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Glyphosate : Pas d’inscription d’interdiction dans la loi d’ici 3 ans

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Alors que les députés choisissent les amendements qui figureront dans la loi Agriculture et Alimentation, projet de loi qui est le fruit des États généraux de l’alimentation, la sortie du glyphosate d’ici 2021 ne sera pas gravée dans la loi. C’était un engagement présidentiel, mais le gouvernement assure que l’herbicide controversé sera malgré tout abandonné d’ici 2021, « en partenariat » avec les industriels.
 
Une étude du MnHn l’a confirmé : les pesticides, en détruisant les insectes et invertébrés dont se nourrissent nombre d’oiseaux, rompent toute la chaîne alimentaire. Les herbicides ont un impact similaire, nombre des « mauvaises herbes » détruites empêchent les pollinisateurs de se nourrir, et disparaissent à leur tour.
Le glyphosate, ce puissant herbicide, présent notamment dans le Roundup de Monsanto, n’est pas en reste, on le soupçonne notamment d’être cancérigène pour l’homme (une étude du Centre international de recherche sur le cancer, agence de l’Organisation mondiale pour la santé, le confirme en 2015) et ses multiples effets perturbateurs sont de mieux en mieux connus. Longtemps vendu comme inoffensif pour la faune, il affecte les sols où il est répandu plus longtemps que prévu et passe facilement des feuilles aux racines. Il présente aussi un impact imprévu sur la vie de nombreux animaux sauvages, notamment sur leur reproduction.
 
Après la décision de l’Union européenne en novembre 2017 de renouveler la licence de l’herbicide pour cinq ans, Emmanuel Macron avait promis que la substance, principe actif du Roundup de Monsanto, serait interdite en France « dès que des alternatives auront été trouvées, et au plus tard dans trois ans ».
Mais dans le projet de loi du ministre de l’Agriculture Stéphane Travert, examiné en première lecture au Palais Bourbon pour le septième jour d’affilée, point d’article sur le glyphosate, bien que la substance soit jugée cancérogène probable par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), mais « probablement non cancérogène » par l’Agence européenne pour la sécurité des aliments (Efsa).
A ce propos, Générations futures dévoilait en novembre 2017 un nouveau rapport scandaleux sur l’évaluation de la toxicité du glyphosate ou comment les études montrant les effets négatifs du glyphosate ont souvent été rejetées de manière injustifiée (non scientifique) lors de l’évaluation. Tout d’abord le rapport d’évaluation des risques du glyphosate ne contient que 51 % des études universitaires publiées qui devraient s’y trouver (c’est-à-dire 76). Parmi ces études, seulement 24 ont été discutées.
De même de nombreuses études de l’industrie ne sont tout simplement pas évaluées en évoquant une raison scientifique spécifique pour rejeter ou accepter leurs conclusions. Ce rapport met en évidence 49 rejets de résultats de toxicité. Sur ces 49 rejets, 45 l’ont été pour des raisons contestables ou très contestables scientifiquement. L’ analyse explicite plus en détail ces motifs (page 3).

L’absence ou l’insuffisance d’études à long terme fait craindre le pire, faudra-t-il attendre de découvrir tous ses effets néfastes ou le principe de précaution prévaudra-t-il ?

La Loi Agriculture et Alimentation à l’Assemblée nationale : l’éléphant accouche d’une souris

Alors que des amendements clé avaient été déposés par des députés pour améliorer notre alimentation, le ministre de l’Agriculture a choisi de botter en touche sur les sujets qui fâchent, dénonce foodwatch. « Pas besoin d’une loi, faites confiance au Gouvernement et aux engagements volontaires des industriels », a répété en substance Stéphane Travert.
Dans ce match qui oppose la santé publique aux intérêts des industriels et à l’agrochimie, il faut un cadre et des règles qui protègent tout le monde. C’’est aussi l’avis de milliers de citoyens et citoyennes, dont plus de 185 000 ont signé une pétition de foodwatch et 30 organisations, pour que l’engagement d’Emmanuel Macron sur l’interdiction du glyphosate en trois ans en France soit ancré dans la Loi.
 
