Puissance du pensif
François Jullien propose une méditation exigeante et subtile sur une forme de pensée que la philosophie a longtemps tenue à distance, voire reléguée à l’arrière-plan : une pensée non conceptuelle, indirecte, qui ne cherche pas à définir, mais à laisser advenir. Il explore ce qu’il nomme le « pensif », non comme un manque de rigueur, mais comme une autre puissance de l’esprit. Une belle réflexion sur la nécessité de diversifier nos modes de compréhension du monde, en réhabilitant une intelligence du sensible et du latent.
Dominique Perrault
Cette monographie de l’architecte-urbaniste Dominique Perrault s’impose comme un ouvrage de référence. À travers un riche appareil iconographique et des textes analytiques exigeants, le livre retrace plus de trente ans de pratique architecturale, tout en donnant les clés conceptuelles nécessaires pour comprendre une œuvre à la fois cohérente, radicale et profondément inscrite dans les mutations du monde urbain. La force de cette monographie réside dans sa capacité à articuler pensée théorique et réalité construite.
Sous les toits des cathédrales
Le livre révèle un monde invisible au regard du public : celui des charpentes, des combles et des structures hautes des cathédrales, espaces techniques et symboliques à la fois, où se rencontrent l’ingéniosité des bâtisseurs médiévaux et la lente patine du temps. Huit photographes de talent ont ainsi immortalisé ces lieux, renouant avec l’esprit de la Mission Héliographique du XIXᵉ siècle. Mais ce beau livre rappelle aussi que le patrimoine n’est pas figé, mais vivant, soumis aux exigences de son époque.
Reconnaître le fascisme
Les sociétés démocratiques sont-elles à l’abri d’un retour du fascisme ? Non, dit Umberto Eco, qui nous met en garde contre le masque innocent que prendra le fascisme pour revenir au pouvoir. Reconnaître le fascisme n’est pas seulement un essai de mémoire ou d’histoire : c’est un outil d’analyse politique et morale, une invitation à la vigilance intellectuelle et citoyenne. En cela, le texte demeure essentiel pour comprendre les dérives contemporaines et rappeler que la démocratie n’est jamais acquise, mais toujours à défendre.
Armements et arsenalisations : moyens et mots de la guerre
La guerre a fait son retour dans la réalité politique européenne et la métaphore guerrière continue de s’affirmer comme outil rhétorique. Depuis 2022, le réarmement – démographique, moral, intellectuel – s’impose comme motif récurrent des discours politiques et médiatiques. Cela soulève de nombreux questionnements auxquels la Revue propose des analyses et réflexions.
La société des faux savoirs
Une tension permanente agite nos sociétés de la communication. D’un côté, les citoyens consomment de l’actualité à tout va, se biberonnent à l’information du matin au soir, réclamant des comptes-rendus toujours plus justes et rapides de l’état du monde. De l’autre, les idées reçues, les jugements hâtifs, les théories du complot, les fake news, la désinformation ne cessent de gagner du terrain. » Comment expliquer que l’abondance d’information, loin de clarifier le réel, l’obscurcisse ? Pourquoi la profusion de données n’a-t-elle pas produit plus de discernement, mais au contraire stimulé la confusion ?
La nature à ses justes valeurs
Via un collectif d’experts pluridisciplinaires, ce petit manifeste propose de regarder la crise écologique non seulement comme un empilement d’alarmes scientifiques, mais comme le symptôme d’une crise plus profonde : une crise des valeurs que nos sociétés assignent à la nature. Il nous amène à comprendre que préserver la Terre ne se limite pas à des mesures techniques ou réglementaires, mais qu’il passe par une transformation profonde de nos valeurs, de nos imaginaires, de nos cadres collectifs.
Le monde et la Terre. Comment les préserver ?
L’enjeu, selon l’auteur, est de déplacer notre conception de la politique — non plus centrée sur des États ou des intérêts nationaux, mais sur la Terre elle-même, comprise comme sujet collectif, porteur de droits, dignité, et intérêt politique. Plutôt que de raisonner selon la « raison d’État » — la logique traditionnelle des relations internationales —, il plaide pour une « raison de Terre », c’est-à-dire une gouvernance globale. Et si la véritable sécurité, au XXIᵉ siècle, ne résidait plus dans la force des armes, mais dans notre capacité à protéger le vivant ?
