« Nous ne voulons plus être gouvernés par la peur » appellent 35 chercheurs, universitaires et sommités médicales dans une tribune publiée par le Parisien aujourd’hui 10 septembre. Les signataires critiquent la communication du gouvernement sur la crise du Covid, qu’ils jugent trop anxiogène, relevant davantage de l’affichage d’une « posture protectrice » que d’une stratégie sanitaire précise.
« La société française est en tension, beaucoup de citoyens s’affolent ou au contraire se moquent des consignes, et nombre de décideurs paniquent. Il est urgent de changer de cap », insistent ces 35 personnalités parmi lesquelles on compte le professeur Jean-François Toussaint, le sociologue Laurent Mucchielli, les biologistes Jean-François Gouyon et Gilles Boeuf du Museum national d’Histoire naturelle, quantité de médecins et universitaires issus de plusieurs disciplines différentes.
Les signataires reviennent sur la formule choisie par le président de la République pour justifier le confinement. « Nous ne sommes pas en guerre mais confrontés à une épidémie qui a causé 30 décès le 9 septembre, contre 1438 le 14 avril. La situation n’est donc plus du tout la même qu’il y a 5 mois. Par ailleurs, si la guerre peut parfois justifier un état d’urgence et des restrictions exceptionnelles de l’Etat de droit et des libertés publiques qui fondent la démocratie et la République, ce n’est pas le cas d’une épidémie. Aujourd’hui comme hier, cette crise doit nous unir et nous responsabiliser, pas nous diviser ni nous soumettre. » écrivent-ils.
Ils appellent solennellement le gouvernement, les autorités politiques et sanitaires, mais aussi les médias, à « cesser d’insuffler la peur à travers une communication anxiogène qui exagère systématiquement les dangers sans en expliquer les causes et les mécanismes. » Les auteurs de cette tribune tranchent par une formule frappante : « Il ne faut pas confondre la responsabilisation éclairée avec la culpabilisation moralisatrice, ni l’éducation citoyenne avec l’infantilisation. »
Pour la plupart des signataires, le confinement généralisé tel qu’il a été pratiqué en France a été une erreur. Certains s’en sont déjà expliqué notamment dans UP’ Magazine. Ils ne reviennent pas sur le passé mais alertent sur l’avenir que l’on nous fait entrevoir : « Le confinement général, mesure inédite dans notre histoire, a eu des conséquences individuelles, économiques et sociales parfois terribles qui sont loin de s’être encore toutes manifestées et d’avoir été toutes évaluées. Laisser planer la menace de son renouvellement n’est pas responsable. »
Les auteurs de la tribune sont pour beaucoup d’entre eux des professionnels réputés de la santé. Ils connaissent les risques du Covid-19. « Il faut évidemment protéger les plus faibles » rappellent-ils, mais ils s’empressent d’ajouter : « De même que l’imposition du port du masque dans la rue, y compris dans les régions où le virus ne circule pas, l’efficacité du confinement n’est pas démontrée scientifiquement. Ces mesures générales et uniformes, imposées sous surveillance policière, relèvent davantage d’une volonté d’afficher une posture protectrice que d’une stratégie sanitaire précise. »
Ils rappellent que le gouvernement doit se garder d’instrumentaliser la science et que « les impératifs de protection contre la contagion ne doivent pas conduire à trahir l’éthique médicale et les principes humanistes fondamentaux ». Ils estiment nécessaire de rappeler des mesures de bon sens : « Isoler les malades et protéger les personnes à risque ne veut pas dire les priver de tous droits et de toute vie sociale. Trop de personnes âgées sont décédées et se dégradent encore actuellement dans un abandon motivé par des motifs sanitaires non justifiés. Trop de familles souffrent de ne pouvoir leur apporter l’affection indispensable à leur bonheur et à leur santé. » Un rappel qui semble plus que jamais nécessaire face à l’application exagérée du principe de précaution comme à Nice où le maire vient d’interdire toutes les visites dans les Ephad de sa ville.
La tribune est publiée par Le Parisien.
