chinoise.
Dans l’univers high-tech, c’est la même chose. Google, Twitter et Facebook croissent dans leur coin, bloqués en partie par le « Great Firewall of China » mis en place par le pouvoir central. Dans l’Empire du Milieu, leurs équivalents Baidu, Weibo et Renren s’enracinent avec leurs interfaces bigarrées presque exclusivement en Chinois. Ainsi, les internautes occidentaux n’interagissent que rarement avec leurs homologues sinophiles.
Tout cela change peu à peu. Il y a huit ans, la survie d’un visiteur dans Shanghai était assurée par de multiples papiers sur lesquels étaient inscrits en sinogrammes les adresses et les phrases du type « je veux acheter deux billets de train pour Pékin en classe couchettes molles ». Malgré le passage de l’Exposition Universelle à Shanghai et des Jeux Olympiques à Pékin, l’usage de l’anglais reste très limité dans la vie de tous les jours. Moins de 1% de la population parle cette langue.
Aujourd’hui, le service de positionnement Google Map favorise une forme de dialogue avec les chauffeurs de taxi. Quant au service de traduction Google Translate avec sa fonction de synthèse vocale, ils assurent une partie du travail quand il s’agit de demander des produits ou services simples.
Quelques outils bilingues sont disponibles. L’incroyable service mobile de navigation Explore Shanghai, lancée par l’Anglais Matt Mayer rend aisée la circulation dans le métro de Shanghai depuis 2007.
L’outil de traduction Pleco Chinese Dictionnary – issu d’un éditeur New Yorkais – est doté d’un outil de reconnaissance de caractères basé sur l’appareil photo du téléphone.
Mais cela reste très « ouest-centrique ». Heureusement, les entreprises souvent issues des universités technologiques de Beijing sortent de leur splendide isolement. En premier lieu pour s’adresser à la diaspora Chinoise présente dans la zone Asie-Pacifique et en Occident, puis pour hamçonner les autres consommateurs. L’entreprise chinoise Tencent, qui est connu pour sa messagerie instantanée QQ propose depuis les versions multilingues de son outil conversationnel mobiles, WeChat ou Weixin (??) pour les Chinois. Basé dans le Sihuan, Pinguo Technology a réussi à populariser son service de partage de photo Camera360 auprès de 90 millions de mobinautes. Quand l’outil de rencontre mobile MoMo, il est également disponible en version britannique. Sina, qui propose une des adaptations de twitter les plus populaires localement, met doucement son interface à la langue de Shakespeare. Et pour ceux qui considèrent ces traductions comme insuffisantes, la startup de Hong-Kong SurroundApp traduit automatiquement les tweets de Sina en Anglais.
Les moyens de paiement comme Alipay se diffusent doucement sur les sites occidentaux, permettant surtout aux ressortissants chinois de faire des emplettes en dehors de leur pays. Des sites de e-commerce comme JD.com, deuxième eCommerçant chinois derrière le groupe Alibaba – se lancent également pour proposer des produits Chinois – pour le moment – aux internautes d’Occident, d’Orient ou d’Afrique. Ils embarquent avec eux des marques reconnues localement comme XiaoMi, dont la gamme de produit fait immanquablement penser à celle d’Apple.
Plus futé encore, « FansTang », un projet de l’agence de « social marketing » d’origine australienne Mailman Group, dont les locaux se nichent dans le Tiánzifang (???), une enclave touristique dans la concession française où se sont regroupées bon nombre d’entreprises créatives. Ce service fera correspondre les réseaux sociaux chinois avec leurs équivalents américains… mais en mode asynchrone.
Explications : le système va extraire les interactions (commentaires, micro bloging…) des fans de stars occidentales comme Lady Gaga. Ces réactions et messages courts vont être traduits en Chinois avant d’être expurgées de tout ce qui pourrait ennuyer les autorités locales. Ils sont publiés sur la plate-forme, ne restera plus alors qu’à les insérer dans les réseaux locaux via des outils de partage. En parlant de partage, il est déjà possible pour les sites occidentaux ou les applications sur mobile de proposer des options de partage du contenu adaptées aux réseaux sociaux utilisés en Chine. Finalement, pour que la conversation s’engage entre orient et occident, il ne reste plus qu’une vraie volonté de toucher le public chinois… et une moindre volonté de contrôle du pouvoir chinois.