A la Conférence des Nations Unies pour l’océan en juin 2022, la Directrice générale de l’UNESCO a appelé la communauté internationale à renforcer au plus vite ses actions « pour mieux comprendre et mieux protéger les océans ». L’humanité a dix ans devant elle pour comprendre que la Terre est d’abord et avant tout un océan. « Notre destin dépend de la façon dont nous en prenons soin, ensemble. »
A Lisbonne, Audrey Azoulay, Directrice générale de l’UNESCO, Marcelo Rebelo de Sousa, Président du Portugal, et Uhuru Kenyatta, Président du Kenya, ont réuni l’Alliance de la décennie pour l’océan. Instaurée à l’occasion de la Décennie des sciences océaniques pour le développement durable (2021-2030) conduite par l’UNESCO, cette instance permet d’accroître la coopération internationale en matière de recherche, d’éducation et de protection des océans. « Grâce à cette Alliance, nous avons déjà réuni 920 millions de dollars, qui financent une centaine d’actions », a salué Audrey Azoulay en ouverture de cette réunion. « Mais l’essentiel du chemin reste à faire. L’océan est encore trop souvent dans l’angle mort des consciences et des politiques publiques. Nous ne le comprenons pas et nous ne le protégeons pas suffisamment. Il y a urgence à renverser radicalement la tendance […] L’humanité a 10 ans devant elle pour comprendre que la Terre est d’abord et avant tout un océan. », a-t-elle appelé devant les dirigeants publics et les partenaires du secteur privé.
Mieux comprendre, mieux protéger
La Directrice générale de l’UNESCO pose comme première priorité de « faire progresser l’état des connaissances ». La recherche océanographique ne pèse en moyenne que 2% des budgets nationaux de recherche, tandis que seuls 21% des fonds marins sont cartographiés. Ces données sont pourtant essentielles pour comprendre les courants, recenser les ressources halieutiques ou identifier les risques géologiques. L’UNESCO s’est engagée à l’action internationale dans ce domaine. Elle vise qu’au moins 80% des fonds marins soient cartographiés d’ici 2030. Le projet de cartographier en haute résolution au moins 80% des fonds marins d’ici 2030, par le biais du programme Seabed 2030 de la Carte générale bathymétrique des océans, permet une collaboration entre l’UNESCO et l’Organisation hydrographique internationale (OHI), avec le soutien spécial de la Nippon Foundation, la plus grande fondation privée du Japon.
Deuxième priorité : mieux protéger l’océan. « Cela implique d’augmenter rapidement la surface des aires marines bénéficiant de mesures de sauvegarde », prône Audrey Azoulay. Grâce aux sites du patrimoine mondial de l’UNESCO, 20% des réserves mondiales de carbone bleu sont déjà protégées : des récifs coraliens, des mangroves ou encore des herbiers qui contribuent à limiter le dérèglement climatique en stockant massivement le CO2.
L’UNESCO compte aussi plus de 210 000 km² de zones de biosphère : un programme imaginé dans les années 70, alors pionnier du développement durable, qui repose sur un équilibre entre l’homme et son environnement. Dans le même esprit, l’Organisation sauvegarde des traditions et des savoir-faire autochtones qu’il est important de transmettre aux jeunes générations, notamment en matière de pêche durable.
Moins de 2% des budgets de la recherche investis dans les sciences océaniques
La disponibilité et l’allocation de fonds en faveur des sciences océaniques continuent de varier considérablement selon les pays et les régions mais, dans l’ensemble, le financement des sciences océaniques semble remarquablement faible par rapport à de nombreux autres domaines de recherche et d’innovation. En moyenne, seul quelque 1,7% du total des dépenses intérieures brutes en recherche et développement a été consacré aux sciences océaniques en 2017, cette part s’échelonnant entre 0,03% environ et 11,8% au Pérou, pays leader en la matière, suivi de l’Afrique du Sud (5,6 %), de l’Irlande (5,3%), de la Norvège (4,4 %) et du Portugal (3,5%).
L’éducation pour clef de voûte
« Mais pour que ces actions aboutissent et que nous parvenions à des résultats tangibles, nous devons aussi embarquer avec nous toute la société. C’est le rôle majeur de l’éducation. », a rappelé Audrey Azoulay.
L’initiation à l’océan est définie comme « une compréhension de l’influence de l’océan sur vous et de votre influence sur l’océan ». Il faut donc soutenir les institutions de recherche océanique du monde entier dans le renforcement de l’engagement du public et l’intensification de l’initiation à l’océan afin que nous puissions tous mieux comprendre les mesures à prendre pour préserver la santé de nos océans. Le Portail d’initiation à l’océan de l’UNESCO est un guichet unique mondial qui fournit des ressources et des contenus à tous, dans le but de créer une société sensibilisée à l’importance de l’océan, qui soit capable de prendre des décisions éclairées et responsables en matière de ressources océaniques et de durabilité de l’océan.
Le 10 février dernier à Brest (France), lors du One Ocean Summit, Audrey Azoulay a annoncé l’engagement de l’UNESCO à « inclure l’éducation relative à l’océan dans les programmes scolaires de ses 193 États membres d’ici à 2025 ». Afin d’atteindre cet objectif, l’UNESCO a remis aux gouvernements un kit pour l’éducation relative à l’océan, qui contribuera à promouvoir à l’avenir une nouvelle relation plus durable entre les humains et l’océan.
Elle développe aussi des campagnes mondiales de sensibilisation, à l’image de « Génération Océan », dont la surfeuse brésilienne Maya Gabeira est devenue lundi la porte-parole en étant désignée Ambassadrice de Bonne Volonté de l’UNESCO.
