Imaginer demain. Chroniques cartographiques d’un monde à venir, de Julien Dupont – Editions Armand Colin, 6 mars 2024 – 208 pages
Comment s’imaginer le monde de demain ? Comment le représenter ? Quels vont être les impacts sur notre vie des changements climatiques, des crises migratoires, des inégalités qui se creusent, des guerres à venir ?
Raconter demain, réfléchir aux possibles, c’est mieux de se préparer aux grands défis qui nous attendent. Maniant une imagination réaliste, Julien Dupont, professeur d’histoire-géographie au collège, propose dans ce livre une vision scénarisée de notre avenir par les cartes. S’appuyant sur des données scientifiques (les rapports du GIEC, les données de l’Office mondial des migrations, l’INSEE, des travaux universitaires) enrichies de ce que nous propose la fiction (littérature, cinéma, séries), il cartographie les espaces et met en avant, parfois de manière étonnante voire troublante, la manière dont notre environnement va changer dans les années à venir.
Écosystèmes, habitat, ressources, frontières, migrations, technologies, etc., sont déclinés au fil de ces chroniques cartographiques, qui vont de la prospective réaliste à court terme à la dystopie la plus poussée. L’auteur utilise pour ce faire les moyens du bord : les données scientifiques dont nous disposons maintenant de plus en plus démocratiquement, les fictions qui accompagnent note séjour dans l’espace-monde et puis un pinceau et de l’aquarelle, dont l’usage devrait se perpétuer encore quelques décennies après la disparition de l’informatique.
Les cartes qui illustrent ces scénarios visent à faire dialoguer différentes régions du monde, mettent en lumière beaucoup de petites îles – microcosmes témoins des époques anciennes, préfigurant aussi les évolutions futures – dessinent des espaces imaginaires, aussi, dans lesquels se déroule une partie important de nos vies.
A travers ces expériences cartographiques artisanales, l’auteur travaille sur des transcriptions, des comparaisons, des allers-retours entre passé, présent et futur, en mêlant prospectives et prophéties. La plupart des ébauches de scénarios présentés n’ont aucune chance de se matérialiser ; d’autres sont peut-être plus crédibles. Certains concernent déjà une part non négligeable des habitants de la planète, pour qui la fin du monde (guerres, épidémies, famines, …) fait partie du quotidien.
Une lecture subjective et sensible de l’auteur, qui encourage le lecteur à s’interroger à son tour et à construire sa vision personnelle des futurs de notre monde.
Sommaire de l’ouvrage :
Prologue : la scénarisation du futur.
1 – Scènes d’exposition. North Sentinell / North Oléron en 2124 : rester à l’écart. Les scénarios du Giec : nous sommes quelque part par-là (mais ça bouge tout le temps). La montée des eaux après la fonte du dernier glacier. Comment représenter les inégalités de développement ? Quelques stations d’anticipation cinématographiques des années 50 à nos jours. La littérature d’effondrement. Chamonix demain : trois scénarios.
2 – Le 1er rôle (La trace de l’Homme). L’île Cocos, un environnement préservé des hommes. Les zones inhabitables en 2100. L’Amazonie légale : évolution de la déforestation. Manaus, confluent de l’Amazone et du Rio Negro. L’Amasaônie. Un désert amazonien. La disparition des lacs. Le bassin du lac Victoria (île de Migongo). La vie de château (période post-Anthropocène).
3 – L’Épice (nos ressources et nos besoins). Hashima : épuiser les ressources et puis évacuer les lieux. –Métaux « électriques » et transition écologique. L’expansion de l’Empire chinois au XXIIe siècle. Groenland, villes minières et stations balnéaires en 2124. La ruée vers l’or en Antarctique. Le monde dans 200 millions d’années (Nouvelle Pangée). Pripiat, Tchernobyl : visiter la fin du monde. Loin des zones irradiées, survivre dans les hautes terres du Drômardèche.
4 – Le décor (Habiter le futur). Malé (Maldives) : la ville partout (et au-delà). Déménager : des îles en voie de submersion. Villes et bidonvilles d’hier, aujourd’hui et demain. De l’île des Manhattes à la cité engloutie de Manhattan. L’expansion de l’urbanisation. Vivre dans les interstices : le rond-point de Croix-Luizet. Jour 142 : traverser les ruines d’une ville ancienne. Paris, après les Grandes Pluies de la fin du XXIe siècle.
5 – Les lieux sur les chemins (Mobiles, immobiles). Diego Garcia : Déplacer les populations. L’île Christmas : protéger la nature, incarcérer des réfugiés. Des îles divisées par des frontières internationales. Nouvelle Guinée : sa frontière rectiligne, ses 1 000 langues parlées. La Méditerranée évaporée. La Méditerranée : croisières et nauf.
Julien Dupont est professeur d’histoire-géographie dans un collège de la banlieue lyonnaise. Il écrit des fictions littéraires et radiophoniques, a vécu quelque temps en Égypte et a accompagné des groupes de touristes en Amérique du Sud, deux expériences qui l’ont interrogé sur les différences de mode de vie dans le monde est les questions migratoires.
Grand lecteur, il s’inspire des œuvres de Jorge Luis Borges, Julio Cortazar, Henri Michaux ou encore Alberto Manguel. Depuis quelques années, il s’est lancé dans la cartographie, en particulier la fiction cartographique, utilisant les cartes pour poser un point de vue sur le monde, associant souvent recherches scientifiques et éléments de fiction. Certaines ont été reproduites dans la presse (CQFD journal, revue Gibraltar) et un dossier du journal Le Monde (21/05/21) évoque son travail sur la cartographie du confinement.