En octobre 2024, le ministère de la Culture a annoncé que le projet « La redirection écologique des établissements culturels » – porté par Universcience, la Friche de la Belle de mai et Origens Medialab – fait partie des 14 lauréats de l’appel à projets, « Alternatives vertes 2 ». Le projet a été officiellement lancé le mercredi 12 mars à Port-Saint-Louis-du-Rhône.
À l’heure de l’Anthropocène, nos modes d’organisation, nos usages, nos savoir-faire atteignent leurs limites. La démarche de redirection écologique veille alors à identifier nos attachements, nos dépendances dans nos activités et pratiques afin de décider collectivement comment les réorienter, les réadapter, voire les fermer.
L’initiative de « Redirection écologique des établissements culturels » est née dans le cadre de l’appel à projets « Alternatives vertes 2 », lancé par le ministère de la Culture en 2024. Ce projet s’inscrit dans le dispositif « Alternatives vertes », initié en 2021 dans le cadre du plan France 2030, qui vise à soutenir l’innovation pour la transition écologique dans le secteur culturel. « Alternatives vertes 2 » étend cette ambition en finançant des outils de mesure de l’empreinte environnementale et des dispositifs de formation continue.
L’objectif de ce projet est d’accompagner les établissements culturels dans leur transition écologique en développant :
- Des méthodologies et des outils d’aide à la décision pour intégrer des pratiques écoresponsables.
- Des solutions numériques de comptabilité écologique, permettant de mesurer et d’optimiser leur impact environnemental.
- Un programme de formation et d’accompagnement pour assurer la diffusion et l’appropriation de ces outils par les professionnels du secteur culturel.
L’ambition est de créer des méthodologies, des outils de pilotage et d’aide à la décision pour accompagner la redirection écologique des établissements culturels et de proposer des solutions numériques de comptabilité écologique. Cette initiative répond à l’enjeu urgent d’aligner les pratiques culturelles avec les impératifs écologiques, en fournissant des solutions concrètes et réplicables pour rendre le secteur culturel plus responsable.
Pour que ce projet puisse voir le jour, un consortium a été constitué : il est piloté par Universcience, la Friche la Belle de mai et Origens Medialab et est composé du Citron Jaune – Centre National des Arts de la Rue et de l’Espace Public, du musée de Grenoble, du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), de l’Observatoire des politiques culturelles (OPC), de l’Institut Supérieur des Techniques du Spectacle (ISTS), du Muséum national d’Histoire naturelle, de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) et de l’office national de diffusion artistique (Onda).
Le projet « La redirection écologique des établissements culturels » se fonde sur une démarche en trois temps :
- Une première phase d’enquête, étape clé des protocoles redirectionnistes, afin d’identifier les enjeux, les usages et les interactions écologiques et modéliser les scenarii prospectifs auxquels seront soumis les établissements culturels ;
- Une seconde phase de co-conception des différents outils de pilotage ;
- Une dernière phase d’essaimage des outils, via la création de programmes de formation et d’offre d’accompagnement à la prise en main des outils aux établissements culturels.
L’ambition de France 2030 est de transformer durablement des secteurs clefs de l’économie française afin d’anticiper les mutations et de positionner la France en leader mondial des grandes innovations stratégiques. Placer la France en tête de la production des contenus culturels de demain constitue l’un des dix objectifs de France 2030. Parmi les enjeux stratégiques, la transition écologique des industries culturelles et créatives (ICC) représente une priorité.
L’ensemble des filières culturelles sont éligibles, à savoir l’audiovisuel, le cinéma, le spectacle vivant dans toutes ses disciplines, la musique dans toutes ses composantes, les musées et le patrimoine, les arts visuels, le design, l’architecture, les métiers d’art, le jeu vidéo, le livre, et la presse, ainsi que les secteurs connexes de la communication et de la mode pour le volet créatif de leur activité.
Création artistique et urgence écologique
La question écologique traverse depuis longtemps le champ de la création artistique et les institutions culturelles qui lui sont dédiées, mais de façon diffuse, inégale, souvent peu concertée, sans que l’art écologique ait connu la publicité qui a accompagné nombre de courants artistiques apparus avec lui à partir des années 1960, et sans que l’enjeu écologique ait été suffisamment porté par les politiques publiques culturelles.
