Regardez le monde
avec les yeux ouverts

Inscrit ou abonné ?
CONNEXION

UP', média libre
grâce à ses lecteurs
Je rejoins

rejoignez gratuitement le cercle des lecteurs de UP’

OGM cachés
/

Ces OGM cachés que les industriels veulent nous faire passer en douce…

Commencez
Les campagnes des défenseurs de la nature, les coups d’éclats des José Bové et autres pourfendeurs d’OGM, ont, finalement, au fil du temps gagné la bataille des esprits, en Europe. Les consommateurs européens sont majoritairement opposés à la consommation d’OGM. Pourtant, les biotechnologies avancent à grand pas et ne sont pas avares d’innovations plus ou moins discutables. C’est le cas de nouveaux organismes qui arrivent en force chez les industriels et qui échappent à la règlementation des OGM. Des OGM cachés, bientôt dans nos champs et nos assiettes ?
 
Pour la première fois en vingt ans, la culture des plantes transgéniques diminue dans le monde. Cette nouvelle n’inquiète pourtant pas une seconde les grandes firmes agrochimiques mondiales, grands fournisseurs d’OGM sur la planète : les Monsanto, Syngenta, DuPont, Novartis et autres. Au contraire, ces sociétés se réjouissent de l’arrivée sur le marché de nouvelles biotechnologies végétales, des techniques permettant d’éditer le génome et de le modifier. Pour les industriels, ces produits ne sont pas des OGM au sens où l’entend la règlementation notamment européenne. Ils seraient d’une autre nature, échappant ainsi aux procédures d’évaluation des risques, d’autorisation, d’étiquetage ou de suivi. Leur argument est d’affirmer que les techniques utilisées jusqu’à présent pour fabriquer des OGM consistent à prendre le gène d’une plante ou d’un organisme pour le mettre dans une autre. C’est de la transgénèse. Or avec les nouvelles technologies du vivant, il est inutile de faire intervenir un gène extérieur. On peut modifier les gènes à l’intérieur des cellules des embryons de plantes. Avec ces nouveaux outils d’ingénierie génétique, les labos peuvent éteindre des gènes, les activer, les muter ou les répliquer. Pas d’apport extérieur. Ce n’est pas un OGM, c’est autre chose. Ni vu ni connu…
 

Génie génétique

 
Parmi les différentes techniques de modification du génome, la plus « prometteuse » pour les industriels de l’agrochimie, est la plus récente, le « CRISPR-Cas9 ».

LIRE AUSSI DANS UP : CRISPR : Révolution dans l’histoire humaine ou méga bombe à retardement ?

Ce mécanisme d’assemblage d’une séquence d’ADN – qui permet de faire des sortes de copier/coller génétiques – est de plus en plus utilisé. Cette technique serait même tellement simple à mettre en œuvre et peu coûteuse qu’elle rendrait la modification de l’ADN « à la portée de tous ». La manipulation du génome figure pourtant dans la liste des menaces jugées les plus importantes aux États-Unis, selon un rapport du renseignement américain. En cause, «le risque de création d’agents ou de produits biologiques dangereux » qui découle de l’utilisation inconsidérée de ces techniques.
Le risque que cette technique soit utilisée sur des cellules reproductrices, et donc que ces modifications soient transmissibles et puissent orienter l’évolution d’une espèce, a conduit le Comité international de bioéthique de l’Unesco à appeler en octobre 2015 à un moratoire sur les modifications touchant à la part héréditaire du génome humain. Pour les organisations paysannes, ce moratoire devrait aussi s’étendre aux plantes et semences. « Les techniques proposées agissent directement sur les cellules reproductrices des semences », insiste Daniel Evain de la Fédération nationale de l’agriculture biologique, interrogé par Bastamag.
 
