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Transition écologique à la Macron : insuffisante et poussive ?

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En plein conflit social avec les « gilets jaunes » contre la hausse des taxes sur le carburant et le manque de pouvoir d’achat, Emmanuel Macron a présenté ce mardi matin 27 novembre devant les membres du Conseil national de la transition écologique (CNTE) un projet de mesures, sans changement de cap. « Son » plan annonce un certain nombre de mesures, mêlant ainsi urgence et long terme pour parvenir à une transition écologique « acceptable ». En dehors des politiques, des réactions sont déjà intervenues, dont celles d’ONG et de réseaux directement liés à la transition énergétique. Tour d’horizon.
 
Choisir entre « fin de mois » et « fin du monde » ? Non ! a bien répondu Emmanuel Macron à la fronde sociale des « Gilets jaunes » lors de son intervention ce mardi 27 novembre à l’Elysée en présentant les grandes lignes de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), document qui fixe la politique énergétique de la France dans les dix années à venir. Quel plan donc pour pallier à la fois au désastre écologique de notre planète et aux justes inquiétudes sociales ?
C’est un plan de transition écologique mêlant temps long et main tendue qui a été présenté ce matin à l’Elysée. Sachant que l’un des objectifs principaux du plan de transition énergétique est de « Passer d’une France où 75% de l’énergie consommée est d’origine fossile à une France où, en 2050, la production et la consommation seront totalement décarbonées. »
 
Pour parvenir à une « désintoxication » à la fois écologique et sociale, plusieurs annonces ont été faites par Emmanuel Macron : une « grande concertation de terrain » sur la transition écologique qui démarre dès cette semaine pour trois mois sous la tutelle du Premier ministre Edouard Philippe ; une adaptation de la fiscalité sur les carburants aux fluctuations des prix (modulation de la taxe sur les carburants (TICPE) en fonction de leur cours mondial) ; la création d’un Haut Conseil pour l’action climatique qui « doit permettre de rétablir des faits, des vérités scientifiques » ; la fermeture de 4 à 6 réacteurs nucléaires d’ici à 2030, plus six autres d’ici 2035, en ramenant la part du nucléaire dans la production d’énergie à 50 % d’ici 2035, avec la promesse d’un plan ambitieux de développement des énergies renouvelables ; la prime à la conversion pour les véhicules portées à 6000€ ; la rénovation des logements avec 9 milliards d’euros d’investissement pour assurer une meilleure isolation des bâtiments. Il n’y aura pas de retour en arrière concernant la taxe carbone et donc sur la hausse de la fiscalité sur les carburants au 1er janvier 2019, à l’origine de la gronde des « Gilets jaunes ».
 
 

Le compte n’y est pas pour bon nombre d’acteurs

Ramener la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % d’ici à 2035 représente un recul par rapport à l’objectif initial d’Emmanuel Macron qui était de le réduire à 50 % d’ici à 2025. Nicolas Hulot avait abandonné cet objectif, jugé irréaliste.
 
 
Pour Morgane Créach, Directrice du Réseau Action Climat, « Le Président de la République a acté le retard pris par la France dans la transition écologique et beaucoup parlé de méthode, sans faire d’annonces concrètes. Pire, le report à 2035 des objectifs de réduction de la part du nucléaire va freiner la transition écologique. Plutôt que d’entériner de fausses solutions, le Gouvernement devrait mettre en œuvre des mesures supplémentaires pour réduire les émissions des principaux secteurs émetteurs de gaz à effet de serre. Sans ces mesures, ce quinquennat se soldera par un nouvel échec. Qu’il s’agisse de la rénovation performante des logements, de la demande alimentaire ou du projet de loi mobilités, on ne perçoit que des ajustements à la marge, alors que des mesures profondes sont indispensables. »
 