La lutte enchantée
Il est question ici de désobéissance civile, d’écologie politique, de démocratie, d’algorithmes, de capitalisme, de plastique, de poissons morts, de crottes de chien, de stratégies pour faire tomber un pipeline ou un dictateur, mais aussi de poésie, de santé mentale, de Beatles et d’amour. La lutte enchantée se veut un « manifeste » : un appel à l’action, à la conscience, à la résistance — non seulement politique ou écologique, mais existentielle et culturelle.
Décarboner ou décliner ? La transition écologique au secours de la souveraineté européenne
L’argument central du livre repose sur une inversion du regard : la transition écologique n’est pas une contrainte, mais une protection. Ce qui fait la force du livre est sans doute sa capacité à articuler vision politique, analyse géo-économique et solutions concrètes. L’auteur propose un récit mobilisateur : celui d’une Europe qui ne subit plus le monde, mais le façonne, grâce à la décarbonation. C’est en embrassant résolument la transformation écologique que l’Union européenne pourra conjurer son déclin, renouer avec la prospérité et redevenir un acteur majeur sur la scène internationale.
Ukraine, la poésie en guerre
Dans un monde saturé d’images et de récits stratégiques, ce livre rappelle que la guerre est d’abord une expérience humaine. Ces cent poèmes permettent de comprendre ce que signifie résister quand les mots eux-mêmes semblent menacés. L’anthologie fait acte de mémoire, mais aussi de confiance en l’avenir : chaque poème est la preuve que, même sous les bombes, une voix persiste. Et tant que cette voix existe, la destruction n’est jamais totale.
Nietzsche et les techniques
L’intérêt du livre réside dans sa capacité à replacer Nietzsche au cœur d’un dialogue contemporain, en le confrontant aux problématiques de l’industrialisation, aux analyses historiques de Marx et à l’ontologie de la technique formulée bien plus tard par Heidegger. Ce rapprochement permet de mesurer à quel point Nietzsche se distingue des théoriciens pour qui la technique n’est qu’un destin ou une infrastructure : chez lui, elle devient le théâtre d’un combat entre forces actives et forces réactives, entre expansion créatrice et mécanisation appauvrissante.
Un monde à découvrir. Des atomes aux étoiles, les plus belles images de sciences
Ce livre est bien plus qu’un recueil d’images spectaculaires : c’est un livre-passerelle entre l’art et la science, entre le savoir et le regard. En célébrant la dimension visuelle des découvertes scientifiques, l’auteur invite à une forme de connaissance qui n’oppose pas rationalité et émotion, mais les unit. Le lecteur referme l’ouvrage avec un sentiment rare : celui de participer, par les yeux, à la grande exploration du réel, un vertigineux voyage dans ce que la science donne à voir du réel.
Le chant perdu des baleines. Quand la pollution sonore étouffe les voix de l’océan
Le chant perdu des baleines est à la fois une enquête scientifique précise, un récit personnel et immersif, un appel politique fort et un hommage aux créatures marines et à leur génie acoustique.
Par son mélange d’humour, de pédagogie et de gravité, l’auteure parvient à transformer un sujet technique en un récit qui touche profondément. Elle nous invite à écouter ce que l’océan tente encore de nous dire, avant que ses voix ne disparaissent.
Les Audionautes. Sur les traces des chants de la Terre
Les audionautes se situe au croisement du récit de voyage, de l’essai écologique et de la méditation philosophique. Caroline Audibert y déploie une conviction forte : pour affronter les vacillements planétaires, il faut d’abord réapprendre à entendre. Son livre agit comme un accordeur intérieur, une tentative de retendre les fils sensibles entre nous et le vivant. À l’heure où tant d’écosystèmes disparaissent sans même que leurs voix aient été entendues, cette proposition résonne comme un geste d’urgence et de beauté.
Chroniques dilettantes
Voici un livre qui se déploie comme la trace lumineuse de la curiosité insatiable d’un homme pour qui la culture n’a jamais été un simple décor, mais l’axe vivant autour duquel s’est toujours articulée son existence. Ce qui frappe, c’est la capacité de l’auteur à mêler la précision du conservateur à l’émotion du promeneur : ses descriptions de Caravage ou de Manet ne sont jamais purement esthétiques, elles témoignent d’une manière de regarder le monde qui fait de la contemplation une forme d’engagement.