En effet, alors que la FNSEA, met l’accent sur la précision et la rapidité de ces techniques, permettant aux agriculteurs de sélectionner de nouvelles variétés de plantes plus résistantes et efficaces, des biologistes pointent au contraire les risques de dissémination. C’est le cas de Christian Voigt, membre du CRIGEN (Comité de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique) qui déclare : « Quelle que soit la nature de la modification et sa précision, on est incapable de prévoir les effets à court, moyen et long terme. Se restreindre à l’échelle de la manipulation elle-même, c’est un déni de connaissance et une vision simpliste du vivant. Il faut prendre en considération l’organisme dans sa complexité, dans ses interactions et dans son environnement. »
 

Lobbying intense

 
Face à ces interrogations, la Commission européenne avait annoncé l’an dernier qu’elle publierait, avant fin 2015, une analyse juridique précisant si ces nouvelles techniques doivent ou non être incluses dans la réglementation OGM. D’après des documents émis par la mission américaine auprès de l’Union européenne et l’European Seed Association (ESA), la Commission était alors d’avis de classer ces nouvelles techniques dans la réglementation OGM. Or, à ce jour, la Commission n’a toujours rien publié.
 
L’ONG Greenpeace s’est procuré des documents montrant un intense lobbying américain autour de cette question. Le gouvernement américain s’est alors fait, dit-elle dans un communiqué, le relais de l’industrie auprès de la Commission européenne, dans un contexte de négociations pour le traité transatlantique de libre-échange (TAFTA) : suite aux bruits de couloirs concernant la position défavorable à l’industrie de la Commission, au moins six rencontres ont eu lieu en moins de deux mois (du 2 octobre au 4 décembre 2015) entre cette dernière et des représentants du gouvernement américain. Les nouveaux OGM étaient à l’ordre du jour d’au moins 2/3 de ces rencontres.
« Ce que révèle la note publiée par Greenpeace aujourd’hui, c’est tout un faisceau de preuves, réunions, déclarations, qui mises bout à bout, ne laissent aucun doute : les États-Unis font pression sur la Commission européenne pour que les nouveaux OGM échappent à la réglementation OGM », explique Suzanne Dalle, chargée de campagne Agriculture pour Greenpeace France. Résultat : alors que sa position semblait tranchée, la Commission n’a toujours pas publié son analyse juridique, cédant au lobby américain. »
Si les acteurs de l’agrochimie et les États-Unis arrivaient à leurs fins, ces nouvelles techniques seraient exclues du cadre juridique européen et ne seraient soumises à aucune obligation d’étiquetage et d’évaluation des risques. De son côté, le gouvernement français, qui a pourtant exclu la culture des OGM « classiques » de son territoire, recule également face au lobby des pro-OGM, dans un contexte de crise au sein du Haut Conseil des Biotechnologies.

LIRE AUSSI DANS UP : Ingénierie génétique: fortes crispations sur CRISPR

L’enjeu est de taille car l’Europe semble se diriger, lentement mais sûrement, vers une déréglementation de ces OGM. Des plantes modifiées et brevetées pourraient ainsi bientôt envahir incognito nos champs, échappant à tout étiquetage. Principalement des végétaux rendus tolérants aux herbicides, avec des conséquences encore méconnues mais sans doute irréversibles sur l’environnement, la santé, ou l’autonomie des paysans. « Cette quantité énorme d’êtres artificiels qui pourraient ainsi être introduits dans un temps très court dans la société et la nature pose problème, explique Frédéric Jaquemart, président du Groupe international d’études transdisciplinaires (Giet). Ce rythme effréné de changements, sans commune mesure avec ceux en cours dans le processus d’évolution, a des effets sur l’organisation même de la société, avec des effets délétères sur la nature, même si les causalités ne sont pas évidentes à établir. »
 
Pierre-Henri  Gouyon, professeur au Museum d’Histoire naturelle n’hésite pas à s’insurger : « On est en train de faire des conneries avec les OGM ! ». Il ajoute dans une conférence donnée à l’APHP : « La concentration de la propriété des ressources génétiques dans quelques mains met en danger toute la nourriture de la planète ».  Pour lui, il n’y aurait qu’une seule façon de savoir si un organisme a été modifié ou pas avec ces nouvelles technologies : « si une plante ou une semence est brevetée, c’est qu’elle a été manipulée» déclare-t-il à UP’ Magazine. CQFD. 
 