La confrontation de tous au phénomène désormais mondialement reconnu du dérèglement climatique, ainsi qu’aux autres bouleversements induits par l’activité humaine à l’échelle de notre planète depuis le début de l’ère industrielle, a contribué à l’accélération de la prise de conscience collective. Aujourd’hui, nombreux sont les acteurs de l’écosystème de la création artistique (créateurs, opérateurs, chercheurs, enseignants, écoconseillers, etc.) qui placent l’écoresponsabilité et ses déclinaisons artistiques et culturelles (l’écoconception, l’écocréation, l’écocritique, l’écosophie, etc.) au cœur de leurs pratiques.
L’époque dans laquelle nous vivons est « passionnante », au sens courant comme au sens étymologique du terme. Appelée Androcène, Anthropocène, Chthulucène, Capitalocène, Plantacionocène ou Poubellocène, l’ère dont les temps dits « modernes » ont constitué la prémisse se caractérise par le fait que l’humanité est capable d’exercer désormais sur l’ensemble de son environnement des forces, dont les conséquences directes ou indirectes (géologiques, climatiques, etc.) sont supérieures à celles habituellement produites par la « nature ».
Les chiffres sont un moyen parmi d’autres de se « représenter » la mutation en cours. Ils sont ahurissants et dessinent les contours d’un nouvel impératif catégorique, la transformation et l’urgence écologiques. Liés les uns aux autres, les objets ou phénomènes qui nous importent sont, entre autres, la sécheresse, la montée des eaux, les conflits guerriers pour l’accès à l’eau et aux matières premières, les migrations climatiques et l’effondrement de la biodiversité, condition indispensable à la vie dans tous ses aspects.
Le milieu de la création artistique est doublement concerné par la crise écologique planétaire, d’une part, et pour s’en tenir à la question du dérèglement climatique, comme émetteur direct ou indirect de gaz à effet de serre, d’autre part, comme producteur de nouvelles représentations et manières de faire, prémisses à des choix d’adaptations qui nous permettront demain de faire autrement que de subir les inéluctables bouleversements.
La conscience de la responsabilité écologique du secteur de la création artistique ne cesse de grandir et donne déjà lieu à des transformations importantes des imaginaires, des récits, des écritures et des formes, mais aussi de l’économie, des modes de vie, de production et de diffusion, bref de l’ingénierie, mot qui englobe des activités aussi diverses que l’alimentation (elle constitue un poste important dans les festivals), les mobilités (des artistes, des œuvres, des équipes et des publics), les bâtiments (souvent qualifiés de passoires thermiques), la communication (en particulier numérique, secteur dont l’empreinte carbone a déjà dépassé dans le monde celle du transport aérien) et bien sûr aussi la conception ou l’écoconception des œuvres dans leur champ élargi (depuis la mode, industrie créative très polluante, jusqu’aux décors d’opéra). (Source : Culture et recherche – Ministère de la Culture, 2023)
Alternatives vertes
Depuis 2021, ce dispositif du plan France 2030 soutient l’innovation, sous toutes ses formes, au service de la transition écologique des acteurs culturels. Il vise à accélérer la transition écologique des entreprises culturelles, afin d’en faire un secteur de référence en matière de responsabilité environnementale.
Le dispositif favorise le développement de solutions innovantes, réplicables et structurantes au regard de leur potentiel de transformation écologique des pratiques culturelles, dans tous les segments de la chaîne de valeurs des entreprises concernées.
« Alternatives vertes 2 » étend son périmètre au financement d’outils de mesure d’empreinte environnementale et de dispositifs de formation continue, le déploiement de solutions vertes passant par la montée en compétences des professionnels en activité. « Alternatives vertes 2 » est opéré pour le compte de l’État par la Banque des Territoires (Groupe Caisse des Dépôts) en lien avec le ministère de la Culture, le ministère de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche et le Secrétariat général pour l’investissement.
Image d’en-tête : Carte de Tendre, Terre amoureuse, Ferale – Fresque aquarelle, 150 × 100 cm, Stéphanie Sagot pour le Nouveau Ministère de l’Agriculture.
© Stéphanie Sagot-Nouveau Ministère de l’Agriculture. Remerciements à l’artiste. Cette aquarelle appartient à la série des « écotopies » exposées en 2023 dans le centre d’art La graineterie, à Houilles.
Chanter les 4 éléments pour habiter notre Terre- Mère . « Crache la lave, », école du cerisier, youtube, dans le cadre du Printemps des Poètes à l’Université, Nice