« Plaidoyer pour les humains : j’accuse ! », de Michel Tagne Foko – Editions de l’Onde, mai 2022 – 132 pages
Avec “Plaidoyer pour les humains : j’accuse !”, Michel Tagne Foko invite les lecteurs à partager ses voyages en Afrique et dans le monde, afin d’explorer les multiples facettes de l’africanité. Ces voyages sont autant d’occasions d’écrire sans langue de bois des chroniques dont le thème est l’humanisme, le respect de l’autre, les droits de l’homme mais aussi leur envers, le despotisme, l’injustice, l’égoïsme.
Sa vocation : témoigner, dire, avoir l’œil ouvert pour montrer la cruauté du monde, sa formidable injustice, la révolte qu’il inspire.
La variété des anecdotes, découverte d’un lieu, d’un événement, d’un homme… sont autant de sujets permettant d’exprimer une grande richesse de thèmes. Avec, toujours, la volonté de montrer le romanesque des situations, condition essentielle pour voir la société sous un regard neuf, vif et observateur.
En bannissant toute complaisance, Michel Tagne Foko peut ainsi dire : j’accuse !
Extrait :
“Je constate que le guide n’est plus là. Il a profité du brouhaha pour s’éclipser. Je ne le vois plus. J’ai pourtant cherché partout. Il est parti, comme ça, sans mot dire, sans se soucier de moi. Je n’ai même pas le temps de me morfondre. Il y a comme une attraction au milieu de la foule. Lorsqu’on s’approche, on observe un monsieur nu comme un ver. La cinquantaine environ. Pieds et mains attachés, et suspendus à un arbre. Des traces de fouet sur tout le corps. Du sang. Le visage recouvert de balafres… Les gens scandent : « Trop, c’est trop. Tu vas mourir aujourd’hui ! »
Ce que je vois est horrible. Comment peut-on infliger ce genre de chose à un être vivant ? La sûreté a manifestement laissé place aux pulsions primaires, à l’humiliation, à la barbarie. Mais de quoi est-il vraiment coupable ? De ce que j’entends, deux affirmations se contredisent :
- D’un côté, avec détermination, certains parlent de vols. Il serait un grand voleur, et passerait le temps à dérober les animaux dans le village et les environs. Aujourd’hui, on l’a attrapé en train de voler une vache. C’est la raison pour laquelle, toujours selon eux, il faudrait « l’abattre ».
- Et de l’autre, le discours n’est pas le même. On l’accuse plutôt de sorcellerie. « C’est un sorcier, il passe le temps à envoûter les femmes d’autrui », me dit un jeune homme un peu fier. Pour bien étaler son dire, et m’amener vers sa logique, m’apitoyer sur son sort, il dit : « cet homme sort la nuit, quand tout le monde est en train de dormir, il sort en esprit et va coucher les femmes enceintes dans le village pour qu’elles fassent des fausses couches (…) Ils tuent, par la sorcellerie, nos bébés dans le ventre de nos femmes (…) Mon épouse a déjà perdu un enfant à cause de lui (…) Nous l’avons attrapé aujourd’hui en train de faire la sorcellerie, il doit mourir (…) »
Cet homme va donc perdre sa vie sans connaître le motif réel de sa culpabilité. Avec quoi mesure-t-on la sorcellerie ? Est-elle quantifiable ? C’est quoi être sorcier ? La situation est tellement loufoque… Juste à côté de cette flopée de personnes déchaînées, il y a cinq militaires en train de déguster des cannes à sucre. Ils refont le monde avec une simplicité déconcertante, comme si rien ne se passait de particulier.”
Michel Tagne Foko est chroniqueur pour divers médias, écrivain, éditeur.
Membre de la société des auteurs du Poitou-Charentes, grand voyageur, il est passionné par la diversité culturelle des peuples du monde.