Pour Audrey Pulvar, Présidente de la Fondation pour la Nature et l’Homme, « Ce discours c’est le statu quo sur l’ère du nucléaire et l’art du vide en matière de transition écologique et solidaire. Nous ressortons avec plus d’interrogations que de réponses. Sur les fermetures de réacteurs nucléaires, par rapport à ce que Nicolas Hulot avait négocié, le Président acte un recul et ouvre la porte à de nouveaux EPR. Sur l’accompagnement, il reste flou concernant l’utilisation des recettes de la taxe carbone. Aucune annonce concrète sur la rénovation énergétique des logements, à part le changement de chaudière. Et ses propos sur l’industrie automobile, partout pour tous, laisse entendre un soutien au tout-routier. « 
 
Pour Jean-Baptiste Lebrun, directeur du CLER – Réseau pour la transition énergétique, en refusant d’actionner suffisamment les leviers que sont les économies d’énergie, la production d’énergie renouvelable et la décentralisation énergétique pour donner les moyens aux territoires d’agir, Emmanuel Macron compromet la capacité de la France à tenir ses objectifs sur le climat, mais surtout à répondre structurellement et durablement à l’attente des citoyens pour une transition énergétique réussie, ambitieuse et solidaire : « Comme ses prédécesseurs, Emmanuel Macron recule devant la nécessité d’engager les mesures structurantes de transition énergétique pour lesquelles les solutions existent déjà et de nombreux acteurs de terrain sont mobilisés. En exprimant seulement de grandes intentions, il espère sans doute calmer les symptômes des difficultés sociales liées aux prix de l’énergie mais ne s’attaque pas aux causes réelles du problème et des factures des Français, comme les consommations trop élevées des 27 millions de logements en France dont 7,5 millions de passoires énergétiques. Une transition énergétique et solidaire est pourtant possible, en accompagnant les citoyens vers les solutions pertinentes pour eux et pour la planète ! »
 
Pour Jean-David Abel, Vice-président de France Nature Environnement, « La PPE annoncée aujourd’hui est inquiétante au regard de l’urgence des enjeux. Elle ne permet pas d’engager la France dans une transition énergétique et écologique digne de ce nom. La fermeture de quelques centrales nucléaires en plus de Fessenheim est insuffisante pour tenir le cap et les engagements de la Loi de Transition Énergétique : la France doit s’engager sur un rythme de fermeture de 2 réacteurs par an minimum pour respecter l’objectif de réduction de la part de nucléaire à 50 %. C’est extrêmement décevant car ce faisant, le Président nie la volonté des Français de réduire la part du nucléaire, les difficultés économiques d’EDF et le risque croissant lié à la prolongation des centrales au-delà des 40 ans. Il est pourtant possible de fermer plus de réacteurs sans mettre le réseau électrique en difficulté, comme démontré par RTE. Avec cette PPE, le gouvernement se montre incapable de se débarrasser du boulet que le nucléaire représente pour la transition énergétique de la France. Enfin, nous appelons le Gouvernement à mettre ses actes en cohérence avec ses mots. Cela veut dire notamment mettre fin aux projets climaticides dans les territoires, comme le Grand Contournement Ouest de Strasbourg ou le forage offshore de Total en Guyane. Et cela veut dire également rendre la fiscalité plus juste, en taxant les plus gros pollueurs que sont les camions, les avions et les navires. »
 
Pour Jean-François Julliard, Directeur de Greenpeace France, « Emmanuel Macron est en train de réussir un tour de force : alors que l’urgence climatique s’aggrave, il s’apprête à faire moins pour la transition énergétique et le climat que son prédécesseur, François Hollande. Les effets d’annonces ne doivent pas masquer la réalité : les mesures annoncées par le président de la République ne permettent pas de réduire rapidement les émissions de gaz à effet dans les secteurs fortement émetteurs, la consommation d’énergie et d’électricité. Au contraire, le gouvernement continue d’accorder un soutien aveugle au nucléaire, au mépris des objectifs fixés en matière d’énergies renouvelables. Le gouvernement semble privilégier les lois dictées par les industriels et les lobbys à celles votées à l’Assemblée Nationale. À quelques jours seulement de l’ouverture de la COP, les beaux discours d’Emmanuel Macron n’y changeront rien, la France se décrédibilise sur la scène internationale. »
 
