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Ce ver marin possède un sang qui pourrait être vital pour les malades du coronavirus

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Cette startup bretonne, Hemarina, a développé une molécule issue d’un ver marin permettant de transporter de l’oxygène dans le sang. Pour le Dr Franck Zal, à l’origine de cette découverte, il s’agit d’une « respirateur moléculaire » qui pourrait remplacer les respirateurs artificiels dont on manque tant pour soigner les malades du Covid-19. Preuve de l’urgence, l’Agence nationale de santé a donné en 48 heures son autorisation pour que deux hôpitaux parisiens lancent sans délai les premiers essais.

Le produit mis au point par le laboratoire biopharmaceutique Hemarina à Morlaix utilise les étonnantes propriétés d’un petit ver marin, que l’on trouve dans le sable de toutes les plages. L’hémoglobine de cette bestiole, l’arénicole, présente la capacité de transporter des quantités inégalées d’oxygène vers les organes et les tissus.

Les vertus extraordinaires de l’arénicole

Ce ver marin capable de faire des miracles en termes d’oxygénation a déjà été utilisé avec succès dans le domaine des greffes. Le professeur Lantieri, célèbre pour avoir réalisé en 2010 la première greffe totale du visage au monde a déjà utilisé les vertus de ce ver. Il ne tarit pas d’éloges et affirme que la découverte du Dr Zal est « aussi importante que celle de la pénicilline ». Il poursuit en expliquant qu’après avoir utilisé la molécule d’Hemarina pour conserver un greffon, les résultats furent si spectaculaires qu’il n’envisage désormais plus aucune greffe sans le recours à cette technique. « C’est comme si le greffon n’était pas sorti du donneur, comme s’il n’y avait eu que quelques minutes sans oxygène. C’était absolument extraordinaire ».

Pour le professeur Lantieri, il ne fait aucun doute que l’utilisation des propriétés de ce ver marin pourrait oxygéner les patients atteints de syndrome respiratoires aigus du fait du Covid-19. Cette molécule permettrait d’éviter le recours à des respirateurs qui font actuellement cruellement défaut dans tous les hôpitaux du monde confrontés aux vagues de l’épidémie. Il précise : « Peut-être pas tout le temps, mais quelques heures, et ces quelques heures ou quelques jours nous permettent de gagner du temps. Et le temps, c’est extrêmement important dans cette bataille ».

Une centaine de doses de cette molécule ont été acheminées en urgence vers deux hôpitaux parisiens : l’hôpital Georges Pompidou et la Pitié-Salpêtrière. Elles ont été injectées par intraveineuse à 10 patients qui sont en insuffisance respiratoire dès hier, mardi 31 mars.

La bioinspiration du Dr Zal

Alors, Franck Zal, futur prix Nobel ? La découverte de Franck Zal porte sur l’arénicole, pourtant très connue des biologistes, alors qu’il travaille encore au CNRS en 2007. En observant ces vers sur les plages de sa Bretagne, le chercheur est intrigué par la capacité qu’ont ces organismes à « respirer » entre deux marées. Il se rend compte que ces vers ont la faculté de transporter de l’oxygène en quantité dans leur sang, ce qui leur offre une autonomie considérable. Il découvre alors que ces arénicoles disposent d’une molécule faisant office de transporteur d’oxygène, fonction habituelle des hémoglobines contenues dans les globules rouges. Le sang de ce ver possède des propriétés très précieuses : d’une part, l’hémoglobine d’arénicole est universellement transfusable et, n’étant pas portée par des globules rouges, elle peut être lyophilisée ; d’autre part, elle est cinquante fois plus oxygénante que l’hémoglobine humaine.

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En observant la nature, en s’en inspirant, le Dr Zal a ainsi fait une découverte considérable. UP’ avait interrogé le médecin dans le cadre de rencontres sur le biomimétisme. Il expliquait son travail :

Le potentiel d’application de cette découverte est immense, et l’une d’elles consiste, comme l’a fait le professeur Lantieri, à oxygéner les organes à greffer. Lors d’une transplantation, le premier ennemi du chirurgien est l’hypoxie (la suffocation) du greffon ; des centaines d’organes sont ainsi perdus dans le monde entier par manque d’une hémoglobine suffisamment performante pour les préserver et presque 20 000 Français attendent chaque année pour une greffe. La taille réduite de la molécule est 250 fois plus petite qu’un globule rouge, ce qui lui  permet de faire circuler et de délivrer de l’oxygène dans les zones ou la circulation est réduite par un traumatisme comme un œdème cérébral, mais aussi d’oxygéner les personnes souffrant d’hémorragies. De plus, comme la molécule n’est entourée d’aucune cellule – qui attribuent notamment le rhésus et le groupe sanguin – elle est universelle.

L’équipe du Dr Zal, basée à Morlaix, dans le Finistère nord, a déjà travaillé sur plusieurs utilisations différentes de la molécule issue du ver marin : un système d’oxygénation des greffons avant les transplantations, un substitut sanguin, notamment pour traiter les AVC en urgence, et un pansement qui permet d’accélérer la cicatrisation, notamment pour les personnes atteintes de diabète. 

La PME bretonne Hemarina possède un portefeuille de 18 brevets internationaux et a ouvert une filiale à Boston, ainsi qu’une ferme de production de vers marins à Noirmoutier.

En participant à la lutte contre le Covid-19, l’équipe du Dr Zal porte l’espoir de nombreux malades et médecins. « Le but est d’utiliser cette molécule comme une sorte de respirateur moléculaire avant que les patients ne basculent dans un processus lourd de réanimation », souligne Franck Zal, rappelant le manque actuel de respirateurs artificiels. Son entreprise est autosuffisante puisqu’elle possède sa propre ferme d’élevage de vers marins ; elle dispose de 5 000 doses prêtes à être utilisées et pourrait en produire « assez rapidement » 15 000 autres.

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