Artiste peintre parmi les plus influents de sa génération, Sara-Vide Ericson expose pour la première fois en France à l’automne 2023. Ses grandes toiles figuratives, inspirées de la nature qui l’entoure et de son propre vécu, subliment l’histoire personnelle en mythe universel. L’exposition Desire of the Tail présente une vingtaine d’œuvres produites spécialement pour l’Institut suédois de Paris. Elles constituent ainsi autant de toiles de projection dans lesquelles chacun est invité à se plonger afin d’y explorer sa propre connexion au monde, à la nature, à l’animal, à soi-même, au vivant.
Une femme drapée d’une longue jupe et d’un ample châle est assise sur une marée de bernacles contre ce qui ressemble à une falaise, vaste paroi aux tons bruns et crayeux peinte en larges touches expressives, quasiment abstraite. Elle nous confronte du regard, motif assez rare dans l’œuvre de Sara-Vide Ericson. La nature du paysage comme sa localisation sont difficiles à identifier. Sommes-nous sur une plage, près d’une mer, sur la berge d’une rivière à la lisière d’une forêt ? Qui est cette pythie contemporaine et quel message souhaite-t-elle nous délivrer ?
L’œuvre de Sara-Vide Ericson se caractérise par de grandes peintures à l’huile figuratives inspirées de son environnement proche. Parmi les motifs récurrents de son travail, des objets souvenirs liés à diverses histoires et expériences, ses propres chevaux ou encore la nature qui l’entoure, soit les forêts, les rivières et les marécages du Hälsingland, région sauvage du Nord de la Suède dans laquelle elle a grandi et où elle s’est réinstallée avec sa famille il y a près de dix ans.
Ses toiles ne sont ni des autoportraits nombrilistes ni des paysages naturalistes pour autant. Boycottant le vert tendre qui signe chaque année l’arrivée du printemps, se pressant même de collecter du matériel avant que la saison fatidique ne démarre, Sara-Vide Ericson ne peint pas la « belle nature », cette nature carte postale dont les artistes, suédois entre autres, ont souvent fait cliché. Caverneuse, boueuse, dangereuse voire dévorante, la nature est une force indomptable avec laquelle l’artiste compose plus qu’elle ne cherche à la représenter.
Se fondant sur son propre vécu et bien qu’elle s’y mette en scène, les tableaux de Sara-Vide Ericson ne dévoilent que peu de choses sur elle. Ouverts à de multiples interprétations, ses paysages intérieurs demeurent d’intrigants mystères. En quête d’une forme d’archétype, ils entrent en résonance avec les mythes archaïques, renvoient à un hors-temps primitif et originel. Ils constituent ainsi autant de toiles de projection dans lesquelles chacun est invité à se plonger afin d’y explorer sa propre connexion au monde, à la nature, à l’animal, à soi-même, au vivant.
Sara-Vide Ericson est peintre, ce dont témoigne un travail de la matière particulièrement maîtrisé, soigné et innovant. Jouant des effets de relief par la texture, elle a pour la présente exposition mis au point la méthode de la poche à douille, lui permettant de projeter la peinture sur la toile suivant des lignes précises plus ou moins épaisses et d’élaborer, comme on le ferait en pâtisserie, des ornements en trois dimensions.
Ces zones très texturées, qui lui servent à rendre avec plus d’authenticité broderies comme bernacles, contrastent avec d’autres zones où la toile est presque laissée à nu. Son processus créatif repose aussi sur une forme de performativité. Tout commence par une chasse au motif, en dehors de l’atelier. Se considérant elle-même comme une chasseuse-cueilleuse, Sara-Vide Ericson chasse, collecte, rapporte chez elle puis, le temps venu, sélectionne objets-souvenirs, expériences ou morceaux de paysage et les assemble en peinture dans l’atelier.
Mais quand l’artiste a une image en tête, il faut d’abord qu’elle la réalise « en vrai ». Elle s’attèle alors à des mises en scène au sein desquelles elle interprète le personnage, genre de performances dont elle conserve une trace photographique et surtout une mémoire corporelle. Il faut pouvoir ressentir dans son corps, incarner l’image pour parvenir à la peindre. Est-ce la raison pour laquelle les œuvres de Sara-Vide Ericson ont une si forte présence, un si fort pouvoir d’envoûtement ?
À propos de Sara-Vide Ericson
Née en 1983 en Suède, Sara-Vide Ericson figure parmi les artistes les plus influents de sa génération. Depuis sa sortie de l’École Royale des Beaux-Arts de Stockholm en 2009, elle a été invitée à présenter son travail au sein d’expositions collectives en Scandinavie, aux États-Unis, en Allemagne ou encore en Corée du Sud et plus récemment, elle multiplie les expositions personnelles en Suède comme au Danemark.
Tandis que ses toiles ont déjà intégré plusieurs collections publiques suédoises dont la prestigieuse collection du Moderna Museet, elle a notamment exposé à Sara Kulturhus à Skellefteå et à Kulturhuset à Stockholm.
En ce moment et jusqu’au 29 octobre, c’est la réputée Bonniers Konsthall à Stockholm qui accueille ses tableaux, en relation avec les sculptures de Tilda Lovell. L’artiste est représentée par la Galleri Magnus Karlsson à Stockholm, ainsi que la V1 Gallery à Copenhague.
Desire of the Tail est une exposition co-curatée par Sara Arrhenius et Marion Alluchon.
Exposition « Desire of the Tail », du 17 octobre 2023 au 18 février 2024 – Institut suédois, 11 rue Payenne – 75003 Paris (Entrée libre, sans réservation, du mercredi au dimanche, de 12h à 18h).
Activités parallèles à l’exposition :
L’exposition donnera également lieu à une programmation parallèle au sujet et en résonance avec l’univers artistique de Sara-Vide Ericson :
- 16.10.2023 / 18h-20h : Vernissage de l’exposition Desire of the Tail
- 16.11.2023 / 19h : Rencontre avec Sara-Vide Ericson
- 28.11.2023 / 19h : Rencontre littéraire : Le rapport sacré au monde sauvage
- 11.01.2024 / 19h : Rencontre autour de l’artiste surréaliste Leonor Fini
- 25.01.2024 / 19h30 Cinéma : Border d’Ali Abbasi
- 15.02.2024 / 19:30 : Concert : Frida Hyvönen
Photo d’en-tête : Sara-Vide Ericson, The Living Rock (That Ends Time), 2023, Huile et pastel sur toile, 160 x 220 cm – © Nora Bencivenni / Galleri Magnus Karlsson