Que peut-on attendre d’un projet de Loi qui affiche comme l’un de ses objectifs « une alimentation saine et durable » ? Pour foodwatch, ce projet de Loi était une formidable opportunité pour mieux informer et surtout mieux protéger la santé des consommateurs et des consommatrices. Car aujourd’hui, le lien entre alimentation et santé n’est plus à démontrer : « La contamination de notre alimentation par des substances chimiques dangereuses n’est pas sérieusement prise en compte. Et ne pas inclure l’interdiction du glyphosate promise par E. Macron est tout simplement incompréhensible. Avec cette Loi, en l’état, l’agrochimie et les lobbies de la malbouffe ont encore de beaux jours devant eux ! », dénonce Karine Jacquemart, directrice de foodwatch.
 
Sur fond de « controverse scientifique sur sa dangerosité », le ministre a estimé nécessaire d' »approfondir les connaissances » en vue du prochain débat européen.
En début de soirée, M. Travert a également rétropédalé sur un sujet lié : il s’agissait de permettre d’interdire ou d’encadrer l’utilisation des pesticides à proximité des résidences habitées, via un amendement gouvernemental de dernière minute. Des dispositions législatives devaient être prises pour réduire les risques concernant les riverains des zones agricoles liés à l’utilisation de produits à proximité des lieux d’habitation. Plusieurs expertises doivent être confiées à l’Inserm, l’Inra, l’Ineris ou encore l’Anses pour mieux appréhender les effets des pesticides sur la santé humaine ou sur les écosystèmes. Afin de mieux protéger la biodiversité, notamment les pollinisateurs, le cadre réglementaire devant évalué dans les 6 mois. 
Le ministre l’a retiré face à une large levée de boucliers de la droite, du centre et du MoDem, qui s’inquiétaient du manque de précisions ou des conséquences pour les agriculteurs. « Travaillons, et nous y reviendrons », a cependant déclaré le ministre.
 
« A ce stade, soyons en confiance » avec les agriculteurs, a plaidé le chef de file LREM Richard Ferrand, menaçant de légiférer en cas de « mauvaise volonté ».
 

« Renoncement »

Des amendements notamment de la commission du Développement durable de l’Assemblée et de l’ex-ministre PS Delphine Batho, qui posaient un terme en 2021, ont été massivement rejetés.
Même sort pour un amendement prévoyant des dérogations possibles jusqu’en 2023, repoussé par 63 voix contre 20. La proposition était portée par Matthieu Orphelin (LREM), proche du ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot, et cosignée par une cinquantaine de membres du groupe majoritaire. En février, le ministre s’était dit prêt à envisager des « exceptions » pour les agriculteurs qui ne seraient pas « prêts en trois ans ».
« C’est un signal attendu par beaucoup », a plaidé en vain M. Orphelin, alors que deux pétitions ont rassemblé « plus de 400.000 Français ».
 
L’ex-secrétaire d’Etat à la Biodiversité Barbara Pompili (LREM), cosignataire d’un des amendements, a dit lundi soir sa « peur » de ne pas arriver à « tenir » la promesse présidentielle « dans trois ans ».
L’Insoumis Loïc Prud’homme a jugé le sujet « emblématique de ce qu’est le renoncement du gouvernement sur le modèle agricole ».
A l’inverse, la droite et le centre se sont opposés à ces amendements pour ne pas « pénaliser les agriculteurs » (LR).
 
Espérant que les députés n’alourdissent « pas trop la barque des agriculteurs », la présidente du puissant syndicat agricole FNSEA, Christiane Lambert, avait plus tôt rappelé à l’AFP que « la profession s’est engagée à réduire l’usage et l’impact des pesticides avec 40 organisations et 4 ministères, via un +contrat de solutions+ ».
 
De son côté, la Confédération paysanne avait réitéré sa demande d’interdiction dans 3 ans.
 
Pour le député européen écologiste Yannick Jadot, il qualifie ce refus de « terrible gâchis ». Invité de France Inter ce mardi 29 mai, il a accusé le ministre de l’Agriculture, Stéphane Travert, de « négationnisme écologique » et de plier « en permanence » depuis sa prise de fonction face au lobby agro-industriel. Un lobby « qui a dicté la loi et qui a gagné contre la société, contre la santé, contre l’environnement et contre tous les paysans », a également jugé Yannick Jadot.
 
Dans le projet de loi figurent en revanche des mesures pour réduire les pesticides (interdiction des remises, rabais et ristournes, encadrement de la publicité…), auxquelles les députés ont donné leur feu vert.
Les députés ont aussi approuvé une extension du champ de l’interdiction des néonicotinoïdes, insecticides « tueurs d’abeilles ».

