Si le bâtiment a fait des efforts sur le plan de sa performance énergétique, il est encore loin d’avoir fait sa révolution en termes d’empreinte carbone et de développement durable. Le lancement par la toute jeune association BBCA d’un label pour 2016 serait donc une précieuse initiative pouvant conduire ceux qui le souhaitent à repenser sous l’angle des émissions de CO2 l’acte de construire dans sa globalité.
Photo : © Djuric Tardio – Le projet lauréat du concours Architecture bas carbone 2014 d’EF: « Imbrications » à Gennevilliers (92) par Djuric-Tardio Architectes
Les émissions de gaz à effet de serre sont la principale cause du réchauffement climatique dans le monde. En France, l’industrie du bâtiment représente 28% des émissions de CO2, ce qui la positionne à la 2ème place des secteurs les plus émissifs, juste derrière le secteur des transports. Aujourd’hui les émissions carbone du bâtiment se répartissent, à parts égales, entre la construction et l’exploitation : les matériaux de construction eux-mêmes, qui représentent 56 % des émissions de CO2 entre leur extraction, leur transformation, leur transport et leur déconstruction en fin de vie, mais également dans l’énergie en phase exploitation (39 % en incluant les usages annexes comme les ascenseurs et l’informatique) ou encore dans les procédés liés au chantier lui-même (3 %).
Le durcissement de la règlementation thermique a permis d’améliorer considérablement la consommation énergétique. Toutefois, la performance environnementale du bâtiment ne doit pas seulement se résumer à sa performance énergétique. Elle doit s’intéresser, en premier lieu, aux émissions de carbone sur l’intégralité du cycle de vie, de la construction à l’exploitation, jusqu’à la fin de vie.
« La prise en compte des émissions carbone était le chaînon manquant de l’effort environnemental accompli jusqu’à présent par les acteurs du bâtiment. A l’heure actuelle, l’urgence, c’est le climat et le climat, c’est le carbone. Dans le contexte de la conférence COP21 à Paris, à la fin de cette année, les travaux de l’Association BBCA permettront à ceux qui le souhaitent de participer activement à la lutte contre le changement climatique », explique Stanislas Pottier, président de l’association BBCA et directeur du développement durable du Groupe Crédit Agricole S.A. depuis septembre 2011 (1).
La toute nouvelle association créée en septembre dernier par Guillaume Poitrinal, patron de Woodeum, et par l’architecte Jean-Michel Wilmotte, va mettre au point un référentiel de mesure de l’empreinte carbone des bâtiments qui permettra d’identifier les « bonnes pratiques » pour guider tous ceux qui souhaitent s’engager dans la voie de la construction bas carbone, avec l’aide d’architectes de renom, des promoteurs immobiliers mais aussi des institutionnels, des entreprises de construction et des bureaux d’ingénierie environnementale qui constituent les membres fondateurs de BBCA.
Lancement du Label Bâtiment Bas Carbone pour 2016
L’ambition de l’association est d’aboutir à un label « BBCA », « Bâtiment Bas Carbone », pour encourager à réduire les émissions de gaz carbone par les bâtiments marchant à énergies renouvelables. Aussi un accord de principe a été signé avec le CSTB et Certivéa en vue de lancer le label dès 2016. « Il s’agit d’une première mondiale qui va permettre de mesurer l’empreinte carbone des bâtiments », a précisé Stanislas Pottier.
Le référentiel sera construit autour des réductions d’émissions de CO2 par une construction raisonnée et une exploitation maîtrisée du bâtiment, mais valorisera également le stockage du CO2 et le recyclage. En effet, la recherche de la performance environnementale se limitait à la baisse de la consommation énergétique des bâtiments recherchant le plus bas taux de KWh/m2, sans compter les émissions carbone.
Comme le précise le site filière 3e, avec la création du label BBCA, les secteurs de l’immobilier et du bâtiment ne pourront pas échapper à leur autocritique. Certes, les efforts ces dernières années en matière d’efficacité énergétique sont considérables : on est désormais capable d’alimenter et de faire fonctionner des logements et des bureaux, des bâtiments et des quartiers avec des énergies renouvelables. Cependant, dans l’obsession de flatter notre bonne conscience écologique, la question de l’émission de gaz dans l’atmosphère par ces bâtiments a été éludée. Plus simplement, on s’est seulement occupé de la partie immergée de l’iceberg. Une formulation qui prend tout son sens, quand on sait que le bâtiment est le secteur émettant le plus de CO2 derrière le transport. On comprend donc pourquoi la réduction de l’empreinte carbone est un pilier essentiel dans la construction de bâtiments propres et durables, et c’est en ce sens qu’œuvrera le label BBCA.
Des exemples d’immeubles à faible empreinte carbone ? L’association cite une résidence étudiante à Noisiel (Seine-et-Marne) constituée de modules préfabriqués en bois, dont les émissions sont réduites de 38 % par rapport à un immeuble équivalent, ou un ensemble de 140 logements à Ris-Orangis (Essonne) en bois massif (- 43 % de CO2), ou encore des bureaux en bois Nexity Ywood à Marseille (-50 %). Le Pavillon circulaire, présent jusqu’au 3 janvier 2016 sur le parvis de l’Hôtel de ville de Paris, fait également partie de ce panorama des solutions à faible empreinte carbone.
Pavillon circulaire Paris
Ce référentiel est une initiative de plus qui va permettre à la France d’être en avance sur ses voisins européens et sur le monde, en construisant des bâtiments qui seront « véritablement » écologiques, sans contrainte de prix et réalisés dans le souci de protection de la planète, et de créer une variante « BBCA – Low Carbon Building » pour l’international et deux autres référentiels : « BBCA -Rénovation » et « BBCA – Quartier » pour s’adresser à un nombre d’opérations encore plus important.
Les populations urbaines sont plus vulnérables aux effets du changement climatique. La montée des eaux, la récurrence des pluies et des périodes de forte chaleur, ainsi que la sécheresse, ont accentué le stress lié aux systèmes urbains, rendant nécessaire l’adaptation des villes face au défi climatique. Elles sont l’enjeu majeur dans l’atteinte des objectifs nationaux et internationaux pour l’adaptation et l’atténuation du changement climatique. Des villes plus résilientes sont la clé de cette adaptation.
(1) Stanislas Pottier a précédemment occupé plusieurs positions dans le secteur public en France et à l’international, notamment au ministère des Finances et à la Banque mondiale. Après avoir participé à plusieurs cabinets ministériels, dont ceux de Thierry Breton et Christine Lagarde, dont il a dirigé le cabinet au Commerce extérieur, il a également conseillé Michel Rocard dans sa mission diplomatique sur l’Arctique et l’Antarctique entre 2009 et 2011.
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