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La destruction de la nature coûte une fortune, au point de menacer la stabilité économique

La destruction de la nature coûte une fortune, au point de menacer la stabilité économique

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La biodiversité est la base de la vie sur notre planète. Mais nous érodons celle-ci à un rythme qui nuit aux écosystèmes. Pourtant, ce sont eux qui nous fournissent nourriture, eau et air pur. Cette destruction nous coûte très cher et pourrait causer des risques importants pour la stabilité économique, financière et sociale. Ce ne sont pas des écolos radicaux qui le, disent, mais les principales banques centrales de la planète.

Les banques centrales sous-estiment la menace significative que représente la perte de la biodiversité et de ses richesses dont dépendent pourtant entreprises et institutions financières, s’inquiète le 24 mars dernier un rapport auquel ont participé… des banques centrales.

Les impacts du changement climatique sont de plus en plus intégrés dans l’évaluation des risques économiques, mais c’est beaucoup moins le cas pour des menaces similaires issues de la destruction de la nature, selon ce rapport élaboré par des chercheurs et le réseau de banques centrales NGFS (Network of Central Banks and Supervisors for Greening the Financial System). « La biodiversité est la base de la vie sur notre planète », commente Ravi Menon, président du NGFS. « Mais nous érodons la biodiversité à un rythme qui nuit aux écosystèmes qui nous fournissent nourriture, eau et air pur. Ce qui pourrait causer des risques importants pour la stabilité économique, financière et sociale ».

Le rapport est publié au moment où les délégations de près de 200 pays étaient réunies à Genève dans le cadre de négociations visant à établir d’ici la fin de l’année un accord pour mieux protéger la biodiversité.

Le texte souligne l’impact que le système financier peut avoir sur la nature, via les choix de prêts, d’investissements et d’assurance et note aussi la dépendance des systèmes économiques et financiers envers des écosystèmes fonctionnels et en bonne santé. Par exemple, les rendements agricoles, qui sont menacés par la réduction des populations de pollinisateurs victimes des pesticides ou de la réduction de leurs habitats.

La banque inter-américaine de développement a de son côté estimé que les politiques visant à empêcher l’Amazonie d’atteindre le point de basculement qui pourrait éventuellement la transformer en savane (freiner la déforestation, investir dans une agriculture durable, améliorer la gestion des incendies) pourraient générer environ 340 milliards de richesse supplémentaire.

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Le rapport souligne que faire la transition vers une économie mondiale protectrice de la nature est un défi. « Les politiques des gouvernements ne sont pas forcément dans l’erreur, » note Nick Robins, de la London School of Economics, qui a codirigé ce rapport. « C’est juste peut-être que les investissements actuels des entreprises et des institutions financières ne sont pas conformes à un écosystème en bonne santé ».

Certains pays ont commencé à prendre des mesures, note l’étude, qui appelle malgré tout les banques centrales à élaborer une approche coordonnée pour répondre à la crise mondiale de la biodiversité. « L’inaction aussi est un choix », souligne Nick Robins, insistant sur le fait que les menaces sur la nature devraient être intégrées dans l’évaluation des risques des banques centrales. Parce que « la perte de biodiversité est une menace pour la stabilité financière ».


Entretien avec Nick Robins, professeur à la London School of Economics, qui a participé au rapport

Quel est l’impact potentiel de la perte de biodiversité sur les économies ?

NR: La perte de biodiversité menace la stabilité financière. Les gens commencent à réaliser que la perte de biodiversité et la dégradation de la nature est un problème important en tant que tel, mais aussi profondément interconnecté au changement climatique.

Il est important de commencer à réfléchir à la façon dont ces deux menaces convergent, ne fût-ce que parce certains des facteurs sont les mêmes – changement d’usage des terres et déforestation – mais aussi parce que des écosystèmes sains sont vraiment importants pour être résilients face aux chocs.

En quoi les banques centrales et les institutions financières devraient-elles changer leur approche ?

NR: Pour les banques centrales, l’approche est la prudence. Être prudent signifie examiner les éléments probants et agir suffisamment à temps pour ne pas être confrontés à des risques irréversibles, que vous ne pouvez pas gérer.

Nous devons investir dans le climat et la nature, sans quoi, à un certain point, les services rendus par les écosystèmes seront perturbés. L’idée clé est que nous sapons la base des ressources de notre prospérité. De nombreuses personnes partent du principe que les sols, l’eau potable, les océans sont inépuisables, mais (…) ils dépendent de la protection de la biodiversité.

Quels sont les problèmes structurels du système financier qui détruisent la nature ?

NR: Une série d’échecs systémiques – politique, des marchés, des institutions – conduit à cette dégradation. Avec le changement climatique et les problèmes environnementaux, nous devons nous assurer que les produits que nous achetons sur des marchés sont basés sur un usage durable de la nature, avec des prix reflétant la réalité écologique.

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Le Produit intérieur brut (PIB) n’est pas toujours une mesure utile car il n’est pas enraciné dans les réalités physiques de notre planète.

Qu’est-ce que regardent les institutions financières dans le processus de l’ONU pour un nouvel accord protégeant la biodiversité ?

NR: Le sujet monte en terme politique, scientifique, de conservation et nous espérons tous que cette année, un grand pas sera fait concernant la réponse des gouvernements avec ce cadre mondial pour la biodiversité. Tout cela fait de la biodiversité une question financière prioritaire.

Nous avons un texte de négociations, avec différents objectifs, dont l’un souligne la nécessité d’aligner les flux financiers avec ce qu’ils appellent les valeurs de la biodiversité. (…) Nous avons aussi besoin que les entreprises et le secteur financier mesurent, rendent compte et communiquent leurs impacts et leur dépendance à la biodiversité.

Un troisième point concerne les impacts. Comment s’assurer que les institutions financières allouent du capital, des prêts, investissent en ayant un impact positif ? Nous devons aussi nous assurer que les institutions financières réduisent leurs impacts négatifs sur la biodiversité.

Qu’ont appris les banques centrales de l’analyse des risques climatiques ?

NR: L’engagement du réseau de banques centrales NGFS de faire face aux risques financiers liés à la nature est historique. Avec le travail effectué ces cinq dernières années sur les risques climatiques, je pense que la réponse du système financier à la perte de biodiversité peut être plus rapide. La biodiversité est clairement une question très compliquée. Mais nous avons une boîte à outils, nous ne partons pas de rien.

Avec AFP

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