 

Nous avons un message pour vous…

Dès sa création, il y a plus de dix ans,  nous avons pris l’engagement que UP’ Magazine accordera au dérèglement climatique, à l’extinction des espèces sauvages, à la pollution, à la qualité de notre alimentation et à la transition écologique l’attention et l’importance urgentes que ces défis exigent. Cet engagement s’est traduit, en 2020, par le partenariat de UP’ Magazine avec Covering Climate Now, une collaboration mondiale de 300 médias sélectionnés pour renforcer la couverture journalistique des enjeux climatiques. En septembre 2022, UP’ Magazine a adhéré à la Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique.

Nous promettons de vous tenir informés des mesures que nous prenons pour nous responsabiliser à ce moment décisif de notre vie. La désinformation sur le climat étant monnaie courante, et jamais plus dangereuse qu’aujourd’hui, il est essentiel que UP’ Magazine publie des rapports précis et relaye des informations faisant autorité – et nous ne resterons pas silencieux.

Notre indépendance éditoriale signifie que nous sommes libres d’enquêter et de contester l’inaction de ceux qui sont au pouvoir. Nous informerons nos lecteurs des menaces qui pèsent sur l’environnement en nous fondant sur des faits scientifiques et non sur des intérêts commerciaux ou politiques. Et nous avons apporté plusieurs modifications importantes à notre expression éditoriale pour que le langage que nous utilisons reflète fidèlement, mais sans catastrophisme, l’urgence écologique.

UP’ Magazine estime que les problèmes auxquels nous sommes confrontés dans le cadre de la crise climatique sont systémiques et qu’un changement sociétal fondamental est nécessaire. Nous continuerons à rendre compte des efforts des individus et des communautés du monde entier qui prennent courageusement position pour les générations futures et la préservation de la vie humaine sur terre. Nous voulons que leurs histoires inspirent l’espoir.

Nous espérons que vous envisagerez de nous soutenir aujourd’hui. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à offrir un journalisme de qualité, ouvert et indépendant. Chaque abonnement des lecteurs, quelle que soit sa taille, est précieux. Soutenez UP’ Magazine à partir d’1.90 € par semaine seulement – et cela ne prend qu’une minute. Merci de votre soutien.

Je m’abonne →

S’abonner
Notifier de

0 Commentaires
Les plus anciens
Les plus récents Le plus de votes
Inline Feedbacks
View all comments
Appellation origine contrôlée
Article précédent

TAFTA : Brie, Feta, Chablis... La bataille des appellations

Terres agricoles
Prochain article

À la conquête des terres agricoles, devenues valeurs hautement spéculatives

Derniers articles de ECONOMIE

REJOIGNEZ

LE CERCLE DE CEUX QUI VEULENT COMPRENDRE NOTRE EPOQUE DE TRANSITION, REGARDER LE MONDE AVEC LES YEUX OUVERTS. ET AGIR.
logo-UP-menu150

Déjà inscrit ? Je me connecte

Inscrivez-vous et lisez trois articles gratuitement. Recevez aussi notre newsletter pour être informé des dernières infos publiées.

→ Inscrivez-vous gratuitement pour poursuivre votre lecture.

REJOIGNEZ

LE CERCLE DE CEUX QUI VEULENT COMPRENDRE NOTRE EPOQUE DE TRANSITION, REGARDER LE MONDE AVEC LES YEUX OUVERTS ET AGIR

Vous avez bénéficié de 3 articles gratuits pour découvrir UP’.

Profitez d'un accès illimité à nos contenus !

A partir de 1.70 € par semaine seulement.

Profitez d'un accès illimité à nos contenus !

A partir de $1.99 par semaine seulement.
Partagez
Tweetez
Partagez
WhatsApp
Email
Print