Un plan d’actions pour réduire la dépendance aux produits phytopharmaceutiques

Pourtant, le 25 avril dernier, un plan d’actions du gouvernement sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides avait été présenté. Ce plan s’articulait autour de quatre priorités :
– diminuer rapidement l’utilisation des substances les plus préoccupantes pour la santé et l’environnement, dans le prolongement des recommandations du rapport inter-inspection de fin 2017 ;
– mieux connaître les impacts pour mieux informer et protéger la population et les professionnels et préserver l’environnement ;
– amplifier la recherche-développement d’alternatives et la mise en œuvre de ces solutions par les agriculteurs ;
– renforcer le plan Ecophyto 2, améliorer sa gouvernance et son fonctionnement.
 
Pour assurer la réduction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques, des leviers législatifs et financiers seront mobilisés : le projet de loi issu des EGA, actuellement en discussion à l’Assemblée nationale, comprend ainsi des dispositions relatives à la séparation de la vente et du conseil sur les produits phytopharmaceutiques. Le grand plan d’investissement sera en partie mobilisé pour accompagner la transformation des systèmes de production, la construction et la diffusion d’alternatives aux produits phytopharmaceutiques.
 
Par ailleurs, la redevance pour pollutions diffuses sera modernisée et progressivement renforcée. Elle sera davantage modulée pour mieux tenir compte de la dangerosité des produits ; ses recettes contribueront à financer l’accompagnement des agriculteurs, dans le cadre du plan Ecophyto et de la conversion à l’agriculture biologique (de l’ordre de +50 M€ à compter de 2019).
 
Parallèlement la recherche sera renforcée pour offrir aux agriculteurs un panel de méthodes alternatives avec notamment un soutien accru aux produits de biocontrôle. L’accompagnement renforcé des collectifs d’agriculteurs permettra la diffusion de ces pratiques et une transition durable vers une agriculture moins dépendante des produits phytopharmaceutiques.
 
La mise en place rapide de plusieurs groupes de travail a été annoncée sur les actions du plan nécessitant des concertations complémentaires, comme par exemple l’accompagnement des agriculteurs ou encore la mise à disposition de produits alternatifs de protection des cultures  (biocontrôle, préparations naturelles peu préoccupantes).
 
Enfin le Gouvernement adoptait une ligne claire au niveau européen en se positionnant systématiquement contre la prolongation ou le renouvellement des substances qui remplissent les critères d’exclusion au niveau européen et en avançant avec la Commission et les États membres vers une réforme des agences européennes avec notamment la création d’un mécanisme permettant de financer des études indépendantes et une plus grande transparence.
 
Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, saluait alors « le travail et la responsabilité de tous les acteurs qui ont permis au Gouvernement de mettre aujourd’hui sur la table un plan d’action sans précédent. Tout le monde est dans une démarche de progrès, ces mesures seront très rapidement mises en œuvre et nous permettront à la fois d’atteindre nos objectifs de réduction des phytosanitaires et de construire les alternatives notamment à l’utilisation du glyphosate ».
 
Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, déclarait : « Nous devons améliorer nos connaissances sur les impacts des pesticides sur notre santé et sur notre environnement, afin de protéger nos concitoyens. C’est pourquoi je veillerai à ce que les parties prenantes, dans leur ensemble, puissent contribuer à la mise en œuvre des actions de la feuille de route : ces enjeux sont l’affaire de tous ».
 
Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation soulignait que « ce plan d’actions illustre l’engagement du Gouvernement en faveur d’une mutation ambitieuse de nos pratiques agricoles. Pour y parvenir, je souhaite que l’ensemble des acteurs de la recherche soient mobilisés, pour placer la rigueur scientifique au cœur du processus d’élaboration et de décision, au niveau national comme au niveau européen et international ».

 

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« Le chef de l’Etat a fixé un objectif ambitieux et pragmatique et nous mettons toutes les chances de notre côté en poursuivant les recherches sur les alternatives », a justifié M. Travert dans l’hémicycle. Mais il y a 40 ans que le Glyphosate existe et aucune alternative n’a encore été trouvée ?! 
De plus en plus, nous comprenons que nous devons et pouvons nourrir la planète sans l’empoisonner. Un rapport de l’ONU de janvier 2017, présenté le 8 mars au conseil des droits de l’homme des Nations unies, dénonce d’ailleurs le mythe des pesticides « nécessaires ». Il est temps de travailler avec la nature plutôt que contre elle, et de soutenir les paysannes et paysans plutôt que de les exploiter.

(Source : AFP)
 
 
 

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