Alors que la 5G est toujours en cours de déploiement, des chercheurs bordelais en électronique anticipent déjà l’arrivée de la 6G. En combinant mathématiques et intelligence artificielle, ils conçoivent des puces électroniques capables d’ouvrir la voie aux communications ultra-rapides de demain. Ce défi est au cœur d’un projet européen appelé HERMES.
« Tout ce qu’on avait prévu fonctionne. Nos résultats vont même au-delà de nos espérances et on peut maintenant dire que le projet est un succès ! », se réjouit François Rivet, spécialiste en électronique au laboratoire de l’Intégration du matériau au système (IMS, unité Bordeaux INP, CNRS et université de Bordeaux). Cet enseignant-chercheur à Bordeaux INP coordonne des travaux sur la 6G depuis plusieurs années, dans le cadre du projet HERMES, porté par l’université de Bordeaux et financé par le Conseil européen de l’innovation.
Avec son équipe (1), il « contribue à proposer des solutions pour les puces électroniques des téléphones portables », et plus largement des systèmes communicants, en vue du développement de la 6G. L’objectif est de concevoir des puces plus performantes, utilisant plus de spectre à des fréquences plus élevées (100 gigahertz pour la 6G), plus fiables, toujours plus compactes, qui consomment moins d’énergie tout en étant moins chères.
Les usages numériques explosent
Mais pourquoi la 6G alors que la 5G est toujours en cours de déploiement ? Parce que les usages numériques explosent. « Le volume d’échanges des communications
augmente continuellement. Tout le monde souhaite partager toujours plus, des images, mais surtout de la vidéo. » Les capacités du réseau en 6G seront de 10 à 100 fois plus performantes, à la fois en termes de rapidité, de volume de données échangées que de temps de latence.
Au-delà de l’envoi des images et vidéos ou des interactions en ligne, c’est la coopération entre véhicules autonomes ou entre robots sans intervention humaine, voire l’apparition d’un hologramme depuis un smartphone, qui pourraient être rendues possibles. La science-fiction devenue réalité !
Avec la 6G, les ondes transporteront instantanément une grande quantité d’informations, mais seront encore plus sensibles aux obstacles, nécessitant une infrastructure dense de petites antennes. Ce « last mile », la communication des derniers mètres entre le téléphone et l’antenne, est précisément le point sur lequel travaillent les chercheurs IMS, qui, dès 2020, ont eu l’intuition que l’IA pourrait jouer un rôle déterminant pour faire avancer leurs travaux… Par exemple, si une antenne 6G détecte une zone urbaine saturée en communication vidéo, l’IA pourrait automatiquement adapter les fréquences et envoyer les flux sur des bandes moins encombrées. Mais pas que…
Les circuits ont été conçus par les chercheurs eux-mêmes, car l’IA n’arrive pas encore « à remplacer le concepteur pour faire seule de l’orfèvrerie », précise François Rivet. Les plans de ces circuits ont ensuite été envoyés à la société franco-italienne STMicroelectronics, seul fabricant européen de circuits électroniques. L’équipe bordelaise a mené avec succès les premiers tests sur ses puces, confirmant que leurs innovations permettent d’atteindre les performances attendues.
(1) L’équipe du projet HERMES est composée de François Rivet, de ses collègues enseignants- chercheurs de l’université, Hervé Lapuyade, ainsi que ceux de Bordeaux INP, Yann Deval, Nathalie Deltimple et Éric Kerhervé.
Sources : Université de Bordeaux – CNRS