Les premiers signataires : Jean-François Toussaint, professeur de physiologie à l’Université de Paris ; Laurent Mucchielli, sociologue, directeur de recherche au CNRS ; Bernard Bégaud, professeur de pharmacologie à l’Université de Bordeaux ; Gilles Bœuf, professeur de biologie à Paris-Sorbonne Université ; Pierre-Henri Gouyon, professeur de biologie au Muséum national d’histoire naturelle ; Jean Roudier, professeur de rhumatologie à l’Université d’Aix-Marseille ; Louis Fouché, médecin, anesthésiste-réanimateur à l’Hôpital de la Conception ; Olivier de Soyres, médecin, réanimateur à la clinique des Cèdres ; Christophe Lançon, professeur de psychiatrie à l’Université d’Aix-Marseille ; Laurent Toubiana, épidémiologiste à l’Inserm ; Mylène Weill, biologiste, directrice de recherche au CNRS ; Anne Atlan, généticienne des populations et sociologue, directrice de recherche au CNRS ; Bernard Swynghedauw, biologiste, directeur de recherche émérite à l’Inserm ; Marc-André Selosse, professeur de microbiologie au Muséum national d’histoire naturelle ; Jean-Louis Thillier, médecin, immunopathologiste ; Jean-François Lesgards, biochimiste, chercheur au CNRS ; Alexandra Menant, biologiste, chercheuse au CNRS ; André Comte-Sponville, philosophe ; François Gastaud, chirurgien orthopédiste à Strasbourg ; Éric Desmons, professeur de droit public à l’Université Sorbonne Paris Nord ; Dominique Andolfatto, professeur de science politique à l’Université de Bourgogne Franche-Comté ; Charalambos Apostolidis, professeur de droit public à l’Université de Bourgogne-Franche-Comté ; Nicolas Sembel, professeur de sociologie à l’Université d’Aix-Marseille ; Dominique Crozat, professeur de géographie à l’Université de Montpellier ; Marnix Dressen-Vagne, professeur de sociologie à l’Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines ; Thomas Hippler, professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Caen-Normandie ; Nicolas Leblond, maître de conférences en droit à l’Université Polytechnique Hauts-de-France ; Dominique Labbé, politiste, enseignant émérite à l’Université de Grenoble-Alpes ; Arnaud Rey, chercheur en psychologie au CNRS ; Mathias Delori, politiste, chercheur au CNRS ; Jacques Tassin, écologue, chercheur au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) ; Sylvie Gourlet-Fleury, écologue, chercheuse au Cirad ; Emmanuelle Sultan, docteur en océanographie physique, ingénieure de recherche au Muséum national d’histoire naturelle ; Christophe Leroy, biologiste, docteur en biologie moléculaire et cellulaire ; Bernard Dugué, docteur en pharmacologie, docteur en philosophie
Question : peut-on encore, aujourd’hui, interpeller au nom de critères en vigueur durant la période de l’histoire humaine où la Raison a constitué un étalon – du moins nominal – pour la majorité des Gestionnaires Attitrés ? Nous assistons en direct au surgissement d’un Nouveau Monde Imprévisible Par Quiconque, tout à fait global, dont les formes locales sont diverses, et qui nous forcent à changer de regard, donc peut-être de critères. De même, dans ce nouveau contexte, à quelles conditions, et comment, des Réfractaires Éclairés peuvent-ils livrer leurs commentaires à un Public Disséminé Inconnu, sans que le résultat de leurs prises de… Lire la suite »
Enfin une approche sensée!
A l’évidence, les gouvernements ont adopté le principe selon lequel la fin justifie les moyens… Arendt, Foucault, Levinas… revenez, ils sont devenus fous! Merci aussi à Milgram de nous rappeler que les pires crimes ont été fait par obéissance. Merci à Esposito de nous expliquer que l’immunité est l’inverse de la communauté. Merci enfin à Zylberman d’avoir annoncé, il y a environ 10 ans, que nous sortions de la science pour entrer dans la science fiction, où le scénario le pire est toujours celui retenu.
La peur ? Certes … alors cessez de diffuser des articles comme « le pire peut arriver » !