Rural Mania – Aménager les ruralités, entre transition écologique et justice sociale
Ce livre bouscule les idées reçues sur la « France des campagnes » et offre un regard vif, éclairant et profondément contemporain sur les transformations des territoires ruraux. En montrant comment ces espaces deviennent des acteurs clés de la transition écologique et sociale, l’ouvrage ouvre des perspectives nouvelles et stimulantes. Un livre indispensable pour comprendre les enjeux qui façonneront la France de demain.
Comment sauver les haies ?
C’est un livre nécessaire, galvanisant, rigoureux et engagé. Il permet non seulement de comprendre « pourquoi » il faut agir, mais aussi de se demander « comment » agir. Pour qu’il ne soit plus question de leur disparition silencieuse, mais de leur renaissance active dans les paysages ruraux et périurbains. À tous ceux qui croient que les haies peuvent être des lignes de vie plutôt que des reliques, cet ouvrage offre une boussole pour penser, agir et (re)donner sens à ces fragments de nature qui bordent nos champs.
Nature moderne
Nature moderne est le journal sans fard des dernières années de l’auteur dans cette improbable oasis construite de ses mains, refuge face à la violence de l’époque et à la montée de la maladie. Il est une célébration lumineuse de ce qui vit malgré tout : l’amour et les corps, la littérature et le cinéma, les mauvaises herbes et les goélands. Un livre bouleversant, non parce qu’il exhibe la souffrance, mais parce qu’il montre comment une existence menacée peut encore inventer de la beauté, de la tendresse et du sens.
Balade sous la pluie
L’auteur propose une « promenade » à travers le phénomène de la pluie : de l’orage à la goutte, du cycle de l’eau à l’impact humain — pour découvrir ce qui se cache derrière la pluie. En construisant le livre comme une promenade — “escales” –, les auteurs invitent le lecteur à flâner, s’arrêter, observer, s’étonner. Désormais, vous ne verrez plus la pluie non seulement comme une nuisance, ou comme un simple arrosage, mais comme un acteur majeur de tous les jours.
Futuribles – Numéro anniversaire, 50 ans
Ce numéro 469 de Futuribles constitue un moment symbolique : celui où la revue regarde en arrière pour mieux avancer. Il propose une réflexion à la fois historique et prospective, variée et dense. Si l’on accepte de s’engager dans des articles parfois techniques ou exigeants, on en ressort enrichi : avec des questions, des pistes, des connexions. Même sans être expert en prospective, ce numéro permet une “vue panoramique” des grands enjeux du monde contemporain, avec “un pied dans l’histoire” (les 50 ans) et “un regard vers demain”.
L’homme poisson
Enfant, David Wahl rêvait de devenir amphibie. Il guettait la métamorphose, cherchait un moyen de transformer ses jambes en queue de poisson. Troquer la marche pesante pour la nage légère, n’est-ce pas un fantasme propre à l’humain ? Mêlant ses songes aux dernières découvertes scientifiques, il remonte à nos origines aquatiques, révèle ce qu’il reste de cette histoire dans nos corps et s’interroge sur notre devenir. Serions-nous plus sirènes qu’on ne l’imagine ? David Wahl, en véritable conteur, raconte l’océan en nous.
Des savants et des dieux I
Comment l’activité scientifique a-t-elle vu le jour ? Dans cet ouvrage, Pascal Richet propose une histoire de l’émergence de l’activité scientifique replacée dans ses contextes religieux, politiques et sociaux. Des savants et des dieux. I est un tome inaugural convaincant : il démonte les mythes d’une naissance « pure » de la rationalité, restitue la matrice mésopotamienne des savoirs et prépare une histoire au long cours des rapports entre savants et dieux.
Histoire d’un ruisseau
Avec cette réédition par les éditions Reliefs d’Histoire d’un ruisseau, on redécouvre Élisée Reclus qui offre ici l’une des expressions les plus limpides de sa pensée : une géographie sensible, fraternelle et visionnaire, dont cette réédition illustrée restitue toute la beauté et la portée intemporelle. Publié en 1869, Élisée Reclus fait bien plus qu’un ouvrage didactique de géographie sociale. Il y inclut la dimension humaine dans l’analyse géographique et compose une véritable méditation sur le lien entre nature et société.