Pour pallier la baisse de la part des énergies fossiles et du nucléaire dans la production d’énergie, Emmanuel Macron souhaite développer les énergies renouvelables, avec, « à l’horizon 2030 », un triplement de l’éolien terrestre et une multiplication par cinq du photovoltaïque. Concernant l’éolien en mer, le premier parc sera mis en service au large de Saint-Nazaire durant le quinquennat et quatre nouveaux appels d’offres seront lancés. Le soutien à l’essor de ces énergies devrait passer de 5 milliards d’euros actuellement à 7 milliards par an et atteindre jusqu’à 8 milliards d’ici la fin de la PPE en 2028, selon l’Élysée. Cela représente un total de 71 milliards d’euros de soutien aux énergies renouvelables sur 2019-2028.
 
 
Pour Florent Compain, Président des Amis de la Terre France, « Ce qui est prévu par le gouvernement dans la PPE ne va pas assez vite ni assez loin, et inclut même le risque de fausses solutions comme le recours massif à la biomasse. L’Histoire a montré que les États étaient capables de transformer en profondeur leur économie en temps de guerre. Ce sont ce même type d’efforts qui sont attendus pour construire une société plus juste socialement et plus soutenable écologiquement. Les citoyens sont saturés des effets d’annonces, des fausses solutions, des incohérences et des mesurettes : c’est cela qui nourrit aujourd’hui la colère qui monte. »
 
Emmanuel Macron veut donner plus d’ambition à l’isolation des bâtiments existants. Mais pour le groupement Attac France, la loi de finance 2019 va priver l’Agence nationale de l’habitat de 130 millions d’euros de budget. Là où l’Anah devait recevoir 550 millions d’euros issus de la mise aux enchères des quotas de carbone, le gouvernement propose de réduire ce montant à 420 millions d’euros et de récupérer le restant pour financer le budget général.
 
Le Président était aussi attendu sur le dossier de la fiscalité carbone et de l’injustice sociale qui découle de l’application de la taxe carbone sur les carburants. Pour Attac France, plutôt qu’apporter des réponses structurelles et des alternatives au tout-voiture et à l’étalement urbain, comme le rapprochement des services publics, la relocalisation des activités et le développement massif des transports en commun et mobilités douces, Emmanuel Macron s’est contenté de proposer, sans la détailler, une mesure, une « taxe flottante » qui a fait la preuve de son inefficacité dans un passé récent (lancée en 2000 par Lionel Jospin).
(Attac France propose dans une note publiée ce jour un basculement de la fiscalité carbone sur les entreprises les plus polluantes, jusqu’ici largement exonérées de toute fiscalité carbone efficace et contraignante, et, a minima un moratoire sur toute nouvelle augmentation de la fiscalité carbone en direction des ménages, artisans et petites entreprises.)

 
Sur cette éventuelle modulation de la taxe sur les carburants (TICPE) en fonction de leur cours mondial ou la révision de la prime à la conversion pour les véhicules, …, le député européen EELV Yannick Jadot déclare « être stupéfait par le manque de mesures d’accompagnement, aucune annonce de justice sociale. » (Source : BFM TV)
 
Des réactions unanimes sur les perspectives de politique énergétique française.
Reste que, même si les pistes proposées vont dans le sens d’une transition écologique, elles ne prennent pas la mesure des attentes sociales. Le président de la République, en renvoyant à trois mois des réponses plus concrètes aux revendications de pouvoir d’achat et de justice fiscale, via cette « grande consultation de terrain », a-t-il vraiment compris la « crainte exprimée par nombre de nos concitoyens ces derniers jours : être laissés pour compte, payer la transition énergétique sans en bénéficier » ? 
 
 
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