Les pays des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) se sont réunis cet été et ont évoqué la perspective de créer une monnaie commune pour contrebalancer l’hégémonie du dollar dans les échanges internationaux. Quelles sont les raisons de cette décision ? Est-ce réalisable ? A quoi s’attendre pour le cours du dollar dans ce cas ?
Une monnaie unique…
Les pays des BRICS ont annoncé lors de leur sommet annuel, qui a eu lieu en août à Johannesburg, leur volonté d’affirmer et renforcer l’influence du « bloc ». Cette volonté se traduit par deux annonces majeures.
La première est celle d’intégrer à partir du 1er janvier 2024, six nouveaux pays (Iran, Argentine, Égypte, Éthiopie, Arabie Saoudite et Émirats Arabes Unis) pour créer les BRICS+ afin d’avoir plus de poids dans les décisions politiques internationales.
La seconde est la création d’une monnaie unique et commune à tous ces pays pour contrer l’influence du dollar dans les échanges internationaux. Ainsi, ils ont évoqué la possibilité que cette nouvelle monnaie soit adossée sur l’or.
Pour ces pays cela ne représente pas seulement un projet économique mais incarne aussi une symbolique politique forte, traduisant la décision de renforcer leur autonomie et de s’affirmer en tant qu’acteurs majeurs du système monétaire et financier international.
Ces décisions entrainent désormais un lot d’interrogations sur leur faisabilité et leurs impacts sur l’économie mondiale.
…dont la mise en place s’annonce complexe
En effet, la mise en place d’une monnaie commune, bien qu’elle paraisse réalisable à l’horizon 2024 pour les BRICS, demande un certain nombre d’ajustements.
Outre les défis techniques associés à une telle mise en œuvre, cette monnaie unique soulève la question de la confiance mutuelle que s’accorde ces pays. En effet, elle leur demanderait une intégration économique et politique bien plus poussée que ce qui a été atteint jusqu’à présent. Et passerait très certainement par la création d’une banque centrale commune à l’image de la Banque Centrale Européenne (BCE).
Chacun de ces pays fait face aujourd’hui à des réalités économiques et politiques bien différentes, ce qui soulève la question du choix de la monnaie. Les BRICS ont déclaré qu’ils réfléchissaient à une monnaie commune adossée sur l’or. Si elle est adoptée, elle pourrait entrainer une forte hausse du cours de ce métal précieux et changer la dynamique des réserves mondiales d’or, en renforçant l’influence des pays détenteurs de réserves d’or.
En effet, une fois reconnue et acceptée par les autres pays cette nouvelle monnaie pourrait redessiner la carte économique mondiale.
Le dollar vit-il ses derniers instants comme monnaie de référence ?
L’envergure économique des BRICS a dépassé cette année celle des pays du G7 et les BRICS élargis devraient représenter 37% du PIB mondial d’ici fin 2023 et plus de 50% en 2050. Cette ampleur économique interroge sur une remise en question du dollar comme monnaie de référence. La Chine qui souhaite « dédollariser » les échanges internationaux est très partisane de l’adoption d’une nouvelle monnaie commune.
Ce phénomène de dédollarisation des échanges mondiaux est inévitable et s’accélère depuis le début de la guerre entre l’Ukraine et la Russie. Antoine Andreani, analyste marché sénior chez XTB France indique à ce sujet « Le monde est en train de se scinder en deux groupes. Malgré les représailles américaines vis-à-vis de la Russie, le monopole du dollar disparaît et sa demande s’écroule. Le dollar est-il mort pour autant ? Non, loin de là. »
En effet, ce n’est pas la première fois que le dollar est remis en question ; son monopole a d’ailleurs disparu dans le secteur pétrolier où les échanges entre les BRICS s’effectuent dans leurs monnaies nationales. Cependant, le dollar demeure l’instrument le plus liquide au monde et LA valeur refuge de référence depuis près d’un siècle.
La mise en place de deux systèmes de paiement internationaux pourrait engendrer de nombreux problèmes : comme une fragmentation du marché, une qualité de l’information économique détériorée ou un accroissement des risques de manipulation politique.
(Source : CP d’XTB France)