Des exemples d’éducation à l’océan ont déjà fonctionné. Tels que le projet SeaBeyond, mené en collaboration par le Groupe Prada et l’UNESCO, un programme éducatif de sensibilisation à la durabilité de l’océan à l’intention des établissements du secondaire. Plus de 300 élèves de dix pays ont participé au premier cycle du projet, un concours de campagnes de sensibilisation à l’océan développées par les élèves pour leurs camarades.
Lors d’une cérémonie de remise des prix en ligne, le projet gagnant a été annoncé : un court dessin animé intitulé Redes circulares : Cerco ao plástico no mar (« Filets circulaires : Une mer de plastique »), montrant la pollution plastique catastrophique qui met en danger les écosystèmes océaniques et la manière de collecter les déchets plastiques pour les recycler. Il a été développé par l’école portugaise « Agrupamento de Escolas de Vialonga » à Vialonga (Lisbonne).
La deuxième place a été remportée par la division internationale du lycée de Shanghai (Chine), avec un jeu de société, Environopoly, qui vise à apporter à la fois divertissement et connaissances environnementales aux élèves.
Venait ensuite le Colegio Latino, à Villahermosa, au Tabasco (Mexique), avec une campagne intitulée « Sea Beyond », consacrée à l’impact des microplastiques sur l’océan.
Prada a attribué 5 000 euros à l’école gagnante, pour investir dans des matériels pédagogiques sur l’environnement, et les trois premières campagnes ont été diffusées sur les réseaux sociaux du Groupe et de l’UNESCO.
Aujourd’hui, pourtant, l’avenir des océans est menacé. Le changement climatique fait sentir ses effets : les eaux se réchauffent et s’acidifient, les écosystèmes souffrent. Au cours des 200 dernières années, la planète a perdu la moitié de sa couverture corallienne et les trois quarts de ses forêts de mangroves. D’après un rapport de l’UNESCO, les océans pourraient bientôt cesser d’absorber du carbone et commencer à en émettre, ce qui serait pour le moins catastrophique. Nous ne pouvons pas relever ces défis si nous continuons de méconnaître les océans. À ce jour, seulement 20% de leurs fonds ont été explorés, alors qu’ils couvrent 71% de la surface de la planète. La recherche océanographique reste mal financée, ne recevant qu’une part infime des budgets nationaux de la recherche (moins de 2% en moyenne). Parce que le monde a les océans en partage, ce n’est qu’au moyen du multilatéralisme que nous y parviendrons. À l’heure où les humains ont les yeux rivés sur Mars, nous devons explorer les océans, continent le moins connu du globe. Nous devons redoubler d’efforts pour comprendre ces profondeurs, afin de pouvoir apporter des solutions durables aux menaces qui pèsent sur elles. Ce n’est qu’au moyen du multilatéralisme que nous y parviendrons. L’UNESCO œuvre à l’accomplissement de cet objectif. Grâce à sa Commission océanographique intergouvernementale, qui compte 150 États membres, et à ses compétences dans les domaines de la culture et de l’éducation, l’Organisation coordonne les actions des gouvernements, des scientifiques, du secteur privé, de la société civile et d’autres institutions du système des Nations Unies. Ensemble, nous avons créé le système d’alerte aux tsunamis, nous cartographions les eaux abyssales, identifions des espèces, faisons en sorte que l’éducation à l’environnement et l’initiation à l’océan soient intégrées dans les programmes scolaires, et protégeons le patrimoine subaquatique. L’UNESCO est également le gardien de sites océaniques exceptionnels par la biodiversité formidable qu’ils abritent, par leurs particularités géologiques ou par leur beauté incomparable. Nous comptons actuellement 232 réserves de biosphère marine et 50 sites marins du patrimoine mondial de valeur universelle exceptionnelle dans le monde. Il reste cependant beaucoup à faire. Aujourd’hui, l’UNESCO cherche à amplifier cette mobilisation collective en faveur des océans dans le cadre de la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable, qui a débuté en 2021 et s’achèvera en 2030. Dans ce contexte, plusieurs grands sommets internationaux auront lieu cette année, ce qui démultipliera les efforts que nous déployons pour mieux comprendre – et donc mieux protéger – l’océan. Audrey Azoulay
Il est essentiel de connaître la profondeur et le relief des fonds marins pour comprendre l’emplacement des failles océaniques, le fonctionnement des courants marins et des marées, ainsi que le transport des sédiments.
Ces données contribuent en effet à la protection des populations car elles permettent d’anticiper les risques de séisme et de tsunami, d’identifier les sites naturels à sauvegarder et les ressources halieutiques à exploiter durablement. Elles sont nécessaires pour planifier la construction d’infrastructures en mer et pour réagir efficacement aux catastrophes telles que les marées noires, les accidents d’avion et les naufrages. Elles jouent également un rôle majeur dans l’évaluation des effets futurs du changement climatique, qu’il s’agisse de l’augmentation des températures ou de l’élévation du niveau de la mer.
Photo d’en-tête : Astronaute Jean-François Clervoy lors d’un entraînement en mer
« La mer, c’est grand comme ça ! L’eau fait du doux, les bébés sont endormis, ils font des rêves….» Paroles d’élèves de 3 ans qui ont appris à « travailler avec » la mer pour avoir des chances de s’y plonger et donc d’y habiter. Eco, maison
Et plus si, « les apprenti.e.s » école du cerisier, youtube et ecoleducerisier.wordpress.com