Il est le plus humble des hôtes de nos champs et de nos jardins, celui qu’on remarque à peine, loin de susciter intérêt ou fascination ! Et pourtant, si vous saviez… Ce modeste invertébré, ce lombric -redonnons-lui sa véritable identité-, mérite qu’on lui prête toute notre attention.
Il aère les sols, limite leur érosion et favorise leur fertilité, tout en contribuant à la biodiversité. Une aide précieuse pour les agriculteurs et les jardiniers, et une vraie contribution à la démarche « Produisons autrement ». Rendons justice à cet invisible !
Acharné, le lombric ! Infatigable ! Mais à quoi donc peut-il servir, cet étrange habitant des sous-sols de nos champs, massifs et potagers ? Réponse : tout au long de son existence, le lombric brasse, remue, retourne, fractionne, laboure, aère la terre. Nouvelle question : quel intérêt ? Nouvelle réponse : ainsi, cet animal qui n’a ni pattes, ni yeux, ni poumons, mais pas moins de cinq à sept paires de cœurs, apporte sans relâche et de toutes ses forces sa coopération à la qualité des sols où la nature l’a mis à l’œuvre.
De façon plus sérieuse et plus scientifique, disons qu’en en stimulant l’activité des micro organismes, bactéries et champignons invisibles, il participe au recyclage des éléments et à leur remise à disposition pour les végétaux.
Par ailleurs, il limite l’érosion du sol en freinant le ruissellement des eaux grâce à la rugosité de surface créée par ses déjections. Ses galeries verticales et ouvertes à la surface du sol constituent des voies d’écoulement privilégiées pour l’eau de pluie.
Poursuivons : Les agrégations biologiques liées à leurs déjections participent à une meilleure stabilité de la structure du sol. Et en favorisant sa porosité, ils facilitent une bonne circulation de l’eau, de l’air et d’autres organismes vivants.
Un précieux concours aux équilibres naturels
C’est donc le plus sérieusement du monde qu’un vivarium, qui reproduit en miniature la structure d’un sol, a été présenté sur le stand du ministère au Salon de l’Agriculture en février dernier, explications à l’appui. Démonstration in vivo pour les visiteurs…
Et du côté des chercheurs, qu’en est-il ? « La recherche poursuit deux objectifs principaux en s’intéressant à ces organismes, explique Guénola Peres, ingénieur de recherche à l’Unité Mixte de Recherche EcoBio de l’université de Rennes 1-CNRS. Nous cherchons d’abord à améliorer nos connaissances sur leur écologie et leur impact sur les propriétés et les fonctions du sol. Puis nous cherchons à voir comment les pratiques agricoles influent à leur tour sur cette biodiversité. Ce second objectif a pour but de proposer des outils de décision aux agriculteurs et de voir si l’on peut conduire des pratiques à la fois réalistes et durables sur le plan économique, environnemental et sociétal. Nous sommes là en pleine agroéologie, où comme vous voyez, le ver de terre y joue un double rôle, celui d’acteur et d’indicateur ! »
A l’heure où l’agroécologie se définit à la fois comme un mode de pensée et de production, le développement de la biodiversité et de ces minuscules animaux qu’on nomme aussi « sentinelles des champs », insectes, oiseaux, petits rongeurs, est particulièrement précieux, dans le concours qu’ils apportent par leur action aux équilibres naturels. Et comme tous les organismes vivants de notre planète, la diversité lombricienne contribue au patrimoine génétique commun !
Étrange et injuste destin, pourtant, que celui de cet être minuscule, regardé à tort avec un peu (si, si…) de répulsion, ou, au mieux, d’indifférence. Il finira peut-être dans l’estomac d’une poule, d’un pigeon ou d’une chouette, ou tranché en deux par la bêche d’un jardinier. Quel cruel manque de reconnaissance, tout de même…
Visiter le site de l’Observatoire participatif des vers de terre de l’université de Rennes-1
(Source : Magazine agriculture gouv.fr – 4 février 2015)